12.8.05

Des blogues à gauche et à droite

ShiftUne étude du New Politics Institute, cellule de réflexion sur les politiques progressistes, conclut que des 250 blogues les plus populaires consacrés à la politique aux États-Unis, 149 peuvent être associés à la droite et 101 à la gauche. Toutefois, si on ramène l’échantillon de blogues à un Top 40, la gauche l’emporte en y classant 24 blogues contre 16 pour la droite.

L’étude, Emergence of the Progressive Blogosphere: A New Force in American Politics est aussi disponible en version PDF, et je suggère cette version car elle comporte la liste complète des 250 blogues composant l’échantillon de l’étude.

Précisons que le New Politics Institute est étroitement associé au parti démocrate et au NDN, un organisme qui milite pour l’émergence de nouvelles bases progressistes et de nouveaux leaders. Le NDN maintient également un blogue depuis septembre 2003.

L’étude se penche notamment sur les différences sur le plan des stratégies et des cultures qui diffèrent dans la blogosphère de droite et de gauche. Les blogues politiques de droite, selon les auteurs de l’étude, procèdent de la même manière que les partis, soit s’en prendre aux médias et attaquer les progressistes. Ils ne tendent pas à créer des collectivités en ligne indépendantes, mais se servent du médium pour renforcer leur message de manière directrice (top-down). Ils s’alimente souvent auprès des institutions officielles et font partie de la machine média de la droite politique.

À l’opposé, les blogues politiques de gauche favorisent la création de collectivités virtuelles, créent de nouvelles activités politiques en ligne, offrent davantage de forums et d’espaces ce qui attire de nouveaux militants qui auparavant hésitaient à s’investir dans le discours politique.

Les auteurs écrivent : «La différence la plus marquante entre les deux blogosphères est la suivante : la blogosphère progressiste amène de nouveaux acteurs sur la scène politique; la blogosphère de droite contribue à consolider ce qui était déjà un espace de cohésion de pensée.»

Les premières études sérieuses à se pencher sur l’aspect politique des blogues (2003) révélaient deux tendances lourdes dans la blogosphère politique. D’une part, la consultation se faisait principalement sur certains blogues très lus. Sur un échantillon de 100 blogues, les six premiers s’accaparaient 50 % des consultations, et les autres 94 blogues se partageaient l’autre 50 %. D’autre part, les blogueurs de la droite surclassaient en terme de popularité les blogueurs progressistes.

Depuis deux ans, note-t-on, la dynamique de la blogosphère politique est inversée. Les auteurs citent une recherche menée en juillet 2005 par Chris Bowers et publiée sur le site MyDD (Conservative Blog Sprawl Is A Serious Threat To Progressive Blogosphere Dominance) selon laquelle les 98 blogues progressistes les plus consultés représentaient 15 181 649 millions de pages vues par semaine. En contrepartie, le Top 150 des blogues politiques de droite enregistrent moins de dix millions de pages vues par semaine, juste un peu plus d’un million de visiteurs uniques par jour.

Une élément reste cependant stable : la consultation des blogues politiques se concentre sur un petit nombre de sites. Les blogues du Top 10 progressistes attirent 69 % de la consultation de leur catégorie, et ceux de droite 54,6 %. Plus généralement, on estime qu’il pourrait y avoir quelques centaines de milliers de blogues sur la politique aux États-Unis, mais moins de un dixième de un pour cent de ce nombre accapare 99 % des consultations.

En annexe de l’étude on trouve tableau comparatifs des points forts respectifs des deux blogosphères politiques. Les blogues conservateurs sont plus susceptibles de comporter un volet local. Leur arrimage au message officiel fait en sorte que les médias traditionnels de craignent pas de les citer, d’interviewer leurs auteurs, ce qui joue évidemment de manière convergente sur leur consultation.

Pour leur part, les blogues progressistes investissent davantage dans des logiciels d’édition ou des solutions d’hébergement indépendantes, dans des sondages en ligne, dans des fonctions de clavardage, bref dans l’offre d’un produit supérieur sur le plan technique. Ils suscitent davantage la création de collectifs, ne craignent pas de s’afficher pro-démocrates (contrairement aux conservateurs qui sont discrets sur leurs allégeances républicaines).

L’autre annexe s’adresse aux candidats à des postes électifs locaux ou au niveau de l’État, et les politiciens québécois auraient intérêt à lire l’étude si ce n’est que pour cette annexe précieuse. Il ne s’agit pas tant pour un politicien, selon les auteurs, de créer son propre blogue, ou d’en confier l’animation à son personnel de campagne. Il est beaucoup plus rentable de chercher à se créer sa propre blogosphère à partir de blogues connus, et de consacrer du temps à ceux et celles qui animent ces blogues.

On suggère aux candidats d’embaucher un coordonnateur de la communication avec les blogueurs et de ne pas le reléguer à des taches de transmetteur de communiqués. Il doit faire partie intégrante des proches conseillers d’un candidat.

Si un candidat a un site Web, il devrait inviter les blogueurs à lui communiquer leurs adresses de courriel et de blogue, et constituer ainsi une liste précieuse de contacts à l’aide desquels il tissera sa propre blogosphère. Il pourra leur faire parvenir des communiquer de presse, les inviter à couvrir des événements de la campagne, leur accorder tous les privilèges habituellement réservés à la presse.

Évidemment, le candidat doit lire les blogueurs qu’il aura ainsi fédérés (on suggère un bon lecteur de fil RSS), il devrait inclure dans sa revue de presse interne et externe (ou sur son site) des extraits des billets publiés sur les blogues, et au besoin commenter en ligne les billets lorsqu’il y a pertinence.
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