27.4.04

Autour des photos que le Pentagone voulait cacher

D’une part, le site du Memory Hole continue d’être très lent à répondre en raison des cinq à six millions de requêtes par jour avec lesquelles il doit composer.

Russ Kick a publié la lettre du quartier général des opérations de transport de l’armée de l’air qui accompagnait le cédérom contenant les photographies.

En outre, il a clarifié les allégations selon lesquelles le lot de photographies reçu contenait des images de la NASA montrant des cerceuils des victimes de la tragédie de la navette Columbia.

Il présente donc séparément les 288 photos de cerceuils en provenance d’Irak, et les 73 photos de cerceuils d’astronautes.

Par ailleurs, d’après une dépêche de Reuters en date du 26 avril, le porte-parole de la base militaire de Ramstein (Allemagne) par laquelle transitent les cerceuils de soldats morts au combat en Irak a réitéré l’interdiction faite à la presse de photographier ou filmer les cerceuils.
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25.4.04

Google en bourse?

En fait le point d’interrogation sera de trop d’ici peu de temps si les rumeurs persistantes se confirment. Incroyable comment le temps passe. Dans ma chronique du 12 janvier 1999, je parlais pour une première du nouveau moteur de recherche au drôle de nom sans me douter de l’origine du mot googol duquel il était inspiré, soit 1 suivi de cent zéros ou 10 à la puissance 100.

En bourse, donc, mais pourquoi maintenant? C’est qu’en vertu d’une loi datant de 1934, une société privée ayant son siège social aux États-Unis est tenue de divulguer publiquement ses données financières dès que le nombre d’actionnaires dépasse les 500. Or, ayant offert à ses employés de généreux programmes d’options d’achat d’actions, en plus des intrants de quelques importants financiers, Google arrive à ce nombre. Il y a aussi, selon certains analystes, une question de moral du personnel. L’inscription en bourse signifierait pour bon nombre d’employés actuels et détenteurs d’options qu’ils se retrouveraient avec quelques millions en poche.

Google est représentée depuis 1999 par deux sociétés de capital de risque de Silicon Valley, soit Kleiner, Perkins, Caufield & Buyers et Sequoia Capital. C’est d’ailleurs cette dernière qui avait géré le placement initial en bourse de Yahoo! en 1996.

En chiffres. Google enregistre des revenus d’un milliard de dollars par année, et des profits de plus de 300 millions. L’infrastructure repose sur 100 000 ordinateurs répartis aux quatre coins du globe; l’entreprise compte 1 000 employés. Les analystes prévoient que dès le placement initial effectué, l’entreprise vaudra au livres entre 20 et 25 milliards de dollars, soit plus que le fournisseur de matériel militaire Lockheed Martin, le service de messageries Federal Express ou le fabricant de vêtements Nike.
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24.4.04

Les photos que le Pentagone voulait cacher

CerceuilsMars 2003, quelques jours avant l’invasion de l’Irak, une première directive du ministère de la Défense des États-Unis précise qu’il n’y aura aucune cérémonie publique, ni couverture médiatique, pour le retour au pays des militaires tués au cours des opérations. Octobre 2003, une seconde directive interdit dorénavant la prise ou la diffusion d’images de cerceuils ou autres contenants utilisés pour transporter les restes de soldats étasuniens morts à l’étranger. Le Pentagone, on le comprend, voulait ainsi éviter l’effet négatif que ces images pouvaient avoir dans l’opinion publique à l’égard de l’occupation en Irak. C’est alors que Russ Kick, éditeur du site The Memory Hole (Le trou de mémoire), décide d’intervenir. Kick se décrit comme un anthropologue du Web. Il publie sur son site des informations qui ont été retirées d’autres sites Web, plus souvent qu’autrement pour des motifs de censure, ainsi que des documents qu’il obtient en vertu de la Loi sur l’accès à l’information (Freedom of Information Act).

Russ Kick dépose donc, en octobre 2003, une demande en vertu de cette loi auprès du Pentagone pour obtenir «Toutes les photos montrant des cerceuils (ou autres dispositifs) contenant les restes de militaires étasuniens à la base aérienne de Dover. Ceci inclut, sans s’y restreindre, les cerceuils qui arrivent, qui partent, et tout rite funéraire qui soit pratiqué. Dans le temps, cette demande vise la période s’échelonnant du 1er février jusqu’a présent.» Il dit avoir précisé la base de Dover car elle est le point d’arrivée de tous les corps rapatriés du front.

Kick n’est pas été étonné d’essuyer un refus, mais interjette appel. Le 29 mars, il trouve sur le site Web de la base de Dover une page (avec illustration) sur les procédures funéraires en vigueur, elle disparaît du site peu de temps après, mais est reprise par Kirk sur son site. Le 14 avril, le quartier général des opérations de transport de l’armée de l’air lui fait parvenir, sur cédérom, 361 photos correspondant à la description contenue dans sa demande initiale. La seule modification apportée par le Pentagone aux photos a été le masquage des insignes nominatifs.

Le 21 avril, le Seattle Times publie une photo, mais celle-ci lui arrive d’une personne, Amy Katz, dont l’amie, Tami Silicio, travaille pour une entreprise de Seattle, Maytag Aircraft, sous-traitante du Pentagone. Elle illustre des cerceuils recouverts du drapeau des États-Unis à l’intérieur d’un avion en partance du Koweit. La photo, publiée en page frontispice du Times, accompagne un article un article sur la triste tâche d’honorer les militaires tombés au combat et dans lequel Silicio est interviewée. Le lendemain Silicio, et son conjoint David Landry lui aussi à l’emploi de Maytag Aircraft, sont congédiés pour avoir violé les consignes sur l’interdiction de photographier les cerceuils militaires.
Le 22 avril Russ Kick, qui avait publié deux photos présumément prises par Silicio et une troisième d’origine inconnue rend disponible sur son site l’ensemble des photos qu’il a reçues du Pentagone. La nouvelle de cette diffusion fait le tour du globe à la vitesse d’Internet, et rapidement le serveur de Memory Hole ne peut accommoder toutes les requêtes. C’est alors que les sites Warblogging.com et Antiwar.com s’entendent avec Russ Kick pour se partager la bande passante d’un site miroir pour les photos.

Le chroniqueur Matt Drudge reprend cinq photos de Memory Hole sur son site, déclarant qu’à l’ère d’Internet, l’information et les images circulent sans égard aux décrets gouvernementaux. Il néglige toutefois d’accorder quelque crédit que ce soit à Russ Kick.

Le 23 avril, la station de radio de Seattle KTTH découvre que Katz et Silicio ont intenté en septembre 2000 une poursuite pour harcèlement sexuel contre la société Halliburton, alors dirigée par l’actuel vice-président Dick Cheney. Katz et Silicio étaient alors au Kosovo, à l’emploi de la filiale Brown & Root de Halliburton. Les deux femmes nient avoir orchestré la publication des photos de Silicio à des fins politiques, et n’avoir agi que par souci du besoin de savoir du public.

Interrogé sur la réaction du président à la publication des photos, le porte-parole de la Maison blanche Trent Duffy a déclaré qu’il estimait que c’était un rappel important des sacrifices consentis pour protéger le pays et libérer d’autres peuples. Si la diffusion de telles photos joue un rôle positif, ne devrait-on pas en lever l’interdiction? De répondre Duffy : «Ce n’est pas ce que j’ai dit [...] Dans toute cette affaire, nous devons être soucieux du respect de la vie privée et de la sensibilité des familles des disparus. C’est le fondement de notre politique, et notre plus sincère préoccupation.»

Pour sa part, le sous-secrétaire adjoint du ministère de la Défense, John Molino, a déclaré «Nous ne voulons pas que les dépouilles de nos militaires qui ont fait l’ultime sacrifice fasse l’objet d’une attention qui ne soit pas justifiée ou qui manque de dignité.»

F. GregoryParmi les groupes de familles de militaires, les avis sont partagés sur la diffusion des photos. L’organisme Military Families Speak Out se dit consterné par l’interdiction de prendre des photos, et par le congédiement de Tami Silicio et David Landry. «Nous croyons qu’aucune politique ou directive devrait s’interposer entre les citoyens et l’information relative à ce que nous coûte cette guerre» lit-on sur le site de MFSO. À l’agence aérospatiale des États-Unis (NASA), on met en garde les éditeurs de journaux qui seraient tentés de reprendre les photos dans leurs pages, et on les invite à en vérifier l’authenticité, car 73 d’entre elles seraient relatives à la tragédie ayant causé la mort d’astronautes de la navette Columbia le 1er février 2003. On cite notamment la photo de l’administrateur adjoint de la NASA, Frederick Gregory, en habits civils, rendant hommage à une des victimes de cette tragédie.
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18.4.04

Shoot down the pop-up

Depuis que la publicité a investi le Web (et non investi dans le Web), elle a été source de polémique. Les puristes y voyaient l’invasion d’un espace réservé à la communication et à l’échange, les réalistes comme un mal nécessaire au financement de contenus originaux, et les publicistes comme un nouveau véhicule qui amènerait à chaque cycle évolutif de nouvelles possibilités techniques.

Peu de sujets font l’unanimité en matière d’Internet et de Web, sauf peut-être l’omniprésence des publicités «pop-up» et «pop-under», la multiplication à l’infini de l’ouverture de fenêtres qui s’interposent entre le lecteur et le contenu, ou polluent l’arrière-plan de l’espace de travail. D’une part, l’ouverture inopinée d’une fenêtre pub distrait le lecteur de sites à contenu. On peut d’ailleurs dire la même chose des publicités clinquantes qui s’affichent parallèlement à un paragraphe qu’on tente de lire.

Un des spécialistes de cette technologie intrusive est à coup sûr Matt Drudge, qui publie le désormais célèbre Drudge Report. Non seulement nous sert-il deux nouvelles fenêtres de pub sur son site, mais le code HTML de sa page prévoit son «rafraîchissement» aux quatre minutes, ce qui occasionne chaque fois l’ouverture de deux nouvelles fenêtres.

Les publicitaires du Web estiment qu’en général, le «taux de clic» sur un bandeau publicitaire statique d’une page Web est d’environ 1 %. Pour sa part, le «pop-up» attire 12 % de plus de clics qu’un bandeau statique. Ça ne fait quand même que 1,12 % comme taux d’interaction.

Va pour les chiffres, mais examinons l’effet négatif sur l’expérience Web des utilisateurs. Et prenons un exemple tiré du «monde réel».

Samedi matin, grasse matinée, vous sortez au resto du coin pour prendre un café et lire un journal. Vous consultez la première page, et voilà qu’un démarcheur passe et dépose sans vous demander, sur «votre» journal, un dépliant publicitaire. Vous écartez le dépliant, ouvrez en page 2, et voilà qu’un autre démarcheur vient à son tour déposer son dépliant sur votre journal. Il est suivi de peu par un autre qui, lui, glisse un dépliant sous votre journal. Agaçant. Et le manège se poursuit chaque fois que vous consultez une autre page. Dans ce monde réel, on serait frappé par un tel manque de civilité; sur le Web, c’est monnaie courante. Énervant. Irritant.

On peut certes interdire l’ouverture de nouvelles fenêtres, ou désactiver la fonction javascript du fureteur avec le même résultat, mais alors on se prive de fonctionnalités transactionnelles ou de consultation. Une comparaison avec le pourriel est même permise. Une technologie (le courriel) qui vise à une meilleure et plus efficace communication est accaparée à ce point par le démarchage publicitaire non sollicité (pourriel) qu’il en vient à occuper une plus grande place que les communications de bon aloi.

Le mois dernier, le journal étudiant de l’Université Wayne (Michigan) publiait un article sur la camnpagne publicitaire du Parti républicain sur le Web qui a recours aux «pop-up». Le professeur de communication à UCLA Tim Groeling exprimait son étonnement de la décision des stratèges républicains. «Ce n’est pas que les “pop-up” soient illégaux, mais si vous les utilisez les gens n’éprouveront pas d’empathie pour vous» disait-il.

Si un des buts de la publicité est de créer une image sympathique d’un produit, service, entreprise ou candidat, pourquoi les annonceurs persistent-ils à utiliser les «pop-up»? Pour une marge de 12 % sur un hypothétique 1 %? Tant de contrariétés pour si peu?

Il ne faut donc pas s’étonner que les nouvelles versions de fureteurs comme Firefox offrent à l’utilisateur la possibilité d’interdire l’ouverture non souhaitée de nouvelles fenêtres, que Microsoft dotera ses prochaines versions de fonctions semblables, que la barre d’outils de Google les bloque et qu’il existe des logiciels auxiliaires comme Popup Killer aux mêmes fins.

Avec tant de fenêtres ouvertes, on comprend que les utilisateurs commencent à avoir froid.
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17.4.04

Haïti : De quoi parle-t-on exactement?

«Le ministre de la Défense (de France, Michèle Alliot-Marie) a félicité les troupes françaises de l’opération Carbet: “Votre mission est accomplie”, a-t-elle déclaré, évoquant l’actuel retour au calme.»
Source : Le Figaro, 17 avril 2004

«Il y a eu un coup d’arrêt à l’escalade de la violence et une baisse sensible de l’insécurité à Port-au-Prince, à Cap-Haïtien, Fort-Liberté, Saint-Marc...»
Henry Clément-Bollée
Commandant des forces armées françaises aux Antilles et représentant de la France au sein de la force intérimaire
Source : Le Figaro, 17 avril 2004

Haiti, 1984 «Une délégation de trois membres de l’organisation américaine de droits humains, National Lawyers Guild (NLG), dénonce la détérioration de la situation des droits de l’homme en Haïti. [...] La délégation du NLG déclare avoir appris du directeur de la morgue de Port-au-Prince que 800 cadavres ont été jetés dans des fosses communes à Titanyen le 7 mars et encore 200 cadavres le 28 mars, alors qu’en période normale, la morgue compte en moyenne 100 cadavres par mois. D’autres employés de la morgue ont confirmé que des cadavres continuent d’y arriver, leurs mains attachées derrière le dos, des sacs en plastique noir sur la tête, les victimes ayant été assassinées par balles. [...] Le rapport relève également l’existence d’une liste publiée chaque mois, avec les noms de partisans de Fanmi Lavalas qui ont été dénoncés à travers des appels téléphoniques au bureau de l’organisation de droits humains, CARLI (Comité des Avocats pour le Respect des Libertés Individuelles), comme ayant commis des violations de droits humains. La liste du mois de mars contient environ 85 noms. Et le CARLI demande l’arrestation de toutes ces personnes, indique la délégation qui se demande si tous ces cas ont été l’objet d'une enquête indépendante avant leur publication.»
Source : Agence Haïtienne de presse, 15 avril 2004

«Une délégation de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF), a mis fin ce vendredi à une visite de trois jours en Haïti. [...] Cette mission de l’OIF qui était conduite par Antonio Mascarenhas Monteiro, un ancien président de Cap-Vert, a inscrit cette visite dans le cadre de son appui aux autorités intérimaires haïtiennes. Le chef de la délégation a estimé que les conditions sont réunies pour la réalisation d’élections dans le pays...»
Source : Agence Haïtienne de presse, 16 avril 2004
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15.4.04

Comment la crainte de sous-protection engendrera la catastrophe de la surprotection: examen constitutionnel du DMCA

Rémy Khouzam : Comment la crainte de sous-protection engendrera la catastrophe de la surprotection: examen constitutionnel du Digital Millenium Copyright Act (DMCA)

Conclusion

66. Bien qu’adopté par le Congrès américain dans l’objectif louable de lutter contre le piratage, le DMCA en réalité n’a fait qu’étendre le pouvoir des titulaires de droits au détriment des utilisateurs et il a bouleversé le fragile équilibre qui existait entre les titulaires de droits et le public. C’est bien l’avis de D.L. Burk qui affirme que :

[t]he employment of the anti-circumvention statute to date should come as something of a surprise. The record suggests that the anticircumvention right was intended by Congress as a shield rather than a sword, intended as a means to prevent wholesale misappropriation of copyrighted content, rather than as a means to extend content owners’ exclusivity to cover adjacent, uncopyrighted technologies. Yet the cases brought by rights holders thus far, have been characterized by a decided lack of anything resembling “piracy” or unauthorized copying.

67. En effet, la pratique montre que pour une vaste majorité de titulaires de droits, avec en tête la puissante Recording Industry Association of America (RIAA), les dispositions du DMCA sont perçues comme une invitation à l’intempérance. Depuis son adoption en 1998, ce texte américain a été utilisé à outrance non seulement pour tenter de rendre impossible tout usage équitable d’une œuvre, mais également pour empêcher la diffusion de l’information, et ce contrairement aux principes établis par la clause constitutionnelle de copyright et au Premier Amendement. En effet, le DMCA accorde une protection démesurée aux titulaires de droits. Sur ce point, nous rejoignons les propos de D. Vaver sur les dangers inhérents à tout excès relatif à la protection du droit d’auteur :

The decision to protect, once taken, must be matched by an equally careful decision on how far to protect. Overprotection imposes social costs by stopping or discouraging others from pursuing otherwise desirable activities. Before the public is excluded, clear harm should first be found to the particular right-holder or the intellectual property system as a whole.

68. Afin de rétablir l’équilibre entre les titulaires de droits et les utilisateur, nous croyons qu’il est essentiel que le Congrès insère une exception générale de fair use au DMCA ou encore, que les tribunaux interprète la loi américaine de manière à favoriser l’exercice d’une telle exception par l’ensemble de la population. L’interdiction de diffusion devra également faire l’objet d’un important assouplissement. Bref, une importante restructuration de la loi s’impose. En l’absence d’une telle réforme, fort à parier que le texte américain ne saurait repousser la menace d’inconstitutionnalité encore très longtemps.

Lex Electronica, vol. 9, n°1, hiver 2004
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La CRIA retourne devant les tribunaux

La Canadian Recording Industry Association (CRIA) a annoncé mardi qu’elle irait en appel de la décision du juge de la Cour fédérale Konrad von Finckenstein sur l’interdiction de divulguer les données pouvant permettre d’identifier les présumés contrevenants à la Loi sur le droit d’auteur. Richard Pfohl, conseiller juridique de la CRIA, a déclaré que l’Association tentera de faire valoir que le juge von Finckenstein a erré en droit, que la Loi sur le droit d’auteur «ne permet pas de faire des copies de centaines et de milliers d’enregistrements pour qu’ils soient recopiés, transmis et diffusés à des millions d’individus sur Internet.»

Dans son communiqué, la CRIA cite des données de l’IFPI (organisme représentant le secteur de la musique et du divertissement dans 76 pays) qui indiquent pour l’année 2003 une baisse de ventes des disques de 7,6 % par rapport à 2002. Or, si le chiffre est exact, il s’applique aux ventes mondiales de l’industrie du disque, tous marchés confondus. Si on en croit les données de l’IFPI, au Canada la baisse a été de 2,9 % en valeur de ventes, et de 4,2 % en unités de disques vendus.

L’IFPI révèle également un autre élément suceptible de remettre en perspective les chiffres de la CRIA : «Le créneau des vidéo de musique a connu une croissance globale de 46 %, et celle des ventes de DVD de musique de 67 %. [...] Dans les dix plus importants marchés pour les DVD de musique, la croissance va de 39 % pour le Japon à 294 % pour l’Italie, alors que l’Allemagne, la France, les Pays-Bas, l’Australie, le Canada et le Royaume-Uni enregistrent tous des hausses de plus de 100 % en unités vendues.»

Comme le prix de détail d’un DVD est supérieur à celui d’un CD, n’assisterrait-on pas à une «déplacement» latéral plutôt qu’à une chute réellement verticale, en plus de devoir composer avec la réalité des budgets dont l’élasticité n’est pas prouvée.

Une autre faille dans les données présentées par l’industrie de la musique (la CRIA et l’IFPI dont elle est membre) c’est qu’on ne comptabilise même pas les chiffres de vente des services commerciaux en ligne! De l’aveu même de l’IFPI : «Ce rapport sur les ventes mondiales de musique ne tient pas compte des formats numériques, mais le service de recherche des marchés de l’IFPI est à rassembler cette information pour les principaux marchés et inclura les renseignements relatifs aux ventes en ligne pour la première fois dès 2005.» Il faudra donc dorénavant tenir compte des iPod de Apple (50 millions de téléchargements payants en mars 2004), de Puretracks au Canada (1 million de téléchargements en février 2004), et OD2 en Europe (1 million de téléchargements au premier trimestre de 2004).

Toujours sur la question du droit d’auteur, du téléchargement et du «piratage», un aimable lecteur me souligne l’article suivant, «Our Next ‘War’ with America» de Jay Currie publié dans The Tye, magazine de Colombie-Britannique. L’auteur estime que la récente décision de la Cour fédérale du Canada met du sable dans l’engrenage de la guerre que livre la Recording Industry Association of America (RIAA) contre les «pirates» aux États-Unis. Analyse intéressante des contextes canadien et étasunien.

Aussi, dans la livraison d’avril de First Monday, «The state of copyright activism» de Siva Vaidhyanathan, auteur du livre «Copyrights and copywrongs».
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14.4.04

Clavardage, copier/coller et vie privée

Un avantage, et non des moindres, d’un système de clavardage comme MSN Messenger est de pouvoir tenir un journal des conversations. On discute d’un projet entre associés, on élabore des détails, on s’entend sur un plan d’action, et tout est consigné par écrit avec noms, dates, heures. Pratique et commode diront certains.

Mais Mark Rasch de SecurityFocus attire notre attention sur une subtilité juridique de cette pratique. Au New Hampshire, hors des cas où il y a mandat de surveillance émis par un juge, la loi dispose que toutes les parties concernées doivent consentir à l’interception ou à l’enregistrement d’une conversation.

Le 22 août 2002, un policier de cet État s’inscrit sur un canal de clavardage de AOL et prétend être une jeune fille de 14 ans. Un homme sollicite des «services sexuels» de ce qu’il croit être la fillette; l’agent de police consigne les détails de la conversation en copier/coller; l’individu est retracé par les services techniques de AOL et arrêté peu après. Le 23 février dernier, un juge déclare que la transcription texte de l’échange entre le policier et l’individu ne peut être déposée en preuve car ce dernier n’avait pas consenti à son enregistrement.

Mais il y a aussi une subtilité technique à l’emploi d’enregistrements d’échanges de clavardage. En 2002, dans l’État du Washington, un homme initie un échange par l’entremise du logiciel ICQ avec une personne qui prétend être une fillette de 13 ans, mais qui est en fait un policier, et lui fait des propositions à caractère sexuel. Dans ce cas, la cour a noté qu’un réglage implicite (by default) du logiciel ICQ consignait dans un fichier texte toutes les conversations, que l’accusé devait connaître l’existence de ce réglage implicite, et que la transcription de l’échange était donc admissible à titre de preuve.

La protection de la vie privée pour le clavardage, du moins en jurisprudence étasunienne, tiendrait donc aux fonctions inhérentes aux logiciels utilisés. Si, dans le cas d’AOL et de MSN Messenger, le logiciel propose en option l’enregistrement de l’échange, toutes les parties à l’échange doivent être informées s’il y a enregistrement. Il en va de même pour les pratiques de copier/coller qui seraient utilisées sous d’autres plate-formes. En revanche, pour ICQ ou tout autre logiciel dont les réglages implicites prévoient l’enregistrement automatique des conversations sous forme de fichier-journal (log), il incombe à l’utilisateur de savoir que l’échange est ou peut être enregistré.
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Disparition des téléphones public, les portables en cause

Telephone publicCanada : Le nombre de téléphones publics au Canada a atteint un sommet en 1999. Depuis, Telus en a retiré du service plus de 4 400 seulement en Alberta et en Colombie-Britannique, il n’en reste que 33 381 dans ces deux provinces. Selon un récent rapport du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications (CRTC), le nombre de téléphones publics diminue de 2,7 % au Canada, et les revus des entreprises qui les exploitent de 11,9 %.
Source : Calgary Herald, 5 avril 2004

Canada : Selon Statistique Canada, il y avait au Canada en 1999 178 952 téléphones publics. En 2003, leur nombre était passé à 159 112.
Source : Globe and Mail, 20 mars 2004

États-Unis : Plus de 600 000 téléphones publics ont été retirés du service, une diminution de 30 % depuis 1996 alors qu’on en comptait 2,6 millions. Bell South qui dessert neuf États du Sud-est des États-Unis a récemment retiré les 143 000 téléphones publics qu’il exploitait.
Source : Detroit News, 14 mars 2004

Belgique : «Aujourd'hui, Belgacom assume 7 missions de service public, qualifiées par l'Europe de service universel. Parmi elles notamment, le raccordement pour tous à des prix abordables, l'annuaire, les renseignements, les tarifs sociaux et les 14 000 cabines téléphoniques. 10 000 d'entre elles sont non rentables; 1 000 sont utilisées seulement deux fois par jour. [...] L'organisme de contrôle du secteur, l'IBPT, vérifie donc les chiffres; diminuer le nombre de cabines publiques, permettrait donc d'alléger cette facture, cela arrangerait tout le monde.»
Source : RTBF, 16 mars 2004

Évidemment, cela se passe de démonstration, la disparition des téléphones publics est directement liée à la plus grande pénétration des téléphones portables.

Pourtant, selon une étude du MIT, le téléphone cellulaire est le dispositif technologique le plus détesté par l’ensemble de la population (30 %). Viennent ensuite le réveil-matin (25 %), la télévision (23 %) et le rasoir électrique (14 %).
Source : 2004 Lemelson-MIT Invention Index

Le spécialiste de la convivialité Jakob Nielsen rapporte dans sa plus récente chronique les résultats d’une enquête menée par des chercheurs de l’université britannique de York sur ce qui irrite les témoins involontaires de conversations. L’expérience mettait en place deux personnes conversant à un arrêt d’autobus ou dans un train, puis dans un second ensemble de tests une seule personne conversant par l’intermédiaire d’un téléphone portable.

À volume égal, contrôlé par les chercheurs, la conversation par portable était jugée plus perceptible que la conversation entre deux individus (3.4/1.8 sur une échelle de 5), plus gênante (2.4/1.4), plus agaçante (2.4/1.6). À deux niveaux de volumes, soit de conversation normale et à voix élevée, la conversation entre deux personnes à voix élevée était jugée plus désagréable par les sujets, mais mois à volume égal que le solliloque dans un téléphone portable.

Il semble, selon les conclusions qu’en tirent Nielsen et les chercheurs de York, que l’on porte davantage attention lorsqu’on n’entend qu’une conversation partielle, et qu’il serait plus facile d’être indifférent à une conversation continue entre deux personnes que d’ignorer une personne qui parle puis se tait en alternance accrochée à un portable.

Resterait donc aux utilisateurs à faire preuve d'étiquette lorsqu'ils conversent en public à l'aide de leurs téléphones cellulaires, et aux fabricants d'appareils à travailleur sur des améliorations qui feraient en sorte qu'on ne soit pas tenus de parler à haute voix pour être entendus.
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11.4.04

Haïti : Coke en stock

Le 15 mars dernier, l’Associated Press rapportait la découverte à Miami de 100 kilos de cocaïne, valeur évaluée à 1,8 million de dollars, dans la citerne sanitaire d’un cargo, le M/V ANICIA. Le navire avait quitté les Gonaïves le 10 mars et était arrivé, cales vides, à Miami le 13 mars. Les huit hommes d’équipage (cinq Haïtiens, deux Nicaraguayens et un Guyanais) ont été retournés dans leurs pays respectifs. Gonaïves était alors depuis plus d’un mois contrôlée par les «rebelles».

Vendredi 9 avril, l’agence Reuters nous apprend la saisie, toujours à Miami, de 65 kilos de cocaïne sur le cargo Margot arrivé la veille de Cap Haïtien. C’est ce même navire, le Margot, qui était intercepté par la garde côtière des États-Unis le 25 février dernier à une dizaine de miles des côtes de Floride. Le capitaine avait lancé un appel de détresse, disant que des hommes armés s’étaient emparés du navire.

Rappelons que Cap Haïtien est maintenant, selon les déclarations officielles, sous contrôle des militaires français du 33ème régiment d'infanterie de marine, mais que jusqu’au 1er avril, l’autorité portuaire était contrôlée par les rebelles, et qu’elle le serait toujours selon le Miami Herald du dimanche 11 avril. Le major Xavier Pons, porte-parole du contingent militaire français, déclarait au Herald que «les institutions recommençaient à fonctionner normalement.»
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9.4.04

Haïti : Amnesty et Human Rights Watch dénoncent

Les organismes de défense des droits Amnesty International (AI) et Human Rights Watch (HRW) ont publié depuis quelques jours des rapports inquiétants sur la situation qui régne en Haïti.

Au terme d’une mission d’enquête de quinze jours, Amnesty International a fait part de ses profondes préoccupations à l’égard de la sécurité de juges, procureurs du ministère public, enquêteurs, victimes, témoins et défenseurs des droits de la personne impliqués dans des poursuites relatives à des cas d’abus antérieurs au départ du président Jean-Bertrand Aristide. Le rapport de mission d’AI se montre critique à l’égard du nouveau gouvernement qui n’a aucune emprise sur le système de justice pénale, et sur les forces d’occupation étasuniennes qui n’ont pu fournir aucun détail sur le contexte de détention d’une quarantaine de personnes incarcérées depuis le changement de régime.

AI décrit un système de deux poids deux mesures : Louis Jodel Chamblain et Jean Pierre Baptiste (“Jean Tatoune”), par exemple, sont toujours en liberté, tout comme d’autres individus cités dans un rapport précédent. Chamblain a déjà été reconnu coupable d’exécution extra-judiciaire, et avec Jean Tatoune condamné aux travaux forcés à vie pour sa participation au massacre de Raboteau en 1996. Selon Amnesty, «En ne mettant aux arrêts que les partisans du parti Lavalas, le gouvernement ne communique pas le bon message. Les individus au sein des rebelles reconnus coupables de sérieuses violations des droits de la personne doivent aussi être arrêtés.»

Amnesty International a également reçu des rapports d’assassinats et d’enlèvements de personnes appartenant aux organismes populaires pro-Aristide dans les quartiers pauvres de la capitale Port-au-Prince. Parmi ceux qui seraient responsables de ces actes de violence, on trouve des évadés de prison reconnus coupables de viols et autre crimes de droit commun. Ils travailleraient maintenant aux côtés de la Police nationale et de la force multinationale d’intervention pour identifier les personnes associées au régime Lavalas.

Pour sa part, Human Rights Watch demande aux forces militaires étasuniennes en Haïti d’arrêter Louis Jodel Chamblain et Jean Pierre Baptiste et de les livrer à la justice. Dans un communiqué émis le 5 avril, la directrice adjointe de la section des Amériques de HRW, Joanne Mariner, a déclaré : «Le contraste entre l’empressement du gouvernement haïtien à poursuivre d’anciens membres de l’équipe Aristide et son indifférence à l’égard des abus de certains dirigeants rebelles ne pourrait pas être plus marqué.» HRW s’étonne également que le premier ministre désigné, Gérard Latortue, ait partagé avec ces chefs rebelles la même tribune lors d’une viste à la ville des Gonaïves en les qualifiant de «combattants pour la liberté».
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Nuages à l’horizon pour les diffuseurs publics

Après avoir amputé le budget de Télé-Québec de quelques millions, le ministre québécois des Finances Yves Séguin s’interroge publiquement à savoir s’il est du rôle de l’État d’exploiter une chaîne de télévision. Sa collègue du Conseil du trésor, Monique Jérôme-Forget, lance l’idée de transformer Télé-Québec en portail pour les services de l’État. La ministre de la Culture et des Communications, Line Beauchamp, tente d’atténuer ces propos mais parle de la nécessité de réforme à Télé-Québec. Jean Charest, pour sa part, a signalé que le fonctionnement de la télévision publique, dont la mission est dit-il «importante», serait revu comme celui des autres sociétés d'État. Rien de quoi rassurer le public qui entend signifier son appui au télédiffuseur public.

http://www.sauvonstelequebec.tv/

Par ailleurs, Radio-Canada rompt les discussions avec son syndicat des communications. «Le porte-parole patronal à la table de négociation, M. Christian Bougie, a informé le syndicat et les conciliateurs du ministère fédéral du Travail, MM. Réjean Bercier et Jacques Lessard, que la Société n’entendait plus négocier et qu’elle déposera plutôt une offre finale et globale le jeudi 15 avril à 8h. Cette annonce surprise survient à cinq jours de la fin de la conciliation et après plus de deux mois de négociation entre les deux parties. Le SCRC est sans contrat de travail depuis le 28 mars. Le SCRC dénonce vigoureusement la décision de Radio-Canada, qui tente une fois de plus de court-circuiter le processus normal de négociation. Visiblement, l'administration du pdg Robert Rabinovitch ne semble avoir tiré aucune leçon du lock-out de neuf semaines qui a secoué l’entreprise il y a deux ans.»

http://avectoutesnosforces.typepad.com

À quel fil tient la diffusion publique?

«Comme si les événements de septembre 2001 n'avaient pas suffisamment poussé les médias vers l'hystérie sécuritaire et le conformisme, des offensives se préparent un peu partout pour ébranler ce qui reste de radiotélédiffusion publique. L'exemple le plus spectaculaire est assurément celui de la BBC dont le scalp est ardemment recherché par le premier ministre Tony Blair. Les propos faussement candides des ministres québécois Yves Séguin et Monique Jérôme-Forget au sujet de Télé-Québec constituent quand même, à leur échelle, une autre volet de la même propension. Quant à Radio-Canada, elle a à peine besoin de menaces pour s'autocensurer et verser dans un populisme aberrant. L'analyse ne serait pourtant pas complète si l'on oubliait que les artisans de la radiotélédiffusion publique cèdent eux-mêmes plus souvent que nécessaire aux mirages de la cote d'écoute. D'un côté, des gouvernants qui ne croient pas aux vertus de la radiotélédiffusion publique; de l'autre, des gestionnaires et même des professionnels de la diffusion qui ne savent où puiser leurs modèles de radio et de télévision.»

Dixit Laurent Laplante
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Les forces spéciales U.S. auraient entraîné les rebelles haïtiens

C’est la révélation faite par le Dr. Luis Barrios, professeur de droit criminel au collège John Jay (New York) qui a effectué depuis deux ans plusieurs séjours en République dominicaine. Selon des témoignages de militaires, d’avocats et de journalistes dominicains, un contingent de 200 soldats des forces spéciales des États-Unis aurait entraîné les rebelles haïtiens qui ont mené des attaques dans certaines régions d’Haïti en février dernier et amené le départ du président Jean-Bertand Aristide.

Dans une entrevue accordée à Amy Goodman de Democracy Now, Barrios a déclaré que les rebelles s’entraînaient sur des installations militaires dominicaines, recevaient chaque mois dans un hôtel de Santo Domingo une «formation technique» et de l’argent provenant du International Republican Institute. (Voir le texte du 17 mars 2004).

Parmi ces rebelles, l’ex-inspecteur de police Guy Philippe et l’ex-numéro deux du FRAPH Louis Jodel Chamblain. Ce dernier aurait même accordé une entrevue à un journaliste dominicain vêtu d’un uniforme de la police nationale dominicaine. Le port de ces uniformes, par les rebelles, visait à ne pas attirer l’attention sur leur présence au pays. Évidemment, lorsque l’entrevue fut diffusée, le chat est sorti du sac.

Les rebelles se seraient préparés depuis deux ans en République dominicaine, recrutant bon nombre d’ex-militaires haïtiens ayant participé au coup d’État militaire qui renversa Jean-Bertrand Aristide en 1991. Depuis leur base en R.D., les rebelles entraient en territoire haïtien pour mener des attaques, dont celle contre les installation hydro-électriques de Péligre en mai 2003 qui fit deux morts. Le président Aristide avait demandé aux autorités dominicaines d’arrêter les chefs de rebelles. À deux reprises, Guy Philippe a été mis aux arrêts, mais ensuite relâché en moins de 24 heures.

Ces révélations suivent la visité-éclair en Haïti du secrétaire d’État des États-Unis, Colin Powell, qui a déclaré s’opposer à l’enquête réclamée par la Communauté des États des Caraïbes (Caricom) sur les circonstances entourant le départ du président Aristide.
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7.4.04

Certains dossiers ont un comportement boomerang

C’est étrange de voir comment certains dossiers ont un comportement boomerang. On a beau croire s’en débarrasser, ils reviennent toujours.

Des caméras contre les revendeurs de drogue,
Radio-Canada, 7 avril 2004

L’arrondissement de Ville-Marie, à Montréal, a adopté une résolution mardi soir, qui permettra d’installer des caméras de surveillance dans le quadrilatère formé des rues Berri, Sherbrooke, Sanguinet et René-Lévesque.

25 millions de caméras de surveillance, et la perspective canadienne,
Chroniques de Cybérie, 19 février 2002

Il y a parfois des chiffres qui étonnent et détonnent : il y a 25 millions de caméras de surveillance vidéo en opération dans le monde et, à cause des événements que l'on connaît, leur nombre est appelé à augmenter sensiblement.  La Grande-Bretagne en compte à elle seule 2,5 millions; on estime que le citoyen ordinaire qui se ballade à Londres est photographié 300 fois par jour.  Un récent reportage de la BBC laisse entrevoir une perspective inquiétante : le maillage des réseaux de surveillance vidéo permettant de suivre à la trace une cible humaine dans tous ses mouvements, maillage rendu possible par l'utilisation de caméras numériques.

Selon le Los Angeles Times, il y en aurait deux millions aux États-Unis.  On se souviendra de l'expérience du «SnooperBowl» à Tampa et de l'échec monumental (sur le plan des résultats) de l'implantation du système dans un centre commercial (notre chronique du 8 janvier 2002).  Le 24 décembre dernier, un groupe militant avait organisé la journée mondiale de la «sousveillance»; on invitait les citoyens à photographier les caméras de surveillance, question d'énerver un peu et sans autre prétention ceux qui scrutent leurs agissements.

À Washington, à l'occasion de la plus récente alerte terroriste, on a activé un réseau de caméras de surveillance déjà en place, et on songe à augmenter considérablement leur nombre et à mettre sur pied une centrale de la surveillance vidéo.  De plus, selon le Washington Post, les images captées par ces caméras seront accessibles depuis le millier d'auto-patrouilles des policiers municipaux. 

Au Canada, un cas retient l'attention, soit celui du projet du service de police de la ville de Vancouver (Colombie-Britannique) qui veut installer 23 caméras de surveillance vidéo dans le quartier Eastside du centre-ville, ainsi que dans les quartiers de Strathcona, Gastown et dans le Chinatown.  L'objectif mis de l'avant par le service de police dans sa présentation du projet est de réduire la criminalité dans ces secteurs.

Les auteurs du rapport évoquent l'expérience britannique, mais hésitent à suggérer l'application tel quel du modèle de surveillance omniprésente.  Ils lui reconnaissent toutefois une certaine valeur : «il existe des centres urbains au Royaume-Uni où les systèmes de surveillance vidéo semblent justifiés, ont eu une incidence sur le taux de criminalité, ont contribué à une perception accrue de sécurité pour les citoyens, et ont servi les objectifs de revitalisation de ces secteurs.»

Il y a environ deux semaines, l'Association du Barreau canadien, Division de la Colombie-Britannique, invitait George Radwanski, Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, à s'adresser à ses membres.  Le thème retenu, on l'aura compris, était celui du projet de réseau de caméras de surveillance pour certains quartiers de Vancouver.

Dans son allocution, M.  Radwanski a été très clair : «Je veux persuader la population de Vancouver de bien penser deux fois, et avec le plus grand soin, à cette proposition de votre service de police - et de considérer que la solution, ce n'est pas de troquer un droit fondamental de la personne, comme le droit à la vie privée, pour une sécurité illusoire [...] Les caméras que vous envisagez d'installer ici à Vancouver - et celles qui suivront dans toutes les autres villes qui vous imiteront si vous allez de l'avant avec ce projet - sont à double tranchant, et elles changeront irrévocablement toute notre conception de nos droits et libertés.»

Le Commissaire a rappelé qu'au cours des derniers mois, il a eu à se prononcer sur certaines dispositions du train de mesures adopté par le gouvernement pour lutter contre le terrorisme : «j'ai déclaré publiquement que la vie privée n'est pas un droit absolu.  Il peut certes y avoir des circonstances où il est légitime et nécessaire de sacrifier certains éléments de la vie privée aux intérêts de précautions indispensables pour la sécurité.  Mais j'ai aussi dit que le fardeau de la preuve doit toujours incomber à ceux qui affirment que ce sacrifice est nécessaire.»

La Cour suprême du Canada a maintes fois statué que la notion de vie privée est au cœur de celle de la liberté dans un État moderne, ce à quoi le Commissaire ajoute que c'est plus qu'un droit, c'est aussi un besoin inné de la personne : «Et si la vie privée est la question déterminante de la décennie, je crois que la surveillance vidéo est l'enjeu déterminant dans cette question plus vaste.»

De la physique au psychologique, M.  Radwanski a ratissé très large dans son exposé : «C'est bien connu.  À la fin des années 20, Werner Heisenberg a démontré qu'il est impossible d'observer des particules subatomiques sans en modifier le comportement.  Depuis ce temps, les spécialistes de la physique et des comportements utilisent le terme “effet Heisenberg” pour décrire ce qu'ils savent tous, que le fait d'être observé a des effets réels.  L'impact psychologique qu'amène le sentiment d'être sous observation constante, le genre de situation que nous aurons si nous laissons proliférer les caméras de surveillance, est énorme, incalculable.»

Jamais à court d'arguments, M.  Radwanski a signalé que les taux de criminalité à Vancouver sont en baisse, et le sont depuis des années.  En 1991, il y avait 202 crimes pour 1 000 habitants, et en 2000, 138; rien n'indique qu'il y a une quelconque nouvelle vague de criminalité justifiant l'urgence et la nécessité d'invoquer la solution des caméras de surveillance vidéo.

Et sur l'efficacité des systèmes : «Le Royaume-Uni a plus de caméras de surveillance que n'importe quelle autre société dans le monde, plus de deux millions, et le nombre ne cesse de croître chaque année.  Et les faits parlent d'eux-mêmes.  À Glasgow, on a évalué le système de surveillance un an après son installation.  À première vue, il semblait bien que le taux de criminalité avait régressé.  Mais un examen plus serré des statistiques a révélé que la criminalité avait plutôt progressé de 9 %.  Londres a environ 150 000 caméras de surveillance vidéo.  L'an dernier, elle avait plus de caméras que jamais auparavant.  Et devinez quoi? L'an dernier, la criminalité de rue à Londres a augmenté de 40 %.»

Et de conclure : «Montrez que vous pensez que notre pays, notre société, valent la peine d'être préservés, et soyez prêt à défendre votre vie privée.» Une allocution importante du Commissaire à la protection de la vie privée du Canada, un texte qui fera figure de référence au cours des nombreux débats à venir sur la question de la surveillance.
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4.4.04

L’étonnant succès des Cowboys fringants en France

Cowboys ParisVendredi dernier (2 avril), commotion à l’Élysée Montmartre à Paris où le groupe québécois Les Cowboys fringants faisait salle comble. L’étonnement, comme l’écrit Michel Dolbec de la Presse canadienne tient à ce que : «Il faut savoir que le groupe est inconnu en France : ses disques sont pratiquement introuvables, ses chansons ne tournent pas à la radio et on n’a jamais parlé de lui ou presque dans la presse. [...] Envrion 1400 jeunes gens (et des moins jeunes), sortis d’on ne sait où, se sont ainsi retrouvés, debout, serrés les uns contre les autres, chantant et dansant aux rythmes des airs des cinq Québécois.» Mais comme l’explique Dolbec, Internet a joué. «Un succès aussi spontané est inédit, mais pas inexplicable. En fait les Cowboys Fringants ont profité d’un bouche-à-oreille sans précédent, orchestré à travers Internet par leur fan-club français, une association baptisée "Les Cousins fringants".»

En effet, l’organisme Les Cousins Fringants, désormais constitués en Association Loi 1901 (sans but lucratif) anime un forum de discussion sur Yahoo! créé le 7 novembre 2003. Sans compter un autre site «sympathique» aux Cowboys, Le Shack à Bruno.

Mais alors que ces temps-ci tout le monde parle de téléchargement de musique sur Internet, de piratage, et de protection de droits d’auteurs, il est intéressant de voir comment Les Cowboys ont géré le phénomène Internet, c’est-à-dire en offrant en téléchargement libre depuis leur propre site une vaste sélection de leurs oeuvres sur leur site, en plus des partitions. C’est ce qui explique d’ailleurs que les fans parisiens des Cowboys connaissaient toutes les paroles des chansons, et ont chanté en choeur avec le groupe tout au long du spectacle.

Il est toujours difficile d’attribuer à une cause ou à une autre un événement aussi «spontané» que celui de vendredi dernier. Par contre, dans ce cas-ci, il serait difficile de nier l’effet Internet sur l’accueil que les Cowboys ont reçu à Paris. Un exemple qui sera certainement cité dans les prochains débats sur le téléchargement.
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2.4.04

L’effet zéro du piratage

Deux chercheurs universitaires étasuniens, Felix Oberholzer du Harvard Business School et Koleman Strump du campus Chapel Hill de la University of North Carolina, viennent de publier une étude, The Effect of File Sharing on Record Sales: An Empirical Analysis (format PDF) selon laquelle l’échange de fichiers musicaux sur Internet aurait un effet nul sur les ventes de disques, contrairement à ce qu’affirment les acteurs de l’industrie de la musique.

Il y aurait eu, au cours des années quatre-vingt-dix, une hausse artificielle des volumes de ventes de disques attribuable au remplacement d’oeuvres sur vinyle par des versions sur disques compacts. Même sans téléchargement de fichiers, une baisse du volume de ventes était à prévoir une fois passée la période de «remplacement». Sur ce dernier point, Oberholzer et Strump citent la recherche de Stan Liebowitz de l’Univesité du Texas publiée en 2003, Will MP3 downloads Annihilate the Record Industry? (format PDF). Liebowitz affirme également que l’industrie a connu des creux avant de n’être confrontée au phénomène d’échange de fichiers. Il lie étroitement la performance du secteur de la musique enregistrée au revenu réel disponible per capita, et illustre clairement le parallélisme des courbes statistiques : une période de baisse de 1978 à 1982, une croissance quasi nulle de 1984 à 1987, puis une reprise en 1995.

Oberholzer et Strump estiment que s’il y a eu baisse des ventes, le téléchargement d’oeuvres musicales y serait pour peu de chose. Il y a d’autres produits susceptibles d’être échangés eu égard aux possibilités d’Internet (films, logiciels, jeux video) et pourtant ces secteurs n’ont pas connu de baisse des ventes. La diminution des ventes pourrait être attribuable à une foule de causes notent-ils : une situation macroéconomique défavorable (argument de Liebowitz); une réduction du nombre de nouveaux albums publiés; une plus grande concurrence d’autres formes de divertissement comme les jeux et les DVD (les budgets personnels ne sont pas extensibles à l’infini); une diminution de la variété de styles musicaux proposés; une possible réaction du public à l’endroit des pratiques de l’industrie de la musique.
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Jugement von Finkenstein, prise 2

La décision du juge Konrad von Finckenstein de la Cour fédérale du Canada (voir l’entrée précédente) a, comme on s’y attendait, fait beaucoup parler. Quelques commentaires et observations supplémentaires.

Si la plupart des commentateurs et observateurs ont traité de l’aspect «piratage» de la décision, il est bon de rappeler qu’à l’origine il s’agissait d’une demande, de la part des membres de la Canadian Recording Industry Association, de divulgation de données personnelles d’abonnés de services d’accès Internet. On tiendra pour preuve de l’importance dans cette cause de l’aspect «vie privée, protection des renseignements personnels» de ce que révèle une lecture attentive de la décision. Dans les quelque 34 pages du texte, composé pour une bonne part d’annexes justificatives et de citations de jurisprudence, le mot «copyright» (droit d’auteur) est utilisé 31 fois, mais le mot «privacy» (vie privée) y figure 21 fois. Il s’agissait donc d’un élément clé de la cause telle que présentée.

À l’article 27 de la décision, page 14, le juge écrit : «J’ai peine à voir la différence entre une bibliothèque qui installe une photocopieuse dans une pièce remplie d’oeuvres protégées, et un utilisateur qui dépose une copie personnelle d’une oeuvre protégée dans un répertoire partagé sur un service P2P.» Il conviendrait ici de préciser que des organismes de gestion collective des droits de reproduction et de distribution de redevances existent au Canada, c’est-à-dire Copibec pour le Québec et Access Copyright pour le reste du Canada.

Ces organismes gèrent tant la reproduction sur support papier par des moyens traditionnels comme la photocopie et la télécopie, que celle faite sur support électronique (cédérom, banque de données, Internet). Dans le cas de Copibec, chaque année, plus de 200 000 déclarations de photocopie sont traitées par le personnel de la société de gestion, et depuis sa création en 1997, elle a versé plus de 21 millions de dollars à des milliers d’auteurs, d’éditeurs et d’artistes en arts visuels. L’ensemble des bibliothèques publiques de même que les entreprises spécialisées dans la confection de revues de presse sont maintenant sous licence avec Copibec.

Revenons à l’ouvrage de Lawrence Lessig, Free Culture, dont je parlais il y a quelque temps. Lessig détermine (chapitre 5) quatre motifs principaux pour lesquels certaines personnes s’adonnent à l’échange de fichiers : la substitution à l’achat d’un CD; l’essai d’un produit avant l’achat; l’accès à des contenus non protégés ou dont les ayant droit décident de distribuer sans frais; l’accès à des contenus qui sont protégés par le droit d’auteur, mais qui ne sont plus disponibles sur le marché.

Cette dernière pratique soulève une question intéressante, soit celle d’oeuvres protégées mais disparues du marché. Si je veux me procurer la version du «Tango des roses» chantée par Corinna Mura dans le film Casablanca (1942), est-ce que je risque d’être poursuivi même si l’oeuvre n’est plus disponible sur le marché?

Enfin, y aurait-il des artistes plus «piratables» que d’autres? À la radio (du moins celle que j’écoute), il y a eu nombre de commentaires et de tribunes téléphoniques à la suite de la décision von Finkenstein. Or, il est étrange d’entendre des commentaires du genre «Moi, pirater les gros groupes américains, j’ai pas de problème. Mais Richard Desjardins, jamais!» Il y aurait donc dans l’opinion publique une catégorie d’artistes qu’on peut pirater sans problème. Débat éthique à l’horizon.
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1.4.04

Musique sur Internet : Et le juge a dit...

Que l’on ne pouvait forcer les fournisseurs de services Internet (FSI) à identifier des utilisateurs soupçonnés d’échanger des fichiers musicaux.

CD, coaxialL’affaire remonte au 11 février dernier. Un groupe de sociétés membres de la Canadian Recording Industry Association (CRIA) exige de la Cour fédérale que cinq FSI (Bell/Sympatico, Rogers, Shaw, TELUS et Vidéotron) divulguent l’identité de 29 utilisateurs ayant téléchargé par l’intermédiaire des services KaZaA et iMesh plus d’un millier de fichiers musicaux sur lesquels elles détiennent des droits. Ils entendent, avec ces données, jumeler des pseudonymes d’utilisateurs des services d’échange poste-à-poste (P2P) à des adresses IP et obtenir des FSI les données nominatives de ces abonnés. Les sociétés (BMG, Warner, Sony, Universal, EMI, etc.) allèguent que cette forme d’échange enfreint leurs droits en vertu de la Loi sur le droit d’auteur. Les procureurs des FSI ont cependant soulevé, comme on s’y attendait, de nombreuses objections.

Le seul point sur lequel plaignants et mis en cause se sont entendus est celui de l’application dans la présente cause des dispositions de la Loi sur la Protection des renseignements personnels et les documents électroniques contenues en son article 7(3)c) soit que :

«7.(3) Pour l’application de l’article 4.3 de l’annexe 1 et malgré la note afférente, l’organisation ne peut communiquer de renseignement personnel à l’insu de l’intéressé et sans son consentement que dans les cas suivants :...

c) elle est exigée par assignation, mandat ou ordonnance d’un tribunal, d’une personne ou d'un organisme ayant le pouvoir de contraindre à la production de renseignements ou exigée par des règles de procédure se rapportant à la production de documents;
»

Or le juge n’a pas ordonné aux FSI de divulguer les données pouvant permettre d’identifier les présumés contrevenants à la Loi sur le droit d’auteur. D’ailleurs, la lecture de la décision du juge Konrad von Finckenstein (fichier PDF, en anglais, extraits traduits librement en attente de la version officielle) révèle de sérieuses failles dans la cause telle que présentée par les procureurs de la CRIA.

Après avoir cerné le cadre juridique de la cause, le juge écrit :

«[43] En vertu des précédentes, il est clair dans mon esprit que les plaignants n’ont pas :
- établi de cause prima facie (la preuve dans leur affidavit est déficiente, ils n’ont pas établi un lien de cause à effet entre les pseudonymes P2P et les adresses IP, et n’ont pas soumis de preuve prima facie de violation);
- établi qu’à toutes fins pratiques les FSI étaient l’unique source pour identifier les utilisateurs de pseudonymes P2P;
- établi que l’intérêt public l’emportait sur les questions de vie privée dans la divulgation des données, eu égard à l’âge des données.»

Les plaignants avaient chargé la société de services anti-piratage MediaSentry d’enquêter sur l’échange de fichiers musicaux sur lesquels ils ont des droits. C’est le directeur général de MediaSentry, Gary Millin, qui a témoigné des résultats de l’enquête, mais le juge a qualifié son témoignage de «ouï-dire» car les informations qu’il rapportait venaient de ses employés, lui-même n’ayant pas participé directement à l’enquête. Le juge écrit : «Il semble clair que d’autres employés de MediaSentry auraient été mieux à même de présenter les affidavits sous serment et de répondre en connaissance de cause au contre-interrogatoire».

De plus, Millin a décrit devant le juge la technique de MediaSentry nommée MediaDecoy qui consiste à rendre disponible de «faux fichiers» musicaux sur les services d’échange. Ils présentent les caractéristiques de fichiers musicaux, mais sont inopérants, donc source de frustration et élément que l’on veut dissuasif pour les utilisateurs. Toutefois, Millin a avoué ne pas avoir écouté de fichiers présumément piratés pour voir s’il s’y trouvait des fichiers MediaDecoy, et que cette fonction ne s’inscrivait pas dans le cadre du mandat que la CRIA lui avait confié.

Le juge von Finckenstein a également critiqué la preuve liant le pseudonyme Geekboy@KaZaA au numéro IP 24.84.179.98 affecté au FSI Shaw Communications. Il déclare que rien dans les éléments présentés par MediaSentry ne vient établir un lien entre le pseudonyme et l’adresse IP au moment des faits constatés, et qu’il serait «irresponsable pour le tribunal d’ordonner la divulgation du nom de l’abonné de l’adresse IP et de l’exposer à des poursuites.»

Le juge a cité la décision de la Commission du droit d’auteur du 12 décembre 2003 selon laquelle le téléchargement pour utilisation privée d’une oeuvre musicale ne constitue pas une violation du droit. Aucune preuve n’a été faite que les utilisateurs visés par la demande de divulgation avaient diffusé ou distribué des oeuvres protégées; ils n’avait fait que déposer des oeuvres dans des répertoires de services P2P. «Le simple fait de placer une copie dans un répertoire partagé sur un ordinateur accessible par un service P2P ne constitue pas un acte de distribution. Avant qu’il y ait distribution, il doit y avoir un geste direct par le propriétaire d’un répertoire partagé, comme l’envoi de copie ou une annonce à l’effet qu’elle est disponible.

Dans la présente cause, il n’y a eu aucune preuve à cet effet. Les plaignants n’ont réussi à prouver que les présumés contrevenants avaient rendu disponibles des copies sur leurs répertoires partagés. Le droit exclusif de rendre disponible une oeuvre est inclu dans le Traité de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle sur les interprétations et exécutions et les phonogrammes (CRNR/DC/95 Rev.), mais ce traité n’a pas été mis en oeuvre par le Canada, et ne fait donc pas partie du cadre juridique canadien en matière de droit d’auteur. Bref, pas de crime, pas de divulgation des données personnelles des utilisateurs.

Selon Richard Pfohl, conseiller juridique de la CRIA, l’association entend se pourvoir de son droit d’appel.

Que comprendre de ce jugement? La plainte de la CRIA a été deboutée, certes, et il n’est toujours pas illégal d’échanger des fichiers de musique en vertu de la jurisprudence et du droit canadiens. Cependant, si la plainte a été rejetée par le juge von Finckenstein, c’est en grande partie à cause de la faiblesse de la preuve présentée par les procureurs de la CRIA.
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