14.8.06

Liban : un prélude à l’Iran?

Le journaliste Seymour Hersh publie ce matin un article fort documenté sur l’aval qu’a donné l’administration Bush au gouvernement israélien pour s’en prendre aux positions du Hezbollah au Sud-Liban (voir Washington’s interests in Israel’s war dans The New Yorker, 14 août 2006).

Il écrit : «D’après certains anciens diplomates et responsables de services de renseignement, et d’autres qui sont toujours en poste, le président Bush et le vice-président Dick Cheney étaient persuadés que si les bombardements de l’aviation israélienne contre les installations souterraines du Hezbollah au Liban parvenaient à renforcer la sécurité d’Israël, ils serviraient aussi de prélude à une frappe préventive étasunienne contre les installations nucléaires iraniennes, dont plusieurs sont aussi situées sous terre.»

En fait, selon les sources de Hersh, tôt le printemps dernier des officiers de haut niveau de l’aviation étasunienne ont commencé à travailler de concert avec leurs homologues israéliens.  Pour les étasuniens, il s’agissait de se préparer à une intervention en Iran selon le souhait de l’administration Bush.

On connaît maintenant les résultats : malgré des bombardements quotidiens, l’aviation israélienne n’est pas parvenue à stopper les lancements de roquettes du Hezbollah depuis le Sud-Liban, ce qui augure mal pour une éventuelle frappe en Iran.

Hersh cite Richard Armitage, secrétaire d’État adjoint durant le premier mandat de Bush fils, cet échec de l’aviation israélienne au Liban devrait servir d’avertissement à Washington.  «Si la plus importante force militaire de la région, les forces armées israéliennes, ne réussissent pas à pacifier un pays comme le Liban qui compte quatre millions d’habitants, il faudrait y penser à deux fois avant d’appliquer le modèle à l’Iran, fortement équipée sur le plan stratégique et qui compte 70 millions d’habitants.»

Le professeur Juan Cole abonde dans le sens de Hersh et de ses sources, mais ajoute un élément complémentaire dans son compte rendu de ce matin : «Toute attaque étasunienne contre l’Iran pourrait bien mener à la privation de pétrole des troupes étasuniennes et britanniques en Iraq et à leur massacre par des hordes chiites.  Des militants chiites pourraient facilement s’adonner au sabotage des pipelines et des convois d’approvisionnement en carburant, comme le font les sunnites dans le nord.  Privées de carburant, les troupes étasuniennes seraient des proies faciles pour des attaques au mortier que les forces de l’air ne seraient pas en mesure de contrer (comme l’illustre l’expérience d’Israël avec le Hezbollah au Liban).  Une attaque contre l’Iran pourrait bien résulter en une alliance ente sunnites et chiites, marquant ainsi la fin de la présence étasunienne en Irak.»
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