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Décision 1997

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Le difficile retour aux sources
LAURENT LAPLANTE
Le 23 mai 1997

D'ardentes supputations agitent les milieux souverainistes.  À la seule pensée que le Bloc québécois ne soit plus tantôt l'opposition officielle à la Chambre des communes, certains pèlerins de la souveraineté envisagent de se retirer au désert pour y cuver leur humiliation.  Sans sadisme aucun, je souhaite, pour ma part, que le Bloc soit soulagé de cette tâche.

Le Bloc, nous disait-on au début de l'aventure, n'est pas un parti traditionnel.  Il est une opération commando en territoire fédéral, une incursion de courte durée dans le fonctionnement d'une Confédération que les souverainistes souhaitent remanier voire démembrer.  Avant même d'entrer en scène, le Bloc promettait de n'y faire qu'un bref séjour.

Et pourquoi le Bloc tentait-il cette opération coup de poing?  Pour un seul motif : faire entendre dans l'enceinte fédérale par excellence la voix de la souveraineté québécoise.  C'était déjà un programme astreignant.  Le succès, malheureusement, vint l'alourdir encore.  Le Bloc, en effet, a fait élire en 1993 un si grand nombre de députés qu'il a vu miroiter devant ses yeux la tentation d'être l'opposition officielle.  Le Bloc, sans vraiment mesurer les risques, a d'emblée accepté ce périlleux honneur et a commencé à défendre, outre les intérêts québécois, ceux des fermiers de l'Ouest aussi bien que ceux des pêcheurs des Maritimes.  Le Bloc, qui devait parler au nom d'une société distincte, a commencé à parler au nom de la société que composent tous les Canadiens mécontents du gouvernement.  Les députés bloquistes pouvaient parler plus souvent, mais leurs interventions s'éparpillaient dans toutes les directions.

Que faut-il espérer pour le Bloc à l'occasion de ce scrutin?  Deux choses.  D'abord, qu'il maintienne et même accroisse le nombre de ses élus, s'il n'est pas trop tard pour de tels espoirs.  Mais aussi que le Bloc cesse d'envisager comme une calamité l'hypothèse de ne plus être l'opposition officielle.  Il sera, en effet, plus efficace en retrouvant sa liberté d'action de simple porte-parole québécois qu'en gardant sur ses épaules la tâche d'articuler les griefs du Canada entier.  Tant mieux s'il obtient cinquante sièges et plus, à condition, cependant, qu'il cède aux conservateurs ou aux réformistes, même moins bien représentés, le soin de constituer l'opposition officielle.  À compter du moment où le Bloc détient plus de la moitié des 75 sièges québécois, il peut, en effet, contester à tous les partis le droit de parler légitimement au nom du Québec.  C'est assez.

Quand je souhaite le succès du Bloc québécois, c'est pour que se maintienne sur le Canada anglais la pression actuelle.  Un Bloc puissant, voilà qui empêche le pays de croire que tout va bien dans le système canadien.  Voilà qui impose à l'agenda politique de prévoir la redistribution des pouvoirs.  Cette refonte, beaucoup au Canada la souhaitent, même hors Québec, mais seule une forte pression québécoise la rendra prioritaire.

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Courrier
Mise en ligne : Le 23 mai 1997.
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Montréal (Québec)
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