16.5.07

«La Nouvelle-Orléans de nouveau...»

Personne ne souhaite revivre, même par procuration médiatique, la tragédie d’août 2005 lorsque l’ouragan Katrina a semé destruction et désarroi sur le sud des États-Unis. Toutefois, certaines informations sont de mauvais augure pour la population de la côte est des États-Unis et de la Nouvelle-Orléans.

D’abord, les prévisions de la faculté des sciences atmosphériques de l’université d’État du Colorado pour la saison 2007 rendues publiques le mois dernier (voir Extended range forecast of Atlantic seasonal hurricane activity and U.S. landfall strike probability for 2007).

Citation du rapport des chercheurs : «Les informations obtenues jusqu’en mars 2007 indiquent que la saison des ouragans cette année en Atlantique sera beaucoup plus active que la moyenne saisonnière pour les années 1950 à 2000. Nous estimons qu’il y aura en 2007 neuf ouragans (la moyenne est de 5,9), 17 tempêtes nommément désignées (moyenne de 9,6), 85 jours de tempêtes nommément désignées (moyenne de 49,1), 40 jours d’ouragans (moyenne de 24,5), cinq ouragans de forte intensité (de catégorie 3, 4 ou 5, moyenne annuelle de 2,3 ouragans de forte intensité), et 11 jours d’ouragans de forte intensité (moyenne de 5). La probabilité qu’un ouragan majeur touche la côte des États-Unis est de 140 % comparativement à la moyenne polyennale. Nous nous attendons à ce que l’activité cyclonique tropicale dans le bassin Atlantique en 2007 s’établisse à environ 185 % de la moyenne polyennale.»

Ça risque donc de brasser, mais qu’en est-il de l’état de préparation des infrastructures et des services d’urgence?

La semaine dernière, une tornade a frappé au Kansas éliminant presque de la carte des collectivités entières. Or, selon le général de l’armée de l’air à la retraite Melvyn Montano, la garde nationale de l’État du Kansas n’a pu intervenir adéquatement pour prêter secours aux populations touchées car la moitié de son matériel d’intervention et une bonne partie de son effectif sont actuellement déployées en Irak (voir Ret. Gen: Iraq Straining National Guard, Associated Press, 12 mai 2007).

Pour ce qui est de la Nouvelle-Orléans, là où les travaux de reconstruction ne sont toujours pas achevés, la situation est plus qu’inquiétante si la région devait à nouveau se trouver sur le passage d’un ouragan de forte intensité.

Je lisais il y a quelques jour dans le blogue du National Geographic que le corps de génie de l’armée étasunienne avait, il y a près d’un an, déclaré que le réseau de digues et de murs d’endiguement destiné à protéger la Nouvelle-Orléans des inondations avait été remis dans l’état où il se trouvait avant le passage de Katrina. Toutefois, le National Geographic qui prépare un documentaire sur la Nouvelle-Orléans post-Katrina a soumis certains des ouvrages à l’expertise du professeur en génie Bob Bea du campus de Berkeley de l’université de Californie. Rien de rassurant dans les constations du spécialiste (voir New Orleans' Rebuilt Levees "Riddled With Flaws", National Geographic News, 6 mai 2007).

En fait, selon Bea, le réseau est criblé de failles et ne pourrait probablement pas résister à une tempête de moindre intensité que celle de Katrina en 2005 (ouragan de catégorie 4 au moment de toucher terre). L’évaluation de Bea est confirmée au National Geographic par un ingénieur néerlandais qui souhaite conserver l’anonymat, et par Ivor van Heerden, directeur adjoint du centre d’étude des ouragans de l’Université d’État de Louisiane, et chef d’une équipe d’experts qui a inspecté les failles des digues.

Le corps de génie de l’armée (Army Corps of Engineers), depuis 1902, est responsable de la construction et de l’entretien des digues sur le fleuve Mississippi, et donc de la réfection du réseau dans l’après-Katrina. Le chef du groupe de travail affecté à la réfection, John Meador, estime que les travaux ne sont pas achevés et que le corps de génie fait tout en son possible pour amener le réseau de digues à un état de fiabilité plus grand que ce qu’il était au moment du passage de Katrina.

Par ailleurs, hier, le sénateurs étasuniens ont défait un amendement à un projet de loi qui visait à exiger que le corps de génie tienne compte, dans ses projets d’aménagement des ressources hydriques, des effets des changements climatiques (voir Senate defeats provision to require U.S. Army Corps of Engineers to consider climate change, Associated Press, 15 mai 2007).

L’amendement accompagnait un projet de loi autorisant des crédits de 13,9 milliards de dollars pour des projets relatifs aux dommages causés par les inondations, à des infrastructures de navigation et aux écosystèmes le long du Mississippi, dans la région de la Louisiane frappée par Katrina et dans d’autres régions du pays.

L’opposition à l’amendement était menée par le sénateur républicain James Inhofe, sceptique de la théorie des changements climatiques qu’il estime véhiculée par des «alarmistes environnementaux qui veulent effrayer les gens». Pour sa part, la sénatrice démocrate Barbara Boxer a dit avoir reçu des assurances que le corps de génie tenait compte depuis longtemps des effets possibles des changements climatiques sur des phénomènes comme celui de l’élévation du niveau des mers.
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