1.2.07

Montréal, tourisme et Internet

Parc Lafontaine


Le président-directeur général de Tourisme Montréal, Charles Lapointe, a jeté un pavé dans la mare (ou dans le nid de poule) mardi alors qu’il était conférencier invité au déjeuner-causerie de la chambre de commerce du Montréal métropolitain.  Son allocution a déplu à ce point au maire Gérald Tremblay qu’il a quitté la salle avant la fin du repas, malgré qu’un point de presse ait été prévu avec les médias. 

On lit ce matin que «Le maire Gérald Tremblay estime que le président-directeur général de Tourisme Montréal, Charles Lapointe, n'a plus sa place comme promoteur de la métropole à la suite de sa sortie virulente sur l'image de la ville auprès des étrangers.[...]  Pour Gérald Tremblay, Charles Lapointe fait preuve d'un “pessimisme déplacé” et entretient la morosité ambiante à l'endroit de Montréal.  “Toute vérité n'est pas bonne à dire en public.[...]  Ses propos, notamment par Internet, vont faire le tour de la planète et ça va être difficile de dire pourquoi il faut venir à Montréal,” soutient le maire de Montréal.» (Voir Gérald Tremblay désavoue Charles Lapointe, La Presse, 1er février 2007). 

Qu’a pu dire M. Lapointe qui a pu déplaire à ce point au maire Tremblay? Quelques extraits de l’allocution intitulée Grandeurs et misères du tourisme montréalais (format PDF).

Montréal est, encore trop souvent, laide.  À trop souvent s’auto-congratuler, on oublie parfois de voir les petites horreurs que nous côtoyons quotidiennement, mais qui sautent aux yeux des touristes en visite ici.
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Ces voyageurs internautes parlent de nous sur des plates-formes – blogues en tout genre – où ils sont lus par des milliers de visiteurs, potentiellement intéressés à visiter Montréal, qui font davantage confiance à d’illustres inconnus qu’à nous! Et quand on regarde plus attentivement les commentaires des internautes – que nous surveillons désormais de très près – notre ego en prend pour son rhume … nous qui nous croyions si beaux et si parfaits!
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Ces « petits détails », la propreté, l’état du mobilier urbain, l’entretien des rues, boulevards et trottoirs sont autant de petites misères que nous ne voyons plus…
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Il était possible encore, il n’y pas si longtemps, de cacher les petits détails de la laideur montréalaise.  Qui s’en souciait!? Mais le contexte a drastiquement changé.  Internet - qui est un outil fabuleux pour rejoindre les touristes potentiels - leur a donné un pouvoir qu’ils n’avaient jamais eu par le passé.  Pendant qu’on fait du marketing, le touriste potentiel, lui, possède désormais le «pouvoir» de savoir, de planifier, de commenter et même de faire des dégâts… Les nouvelles technologies ne sont pas de simples gadgets, elles représentent un nouveau mode de vie planétaire.
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Cette nouvelle réalité a aussi profondément changé la façon dont on fait notre travail à Tourisme Montréal.  Pour des fins de simplification, notre travail dans les années 80 consistait à faire de grandes campagnes de publicité dans de grands médias généralistes et à espérer que quelqu’un «accroche» à notre proposition.  On lançait le filet à la mer!  Puis, au milieu des années 90, tourisme Montréal a été la première destination canadienne à se doter d’un site internet.  Sans le savoir, nous avions mis la main dans un immense tordeur.
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Aujourd’hui, les voyageurs, sur leur propre site ou autres sites de voyages et de commentaires – les blogues – deviennent eux-mêmes chroniqueurs de voyages.  Nous nous intéressons donc, à l’aide d’experts, à comprendre la valeur de ces sites, à comprendre les sujets qui interpellent le plus les visiteurs à Montréal et à voir de quoi ils parlent, quels sont leurs coups de coeur et leurs coups de pied...  Alors, désormais, avec ce pouvoir parallèle des internautes, nous avons recentré notre message pour faire valoir ce qu’est Montréal.

Internet, Web, blogues...  Il y avait longtemps que nous n’avions entendu une allocution d’un responsable public accorder tant d’importance au réseau.  Mais quand le maire Tremblay dit que les propos de M. Lapointe «notamment par Internet, vont faire le tour de la planète et ça va être difficile de dire pourquoi il faut venir à Montréal», il semble oublier le potentiel que peut avoir le réseau pour faire valoir les charmes de la ville.

Il y a un an, Martine attirait notre attention sur un site collectif (178 membres) hébergé chez Flickr Guess where in Montreal? qui présente des photos de notre ville si terriblement photogénique sous forme de jeu.  Il s’agit de savoir où à Montréal les photos (586 en tout) ont été prises.  Or, à cause de la diversité des styles urbains qu’on trouve à Montréal, le jeu s’avère plus difficile qu’il n’y paraît.  Outre le talent des participants, il ressort de ce site qu’il pourrait servir d’outil promotionnel pour le Bureau du cinéma ou Tourisme Montréal tellement il illustre bien les qualités visuelles de la ville.

Pour ma part, j’ai traité un peu de l’urbanité montréalaise dans Un autre Plateau, Desbiens, muraliste et dans la Section III des Complicités

Beaucoup d’autres expriment Montréal en photo dans Internet, et plusieurs de fort belle manière, et ce que Messieurs Lapointe et Tremblay devraient comprendre c’est que ces contenus sont également disponibles à la clientèle touristique potentielle.

Comprenons-nous.  Il ne s’agit pas de dire qu’il n’y a pas un problème d’image pour Montréal, qu'il n'y a pas des secteurs à améliorer, etc.  Il faut cependant être réalistes, voir et agir sur ces «petites misères», et surtout utiliser les leviers disponibles pour «faire valoir ce qu’est Montréal».
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