18.2.05

«C’est un diplomate...»

NegroponteVoilà une des phrases utilisées par George W. Bush pour décrire John D. Negroponte, le nouveau grand patron des services de renseignement des États-Unis.

Ce n’est pas tout à fait faux. Negroponte a été à l’emploi du service des affaires étrangères de 1960 à 1997, et a servi comme ambassadeur auprès des Nations Unies de septembre 2001 à juin 2004 avant d’être nommé ambassadeur en Irak. Voir sa biographie sur Wikipedia.

Le problème, c’est qu’il a été une des personnes au centre de l’affaire Iran/Contra visant à combattre les sandinistes nicaraguayens, et qu’il a camouflé les opérations de la CIA au Honduras durant son mandat comme ambassadeur (1981 à 1985), période qui a par ailleurs vu l’aide militaire étasunienne passer de 4 à 77,4 millions de dollars par année.

Ce 17 février, on lit dans Newsweek que le milieu du renseignement aux États-Unis se réjouit de la nomination de Negroponte. Pourquoi? «En partie parce qu’il s’est mérité le respect de bien des membres du milieu du renseignement depuis la doctrine de contre-insurrection sous l’administration Reagan. “C’est un type qui sait jouer dur. Il comprend tout l’éventail du contre-espionnage, du renseignement et des opérations clandestines” affirme John MacGaffin, l’ex-directeur adjoint aux opérations de la CIA.

En Irak, on a entendu parler de l’«option salvadorienne». Au cours des années quatre-vingt, sous l’administration Reagan, les États-Unis avaient appuyé et financé au Salvador des escadrons de la mort pour éliminer les dissident politiques. Le 14 janvier dernier, toujours dans Newsweek, on apprenait que les États-Unis envisageaient une telle opération pour mater la violence en Irak. Negroponte, le diplomate, a-t-il participé à ces réflexions?

Y aurait-il un lien entre Negroponte, une hypothétique application du modèle salvadorien en Irak, et l’assassinat de 310 scientifiques irakiens et 120 imams et personnalités religieuses depuis la chute de Bagdad? (Voir les articles de Ghali Hassan du 21 novembre 2004 et du 24 janvier 2005).

«C’est un diplomate...» Avant d’entrer en fonction, Negroponte devra recevoir l’aval du Sénat (majoritairement républicain). D’ici là, verra-t-on la presse soulever certains éléments assez sombres de sa carrière? Chose certaine, les blogueurs sont sur la piste, à commencer par DailyKos.

Negroponte en quelques textes :

When a wave of torture and murder staggered a small U.S. ally, truth was a casualty
Baltimore Sun, 11 juin 1995

Torturers' confessions
Baltimore Sun, 13 juin 1995

A survivor tells her story
Baltimore Sun, 15 juin 1995

A carefully crafted deception
Baltimore Sun, 18 juin 1995

Former envoy to Honduras says he did what he could
Baltimore Sun, 15 décembre 1995

Our Man in Honduras
New York Review of Books, 18 octobre 2001

John Negroponte : Du Honduras à l’Irak, en passant par l’ONU
The Council on Hemispheric Affairs, 1er mai 2004

Negroponte, le nouvel ambassadeur US en Irak
Radio Air Libre, automne 2004

Negroponte: The Right Man for the Job but for the Wrong Reasons
Council of Hemispheric Affairs, 17 février 2005
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