27.9.06

À propos des National Intelligence Estimates

Dans son édition de dimanche dernier, Mark Mazzetti du New York Times dévoilait le contenu d’un rapport confidentiel d’évaluation des tendances mondiales en matière de terrorisme et de leurs incidences pour les États-Unis.  Achevée en avril dernier, cette évaluation était la première réalisée depuis le début de la guerre en Irak et représentait l’opinion partagée par 16 agences gouvernementales de renseignement (CIA, DIA, NSA, etc.).  Principale conclusion : à cause de l’invasion étasunienne de l’Irak, le radicalisme islamique ne bat pas en retraite, il se métastase et s’étend à l’échelle du globe (voir Spy Agencies Say Iraq War Worsens Terrorism Threat, New York Times, 24 septembre 2006).

Ces évaluations, les National Intelligence Estimates, font autorité en matière de renseignement, sont personnellement approuvées par le directeur national du renseignement John D.  Negroponte, et sont basées sur des informations collectées par l’ensemble des agences.  Mazzetti écrit que les analystes planchaient sur ce rapport depuis 2004, et que s’il n’a été achevé qu’en avril de cette année, c’est que les ébauches préliminaires ne plaisaient pas à certains responsables gouvernementaux qui lui reprochaient sa structure et son orientation. 

En passant, si vous ne connaissez pas John D.  Negroponte, je vous suggère la lecture de mon article C’est un diplomate... du 18 février 2005.

L’article du New York Times a fait grand bruit en cette période électorale de mi-mandat où la présence étasunienne en Irak et la guerre au terrorisme sont des thèmes importants.  Mardi, 26 septembre, George W.  Bush décide de mettre un terme aux conjectures qui fusent de toutes part et ordonne la diffusion d’un extrait du rapport (4 pages, format PDF).  Son équipe de pompiers va plus loin : sur le site Web de la Maison blanche, on publie une série d’extraits du rapport auxquels on jumelle des déclarations officielles du président, comme quoi l’évaluation des agences de renseignement ne contredit pas la position officielle de l’administration Bush (voir The NIE Reflects Previous Statements About the War on Terror , Maison blanche, 26 septembre 2006).

Mais attention, l’extrait de quatre pages rendu public n’est pas le document auquel a eu accès Mark Mazzetti du New York Times, car des citations directes contenues dans son article ne se trouvent pas dans le document.  On aurait donc donné en pâture aux médias un extrait de quatre pages (le document au complet en compte 30) qui ne serait pas nuisible au président.  En fait, le rapprochement direct entre l’invasion de l’Irak et la montée du radicalisme islamiste n’y figure même pas.
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