8.8.06

Pourquoi Israël piétine?

Un commentaire d’un billet précédent a attiré mon attention sur certains articles, notamment Israël, tête baissée? sur dedefensa.org qui citait lui-même A new face to Hezbollah's resistance de Syed Saleem Shahzad publié dans le Asia Times.  Ces deux articles sont à mettre en contre point avec un troisième, Concern mounts that this is a war Israel is not going to win initialement publié dans le Sydney Morning Herald par Jonathan Pearlman et qui fait état de l’inquiétude ressentie en Israël face à l’échec de Tsahal à enrayer les attaques du Hezbollah.

L’analyse de Pearlman conclut qu’Israël piétine dans sa campagne pour éradiquer les militants du Hezbollah dans le Sud-Liban.  En 1982, il n’avait fallu à Tsahal que 48 heures pour s’emparer d’une portion considérable de cette zone.  Or, écrivait Pearlman le 2 août, les missiles du Hezbollah continuent de tomber en territoire israélien (situation qui perdure jusqu’à aujourd’hui).  «La lenteur de la campagne et l’impossibilité d’empêcher le Hezbollah de lancer ses missiles Katyusha ont forcé Israël à modifier le cours traditionnel de ses conflits en vertu duquel le combat précède la diplomatie» écrit-il.

L’aviation de Tsahal pilonne le Sud-Liban, avec les dommages que l'on connaît, mais les forces terrestres ne procèdent qu’à des incursions limitées, la plupart du temps menées par des commandos des forces spéciales.  Comme me le souligne un lecteur du billet précédent, le souhait d’Israël d’étendre la zone tampon jusqu’à la rivière Litani (70 kilomètres au nord de la frontière actuelle) pourrait s’avérer difficile à réaliser car il impliquerait de déploiement d’un fort contingent d’infanterie en territoire Hezbollah.

Comment expliquer cet échec de la force militaire la plus puissante de la région, disposant de l’armement le plus sophistiqué, et du soutien matériel et technique des États-Unis?

Selon Syed Saleem Shahzad, Israël s’est lancé dans une opération militaire très risquée malgré des avertissements de ses services de renseignement, notamment le Mossad.  Ce dernier a ouvertement admis au gouvernement, avant le déclenchement des hostilités, avoir échoué dans ses tentatives d’infiltrer le Hezbollah.  Le Mossad s’opposait donc à l’opération militaire et suggérait d’attendre que, par services de renseignement interposés, on soit en mesure d’évaluer la puissance militaire du Hezbollah, ses effectifs, sa logistique et ses positions.

Toujours d’après le Mossad, le Hezbollah était devenu avec l’aide de l’Iran beaucoup plus puissant qu’un groupe comme le Hamas palestinien qui ne dispose surtout que d’armes légères et de petits missiles Qassam bricolés maison, et qui a souvent recours à des attaques suicides.  Avant de se lancer dans une opération d’envergure, soutenait le Mossad, il était essentiel de connaître la puissance militaire du Hezbollah, sinon on courait à la catastrophe.

Le Mossad était au courant d’un vaste réseau de tunnels et de bunkers que le Hezbollah pouvait utiliser pour stocker des armes en préparation d’une longue guérilla, mais ne pouvait déterminer avec précision ses ramifications.

Il y aurait donc crise interne en Israël comme l’explique dedefensa.org.  «Les conditions se précisent de plus en plus pour renforcer le constat que nous nous trouvons devant une crise majeure qui ne concerne qu’au premier abord le Hezbollah, mais qui concerne en réalité les structures mêmes de la direction israélienne.  Il s’agit d’une crise majeure justement à cause de ce facteur interne, comme la guerre en Irak est une crise majeure à Washington à cause des fractures et des oppositions qu’elle fait naître dans l’establishment washingtonien.»
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