17.8.06

Les info-guerres

Si sur le plan politique, l’heure est au bilan en Israël, il en va de même dans les médias.  Certains ont été critiqués, quelles que soient leurs tendances, pour un apparent parti-pris.  D’autres se sont bien acquittés de leur tâche d’informer malgré les difficultés énormes que présentait la situation.  Le phénomène du «rolodex doré» (qui consiste à toujours entendre les mêmes «spécialistes» et «observateurs» commenter une situation) s’est malheureusement encore une fois manifesté.  Dommage, mais bon...

Lorne Manly abordait la question du rôle des médias il y a quelques jours dans le New York Times (voir In Wars, Quest for Media Balance Is Also a Battlefield).  Il se penche sur le dilemme de plusieurs organes de presse aux États-Unis qui tentent de déterminer comment et dans quelle proportion utiliser des images de civils tués ou blessés quand le nombre de victimes dans un camp dépasse de beaucoup celui dans l’autre camp.  Dans le camp israélien on parle de 150 morts, principalement des militaires, et du côté libanais de plus de mille morts, en majorité des civils.

Les chefs de rédaction des journaux, périodiques et médias électroniques n’ont pas imposé de formule d’équité dans la couverture de ce conflit, selon eux une telle formule n’existe pas.  Il cite le producteur exécutif du grand journal télévisé de la chaîne étasunienne ABC, Jon Banner, qui a trouvé éprouvants les choix à faire en raison de la complexité de la situation et des enjeux, et de l’impact des images disponibles.  La chaîne a donc opté pour la diffusion quotidienne d’un reportage du point de vue israélien, et un du point de vue libanais.

Cette dernière affirmation a fait bondir les responsables de l’organisme Fairness & Accuracy In Reporting, FAIR (voir Media Views).  S’il y a eu dix fois plus de victimes civiles libanaises qu’israéliennes, et que la couverture a été «équilibrée» selon les responsables des médias, «il existe donc une formule, soit qu’une vie israélienne vaille dix vies libanaises» lit-on dans FAIR.

Pour sa part, Crawford Kilian se penche dans The Tyee sur la couverture accordée par les grands médias et les blogues dits «influents» aux blogues plus modestes écrits pas des gens sur le terrain (voir Blogging a Nameless War).  Selon lui, «Les médias traditionnels et les blogues étasuniens à fort achalandage n’ont presque pas accordé d’attention aux blogueurs sur place, aux gens qui pouvaient nous faire un compte rendu de visu de la situation.»

Il souligne à juste titre une comparaison avec le conflit irakien.  «En 2003, les blogues Salam Pax et Riverbend se sont avérés de manière distincte le reflet de l’opinion publique irakienne.  Toutefois, dans le présent conflit, tant d’un côté que de l’autre, aucun blogueur n’a réussi à percer.  C’est très dommage.  Lorsque les dirigeants des deux côtés ont recours aux mensonges et aux clichés, la voix des “gens ordinaires”, faute d’exactitude factuelle, a au moins le mérite d’offrir la sincérité.»

Et vous, lecteurs et lectrices, estimez-vous avoir été bien informés des événements et des enjeux qui sous-tendent ce conflit?
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