18.8.06

Des conflits qui n’en finissent pas de s’éteindre

Depuis l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, des dizaines de milliers de Libanais tentent de réintégrer leurs collectivités pour constater s’il reste quoi que ce soit des lieux qu’ils habitaient. Or, Human Rights Watch et des organismes des Nations Unies mettent la population en garde contre les munitions explosives non explosées (UXO en jargon militaire) qui parsèment le territoire du Sud-Liban. Bien qu’elles n’aient pas explosé, ces munitions risque de le faire si elles sont touchées, manipulées ou déplacées.

HRW croit que Tsahal et le Hezbollah devraient partager avec les organismes de l’ONU toute l’information dont ils disposent sur les cibles de leurs attaques et le type d’engins utilisés au cours des 33 jours du conflit, de manière à faciliter la neutralisation des UXO (voir Lebanon: Protect Civilians From Unexploded Weapons, HRW, 16 août 2006).

Mortier UXOL’aviation israélienne a largué en moyenne de 200 à 300 bombes dans la zone frontalière immédiate, et le même nombre dans d’autres zones du Sud-Liban. En plus du bombardement des quartiers de Beyrouth-Sud et de la vallée de la Bekka, ces opérations ont laissé un très grand nombre d’engin non éclatés selon HRW (photos à l’appui), y compris des bombes de 250, 500 et 1 000 kilos. S’ajoutent à ces engins entre 200 à 300 missiles air/sol par jour sur ces mêmes zones, ainsi que 2 000 obus d’artillerie par jour. Quant au Hezbollah, il a fait amplement usage d’obus de mortiers reconnus pour avoir un taux élevé de non éclatement (photo du Centre de coordination des mines de l’ONU au Sud-Liban, 15 août 2006).

Des spécialistes étasuniens estiment le taux de non éclatement à 14 %. Au bout de 33 jours, faites le compte.

HRW rapporte qu’il y a déjà eu 16 décès dans la population civile attribuables au déclenchement d’UXO, un chiffre qui pourrait grimper au cours des semaines et mois à venir (voir Lebanon: Israeli Cluster Munitions Threaten Civilians, HRW, 17 août 2006). Des équipes de techniciens ont déjà repéré une dizaine de zones où se trouvent des UXO, mais ce ne serait probablement que la pointe de l’iceberg selon les responsables.

La situation est aggravée par l’utilisation de bombes à dispersion, c’est à dire d’engins contenant des milliers de petits fragments métalliques qui se dispersent lors de l’impact. Les experts confirment qu’il y a typiquement un taux élevé de non éclatement de ces engins. Pour Kenneth Roth, directeur exécutif de HRW, les lois de la guerre n’interdisent pas l’utilisation de bombes à dispersion, mais on ne peut y avoir recours dans des zones près de civils car ces armes ne peuvent être dirigées uniquement contre des cibles militaires.

En 2004, sombre héritage des conflits passés, le Landmine Monitor Report avait enregistré 12 blessés et deux morts attribuables au déclenchement tardif d’UXO. Toutes les victimes étaient des civils. En juin 2005, l’armée libanaise rapportait que depuis 1970 les UXO avaient fait 1 835 morts et 2 140 blessés.

Il y a de ces conflits qui n’en finissent pas de s’éteindre.
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