15.10.04

Pax Christi en Haïti

Une délégation de l’organisme Pax Christi (mouvement catholique international pour la paix) s’est rendue en Haïti du 27 au 30 septembre 2004 pour enquêter sur la situation des droits de la personne. Quelques extraits d’un rapport accablant.

«L’état des droits de la personne en Haïti est pire qu’il ne l’a été depuis des années. Nous convenons avec le peuple haïtien que l’exil forcé du président Aristide par les États-Unis était dans les faits un coup d’État contre un gouvernement dûment élu, et son remplacement par un gouvernement illégalement désigné par une minorité, disposant des pouvoirs économiques et militaires, et appuyé par les États-Unis, la France et le Canada.»

«La délégation a visité le Pénitencier national à Port-au-Prince. On y trouve 868 détenus, dont 847 sont en attente de procès, seulement 21 détenus ont été condamnés. Les autorités pénitentiaires déclarent que la majorité des détenus n’ont pas comparu devant un magistrat, et ne savent pas quand ils pourront comparaître.»

«La ministre Privert [Ndlr. Jocelerne Privert, ministre de l’Intérieur dans le gouvernement Aristide] est emprisonnée depuis six mois sans avoir comparu devant un magistrat, alors que la loi prévoit la comparution d’un prévenu dans les 48 heures. [...] Le premier ministre Yvon Neptune, arrêté après avoir accordé une entrevue critique des autorités [...] est emprisonné depuis juin 2004. [...] Un député, Jacques Mathlier, a été arrêté pour incendie criminel mais disculpé par un magistrat le 12 juillet. Plutôt que de le libérer, le ministère de la Justice a alors ordonné son transfert au Pénitencier national où il est détenu depuis.»

«La délégation a également visité un poste de police local à Port-au-Prince où 36 hommes sont détenus dans une salle de 12 pieds par 12 pieds. Aucun d’entre eux n’est formellement accusé de quoi que ce soit, aucun n’est comparu devant un juge, un d’entre eux y est incarcéré depuis le 4 septembre. Ces personnes n’ont droit à aucun soins médicaux ni à aucune nourriture. S’ils ont accès à des vivres, ce sont leurs familles qui les apportent, et ces denrées sont ensuite partagées avec ceux qui n’ont pas de familles. Parmi les détenus on trouve des personnes souffrant de troubles mentaux et d’épilepsie. Des enfants sont incarcérés avec les adultes, dont garçon de 13 ans et deux jeunes de 15 ans.»

«Les dirigeants d’un gouvernement démocratiquement élu et ses partisans sont emprisonnés ou ont été transformés en réfugiés dans leur propre pays, alors que les militaires et des bandes armées associées au pouvoir agissent à leur guise. Il est clair que l’on assiste à un retour en force des militaires qui, historiquement, se sont opposés à une société civile indépendante et ont constitué une force d’oppression des classes démunies.»

«La constitution haïtienne et le droit international sont violés ouvertement. Il importe de restaurer un État de droit.»
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