8.6.05

Zahra Kazemi censurée

Zahra KazemiL’exposition posthume de la photojournaliste Zahra Kazemi intitulée Contre l'oubli a été censurée par les autorités de l’arrondissement Côte-Saint-Luc, Hampstead, Montréal-Ouest. Pour rappel, Madame Kazemi est décédée en juillet 2003 d’une hémorragie cérébrale alors qu’elle était en détention en Iran. Elle avait été arrêtée pour avoir pris des photos de l’extérieur d’une prison à Téhéran. Les autorités iraniennes n’ont jamais fait la lumière sur les circonstances de sa mort. L’exposition, qui a fait l’objet d’une plainte par un résidant juif de l’arrondissement, devait se tenir à bibliothèque municipale de Côte-Saint-Luc. Radio-Canada rapporte que la plainte était à l'effet que l'exposition avait un ton politique et montrait cinq photos de l'Intifada en Palestine a précisé le directeur de l'arrondissement David Johnstone. On a tenté de convaincre le fils de Zahra Kazemi, Stephan Hachemi, de retirer les cinq photos de l’exposition, mais il a catégoriquement refusé. Les élus de l'arrondissement ont préféré annuler l'événement à la suite d'une réunion. Stephan Hachemi entend poursuivre la Ville de Montréal pour être dédommagé pour le temps qu'il a passé à monter l'exposition. Soulignons que cette même exposition avait été présentée par la Ville de Paris en mars et avril 2004 avec le soutien de la Fédération internationale des ligues des droits de l'Homme.

Interrogés par Pierre Maisonneuve sur les ondes de la Première chaîne, le maire de l’arrondissement Robert Libman a dit que les photos de Palestine étaient choquantes pour la population à majorité juive de Côte-Saint-Luc; maître Julius Grey, avocat et constitutionnaliste, s’est pour sa part demandé depuis quand un gouvernement local pouvait prendre une décision relevant de politique extérieure.

Arbitraire, dilettantisme et irresponsabilité des autorités municipales selon David Ouellette qui écrit dans Judéoscope «Arbitraire, parce que peu importe le coloris politique des photos en question, il ne revient pas aux autorités municipales de juger de leur mérite. Le directeur de l’arrondissement, David Johnstone, défend la décision en prétendant que les institutions publiques sont libres de déterminer leurs propres politiques. Soit, mais le retrait arbitraire de photos d’une exposition ne constitue pas une politique, mais un acte de censure qui n’a pas sa place dans une société libre. Dilettantisme, parce que si l’exposition avait effectivement contenu du matériel questionnable, voire offensant - et ce n'est pas le cas -, comment expliquer que les responsables ne s’en aperçoivent qu’a posteriori? Il leur incombait de défendre leur choix face à la critique et d'inviter le public à consigner ses commentaires dans le livre d'or de l'exposition. Irresponsabilité, parce qu’en invoquant la sensibilité de la population juive comme prétexte au retrait des photographies, les autorités municipales - dont Robert Libman, un ancien directeur du B’nai Brith - font de facto porter aux juifs de Montréal le masque du censeur, alors que la municipalité dit n’avoir agi qu’à la suite d’une seule plainte, et ce, dans un quartier où les juifs sont majoritaires.»

Entre temps, Chris Hand de la galerie Zeke dit tenter de présenter l’exposition Contre l'oubli à sa propre galerie.
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