28.4.06

Des blogues rentables?

La semaine dernière, le Wall Street Journal publiait un échange entre deux acteurs importants de l’Internet aux États-Unis, Jason Calcanis, co-fondateur de Weblogs Inc., et Alan Meckler, p.d.-g. de la société de recherche Jupiter. Le sujet : les blogues peuvent-ils être rentables?

Calcanis soutient qu’on peut lancer un blogue et s’inscrire à un service comme AdBrite ou AdSense de Google. Avec trois ou quatre publicités, on retirera de ces services automatisés entre trois et dix dollars (US) par mille impressions (coût par mille pages vues, CPM). Par conséquent, si on peut atteindre 500 000 pages vues par mois, les revenus seront de l’ordre de 1 500 à 5 000 dollars.

Pour Meckler, atteindre un achalandage de 500 000 pages vues par mois est inatteignable pour 99,999 % des blogueurs. Son propre blogue, consacré surtout au C3E (commerce électronique entre entreprises) enregistre 300 000 pages vues par mois, et il trouve négligeable ce que la publicité pourrait lui apporter.

Calcanis rétorque qu’il touche déjà un salaire de 242 000 $ par année comme p.d.-g. de Jupiter, mais que dans un créneau de C3E, pour lequel le CPM varie entre 15 et 50 $, on peut alors toucher entre 4 500 et 15 000 dollars par mois, soit environ 50 000 à 180 000 dollars par année.

Il reconnaît aussi que de tels chiffres ne sont atteignables que pour un infime minorité de blogues, mais que si un blogueur persévère et parvient à dominer dans un créneau, il pourrait tirer un «demi salaire» acceptable des pubs. Il affirme également que d’ici quelques années, les blogues et médias citoyens pourraient s’accaparer de 10 à 20 %des dépenses publicitaires en ligne.

Dans son exposé des faits, Calcanis néglige cependant de parler d’un autre facteur qui peut jouer, le coût par click (CPC), soit le montant qu’un annonceur paye chaque fois qu’un utilisateur clique sur son annonce.

Si toute la question de la publicité sur les blogues vous intéresse, je vous suggère fortement de consulter l’excellente étude qu’en a fait Martin Breton. On y apprend entre autres que «Lors d’un sondage maison (en anglais) de ses lectrices et lecteurs, le site ProBlogger a demandé ce qu’étaient les revenus mensuels provenant de AdSense. Les résultats sont révélateurs. De ceux qui utilisent AdSense, le tiers (1/3) a fait moins de 10 $, 5 % ont amassé plus de 10 000 $, 17 % gagnent plus de 1 000 $ par mois et 25 % plus de 500 $ par mois.»
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27.4.06

Blogues et militantisme

Crashing the GateHier matin, alors que je complétais mes notes de présentation pour la soirée des Grands communicateurs, la postière m’a livré un petit colis, un livre en fait, Crashing the Gate: Netroots, Grassroots and the Rise of People-Powered Politics. de Jerome Armstrong et Markos Moulitsas Zúniga. Armstrong est le fondateur d’un des premiers blogues politiques aux États-Unis (2001), MyDD (My Direct Democracy), principal stratège Internet de la campagne du candidat à l’investiture démocrate pour la présidentielle étasunienne de 2004 (voir Politique réseau : Le «two-step flow» de Howard Dean), et associé principal du cabinet conseil Netroots. Zúniga est l'initiateur du blogue politique Daily Kos, créé en mai 2002 et dont l’achalandage oscille à environ un million de consultations par jour.

Évidemment je n'ai eu le temps de lire que quelques extraits de Crashing the Gate, mais suffisamment pour dégager la trame de fond, soit que la blogosphère étasunienne influence le débat politique au sein du parti démocrate, mais que l’issue de cette intervention n’est pas encore déterminée.

D’une part, certains politiciens démocrates considèrent les blogueurs politiques comme des amateurs mal informés des véritables enjeux et des rouages politiques. Ils sont un peu embarrassés par ce militantisme sur lequel ils n’ont aucun pouvoir direct. D’autres (et ici on a envie d’inclure certains journalistes) les perçoivent comme une menace à leur chasse gardée. Les auteurs soumettent que ni les uns, ni les autres ne peuvent ignorer les blogues qui influenceront le débat politique d’une manière ou d’une autre.

Dans un contexte de politique canadienne ou québécoise, il y a peut-être une analogie à tirer du fait que le militantisme citoyen dont traite Crashing the Gate concerne le parti démocrate, un parti qui est actuellement dans l’opposition. Pour les auteurs, il y a quelque chose de brisé dans l’appareil du parti. Le militantisme sur Internet peut avoir deux effets : il peut ou bien servir d’antidote à ces problèmes, ou bien mener bataille contre cette «mécanique dysfonctionnelle». Ce n’est certes pas un facteur à ignorer, et les républicains, eux, l’ont compris (voir États-Unis : Blogues et politique).

J’ajouterais que contrairement aux États-Unis, où la politique est dominée par deux partis, le multipartisme canadien et québécois, à défaut de représentation proportionnelle, se prête à toutes sortes d’équations et scénarios possibles.

J’avais encore ces bribes de lectures à l’esprit quand hier soir, à la fin de ma présentation, on m’a posé une question sur l’état de la blogosphère au Québec. Question difficile. On ne dispose d’aucune donnée sur le nombre réel de blogues au Québec, le nombre réel de blogues dits «actifs» (fréquemment mis à jour), les champs d’intérêt, l’achalandage de l’ensemble de ces blogues, le temps consacré à leur lecture, etc.

J’avais aussi à l’esprit le billet de Mario Asselin Après le buzz du blogue : «J’ai pu prendre au vol la chronique de Nicolas Langelier cette semaine à “Indicatif Présent” qui parlait de notre “soif d’information” et il m’est venu cette idée (pas très originale, je l’admets) que le buzz du blogue tirait peut-être à sa fin, pas parce qu’on va cesser d’en parler, mais peut-être qu’on est sur le point d’en entendre parler différemment, d’une façon plus qualitative, avec moins de prétention à l’effet qu’on serait les témoins du développement d’un phénomène, mais plutôt qu’on apprendrait vraiment à FAIRE AVEC.[...] Je me goure peut-être. Ça fait quatre ans que je pratique; je ne suis plus certain d’avoir le recul nécessaire pour être bon juge vers où ça s’en va… Qu’est qu’il y a après le buzz?»

La question que pose Mario est très pertinente, et le mot «faire» prend toute sa dimension. C’est à se demander si au Québec on regardera passer le défilé sans y participer, où s’il y aura émergence d’un militantisme qui interviendra, par les méthodes et outils décrits dans Crashing the Gate, dans l’arène politicienne et citoyenne.
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25.4.06

Deux solitudes?

Le chroniqueur Michel Vastel écrivait hier «Six mois exactement après que ce magazine [Ndb. L’Actualité] ait mis en ligne le premier blogue politique du Québec, voilà que la concurrence [Ndb. Cyberpresse] se réveille…». Il fait évidemment allusion au blogue qu’anime désormais Michel C. Auger sur Cyberpresse, en plus de publier ses chroniques et analyses dans Le Soleil et autres imprimés de Gesca.

Mais vraiment, «... le premier blogue politique du Québec»? Cette prétention, faute d’autre mot ou d’envie d’être plus méchant, n’illustre-t-elle pas deux solitudes, soit celle des journalistes patentés et des blogueurs? Les premiers se demandent de quel droit on empiète sur leur terrain; les seconds cherchent qui pourrait leur interdire de s’approprier cet espace.

Il y aurait donc deux blogues (et blogueurs) politiques au Québec, selon Vastel, soit le sien mis en ligne il y a six mois et celui de Auger. Oublions donc celui qu’animait André Boisclair dès février 2005 et qui a permis, dès l’annonce de son intention de briguer la direction du Parti Québécois, de jauger ses appuis. Oublions aussi Verstehen de Valérie Bélair Gagnon en ligne depuis juin 2004 et le collectif de La Tribu du verbe qui publie depuis 2001, pour ne mentionner que ceux-là.

Je conviendrai que les chroniqueurs politiques patentés québécois qui tiennent des blogues sont très rares, et encore le font-il par l’intermédiaire des sites Web de leurs employeurs (contrairement à David Akin de la chaîne CTV, aux commentateurs Norman Spector et Warren Kinsella et plusieurs autres).

Toutefois, affirmer qu’il n’y a que deux blogues «politiques» au Québec c’est afficher une bien mauvaise compréhension du phénomène des blogues. Pour avoir un blogue politique, il faudrait d’abord être chroniqueur politique attitré à un média traditionnel?

C’est peut-être, après tout, un phénomène de maturation des blogues au Québec qui aura dû s’inspirer de ce qui se vit ailleurs. Les journalistes des médias traditionnels adoptent pour modèle le comportement de leurs collègues étasuniens : d’abord ignorer le nouveau phénomène, ensuite dénigrer ceux qui en font partie, négocier leur propre transition pour enfin arriver en phase d’acceptation.
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La politique du copié/collé de Stephen Harper

«... une première directive du ministère de la Défense[...] précise qu’il n’y aura aucune cérémonie publique, ni couverture médiatique, pour le retour au pays des militaires tués au cours des opérations.[...] une seconde directive interdit dorénavant la prise ou la diffusion d’images de cercueils ou autres contenants utilisés pour transporter les restes de soldats étasuniens morts à l’étranger.[On voudrait...] ainsi éviter l’effet négatif que ces images pouvaient avoir dans l’opinion publique.»

Non, ce paragraphe n’est pas tiré d’une dépêche d’aujourd’hui sur la décision du gouvernement canadien d’interdire la couverture médiatique du retour au pays des corps des militaires tués lors d’opérations en Afghanistan. Il s’agit d’un copié/collé d’un texte publié sur ce blogue il y a deux ans, presque jour pour jour, soit le 24 avril 2004 (voir Les photos que le Pentagone voulait cacher) alors que le ministère étasunien de la Défense voulait interdire la diffusion de photos des cercueils de militaires morts en Irak.

Avril 2004 : «le sous-secrétaire adjoint du ministère de la Défense, John Molino, a déclaré “Nous ne voulons pas que les dépouilles de nos militaires qui ont fait l’ultime sacrifice fassent l’objet d’une attention qui ne soit pas justifiée ou qui manque de dignité.”»

Avril 2006 : Citant le ministre de la Défense, Gordon O'Connor, «Le rapatriement de soldats morts au combat est un événement privé et solonnel [sic]qui doit se dérouler entre les familles et les militaires», a-t-il dit.» (Voir Presse Canadienne Les médias ne pourront plus couvrir le rapatriement des soldats d'Afghanistan.)

On précise aussi que «Des sources militaires ont indiqué que cette décision venait directement du bureau du premier ministre Stephen Harper et non pas des militaires.»

Vraiment...
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24.4.06

Trois choses...

D’abord, depuis ce matin, le blogue de Michel C. Auger dont je vous parlais la semaine dernière est accessible sur Cyberpresse.

Pour rappel : ce soir, 21h00, diffusion de «Ceux qui n'en meurent pas laissent toute espérance» sur les ondes de Télé-Québec.

Autre rappel : mercredi soir, je serai aux Grands Communicateurs.

Et pourquoi pas une quatrième, cette fois pour les amoureux des mots. Lors de ma visite quotidienne sur Le portail des copains, j’ai trouvé ce lien vers les Dictionnaires d’autrefois. Un moteur de recherche qui permet de lancer une recherche simultanée sur le Thresor de la langue française de Jean Nicot (1606), le Dictionaire critique de la langue française de Jean-François Féraud (Marseille, Mossy 1787-1788) et le Dictionnaire de L'Académie française 1ère (1694), 4ème (1762), 5ème (1798), 6ème (1835), et 8ème (1932-5) éditions. le Dictionaire historique et critique de Pierre Bayle (1740), et le Dictionarium latinogallicum de Robert Estienne (1552).
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21.4.06

L’ambassade aux allures de forteresse

Même si George W. Bush promet un retrait d’Irak dès que la situation sera «stabilisée», dans l’état des choses, les États-Unis maintiendront une présence importante dans ce pays si on en croit la taille de l’ambassade en cours de construction à Bagdad.

Il s’agira de la plus grosse ambassade des États-Unis au monde avec ses 21 édifices en tout, étalés sur 104 acres. Qu’est-ce que 104 acres? C’est six fois l’espace occupé par le siège des Nations Unies à New York, la superficie de la Cité du Vatican, ou encore celle de 80 terrains de football.

À titre de comparaison, les plus importantes ambassades aux États-Unis sont celles de la Malaisie et du Nigeria, d’une superficie de 100 000 pieds carrés (9 290 mètres carrés, 2,2 acres), qui seront prochainement déclassées par la future ambassade de Chine (250 000 pieds carrés, 23 225 mètres carrés, 5,7 acres).

Selon le USA Today, l’ouvrage sera achevé en juin 2007 et coûtera 592 millions de dollars, bien que le devis initial prévoyait des coûts avoisinant le milliard. Le complexe comprendra deux édifices administratifs, six immeubles à logement, une piscine, une école, un gymnase et un mail de restauration rapide. L’ambassade fonctionnera en complète autarcie disposant de ses propres infrastructures électrogènes et d’approvisionnement en eau. Environ 5 500 personnes travailleront à cette ambassade, tant Étasuniens qu’Irakiens, la moitié d’entre elles étant préposées à la «sécurité».

Justin Higgins, porte-parole du State Department, a déclaré à propos de la nouvelle ambassade qu’elle était le signe de l’ampleur de l’engagement des États-Unis envers l’Irak sous toutes ses formes au cours des prochaines années.

Pour la journaliste Leigh Saavedra, les va-t-en-guerre tentent de faire croire que la construction d’une présence permanente en Irak, «un énorme mirador pour veiller sur le Proche-Orient (et son pétrole)» est une bonne nouvelle.
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18.4.06

Gillmor passe chez Backfence

Dan GillmorEn janvier dernier, je rapportais la grande déception de Dan Gillmor, un des précurseurs du journalisme citoyen (voir Le constat d’échec de Dan Gillmor). Il jetait l’éponge en ce qui a trait à l’expérience Bayosphere, un site qui se voulait pour et par les résidants de la Baie de San Francisco intéressés à la technologie, premier moteur économique de la région, et entendait se consacrer désormais au Center for Citizen Media (CCM), un organisme voué à la promotion du concept de journalisme citoyen. Or, il nous apprenait hier qu’il animera désormais l’édition Backfence de la région de San Francisco.

Backfence est un éditeur de médias communautaires en ligne publiés dans certaines collectivités aux États-Unis (Bethesda , Arlington, McLean, Reston et maintenant San Francisco). Backfence fonctionne selon le modèle du journalisme citoyen cher à Gillmor, c’est-à-dire que l’ensemble de son contenu (textes, photos, etc.) est produit par des personnes investies dans leurs collectivités, mais qui ne se réclament pas nécessairement de la profession journalistique. À terme, Backfence vise à implanter de tels médias communautaires à l’échelle des États-Unis. Celui de San Francisco est le premier à l’extérieur de la région métropolitaine de Washington.

On se souviendra qu’en 1997, la société Microsoft avait tenté de mettre sur pied une chaîne de sites Web régionaux à vocation arts/culture/divertissement (voir Premiers pas sur Sidewalk). J’écrivais à l’époque : «Si l'arrivée de Sidewalk fait des remous, c'est que Microsoft entend rentabiliser chacun des sites en s'accaparant une part du marché publicitaire régional, ce qui pourrait nuire aux quotidiens et hebdomadaires régionaux ainsi qu'aux diffuseurs Web.» L’expérience de Sidewalk s’est mal terminée pour Microsoft, mais ce modèle emprunté par Backfence, servi à saveur journalisme citoyen, à de quoi inquiéter les médias imprimés. D’une part, chaque constituante du réseau Backfence offre la possibilité de placer sans frais des annonces classées, source de revenus non négligeable pour les quotidiens. Et c’est sans compter les bandeaux publicitaires qu’elles proposent aux petites et moyennes entreprises de leurs régions respectives.

Pour Gillmor, l’invitation à se joindre à Backfence ne pouvait être refusée (voir Welcome to Backfence). D’une part, il bénéficiera de l’encadrement structurel et financier de Backfence explique-t-il, mais il sera également libéré des tâches d’homme orchestre qui l’accaparaient avec Bayosphere. Une expérience à suivre.
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17.4.06

Des oeufs de Pâques sur DVD

On connaît tous la tradition des oeufs de Pâques, mais j’ai été récemment mis au fait du phénomène des oeufs de Pâques sur DVD. Mieux vaut tard que jamais. Il s’agit d’un petit boni, un supplément, ou un complément caché sur un DVD et qui échappe à une consultation sommaire. C’est Mathieu Daoust, rédacteur en chef du site DVD en français présent sur le Web depuis déjà neuf ans, qui m’a initié à la chose. Selon lui, c’est le petit côté ludique des réalisateurs de DVD qui s’exprime par la dissimulation habile sur des DVD d’interviews, de scènes inédites ou censurées, de mini-jeux, de bandes-annonces, de documentaires de tournage, bref d’une foule de petits à-côtés.

Le site de Daoust dispose d’une section spéciale où ils sont répertoriés. Par exemple, sur le DVD de The Usual Suspects, édition spéciale, on trouve des entrevues cachées. «À partir du menu principal du côté 2, faites haut jusqu'à ce que Usual Suspects soit surligné. Cliquez dessus pour arriver à une page contenant plusieurs images. Sélectionnez, dans l'ordre, Quartet, Guatemala, Big Woman (Grosse Femme) et Broken Mug (Tasse Brisée) pour voir des entrevues cachées.» Sur celui du Fabuleux destin d'Amélie Poulain, édition de collection, «Pour accéder aux entrevues cachées qui ne devraient pas l'être, surlignez Film à partir du menu principal du disque 1 et faites droite sur votre télécommande pour illuminer le A de Amélie. Cliquez dessus pour voir diverses entrevues avec Jean-Pierre Jeunet.»

Les responsables du site vous invitent d’ailleurs à leur faire part d’oeufs de Pâques que vous découvririez et qui ne figurent pas sur leur liste. Bonne chasse.
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16.4.06

Motàmot

Raymonsd CloutierJ’aime beaucoup l’émission littéraire Vous m’en lirez tant diffusée sur les ondes de la Première chaîne le dimanche de 16h00 à 18h00 et animée par Raymond Cloutier. Mais peut-être n’y suis-je pas assez attentif car je viens tout juste de découvrir que Cloutier (aucun lien de parenté) tient un blogue, Motàmot, dans lequel il publie les billets lus à l’émission, ainsi que ceux qu’il livre à l’émission Tour de piste diffusée le jeudi soir. Cloutier y va de propos parfois décapants, mais toujours justes. J’ai bien apprécié son commentaire sur le brouhaha entourant les déclarations de Michel Tremblay et Robert Lepage, et je me permets un motàmot... «Des nuages gris, d’autres noirs, des traînées blanchâtres ici et là, et dessous un vent tournoyant. Et même si les vitres de mon bureau claquent parfois dans leurs cadres, j’ai la curieuse impression d’un temps plat, répétitif! C’est toute cette histoire autour des déclarations de Tremblay et de Lepage qui nous gâchent ce printemps, ces réactions virulentes à des propos très nuancés. Les artistes n’auraient de valeur en autant qu’ils marchent dans la parade!» En effet.
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15.4.06

Un blogue pour Michel C. Auger

Michel C. AugerUn bon coup pour le quotidien de Québec Le Soleil, soit l’ajout à son équipe du chroniqueur politique Michel C. Auger. «Je suis très heureux de me joindre à une équipe dont la tradition d'information se distingue par sa qualité et sa rigueur. Le volet Web représente en plus un défi très excitant qui s'inscrit dans l'avenir du journalisme», commente l’intéressé (voir le communiqué.) S’il parle de volet Web, c’est qu’il animera notamment dès lundi 24 avril un blogue sur la plate-forme Cyberpresse (adresse à venir). Bienvenue dans la blogosphère, Michel.
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Le prix des choses

La semaine dernière, le journaliste Seymour Hersh publiait dans les pages du New Yorker un article percutant sur les velléités présumées de George Bush de provoquer un «changement de régime» en Iran (voir The Iran Plans, traduction en français ici). Le prétexte serait l’enrichissement d’uranium par l’Iran, de l’uranium qui servirait à assembler des engins nucléaires. Mais pour porter un coup fatal au programme nucléaire iranien (s’il existe), les forces armées étasuniennes devront, selon Hersh et ses informateurs, utiliser elles-mêmes l’arme nucléaire, avec les conséquences que l’on suppose.

On lisait hier dans Libération que «L'Iran a décidé qu'il était un pays nucléaire, qu'il ne reviendrait jamais en arrière et a choisi de le faire le jour même de la visite à Téhéran de Mohamed le-Baradei, le chef de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA). C'est le président Mahmoud Ahmadinejad qui a fixé hier la ligne officielle dans une déclaration à l'agence officielle Irna.[...] Dès lors, la mission d'le-Baradei, venu pour convaincre les dirigeants iraniens de suspendre l'enrichissement d'uranium, semble de pure forme, d'autant qu'elle avait été précédée par l'annonce de la maîtrise de cette technologie.» (Voir Le-Baradei se heurte au mur du nucléaire en Iran.)

Disons que le président Ahmadinejad ne fait rien pour calmer les esprits. Le Monde rapporte que «Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, persiste et signe. Israël est condamné à "disparaître", a-t-il déclaré, vendredi 14 avril, à l'occasion d'une conférence que la République islamique organise pour la troisième fois, en solidarité avec le peuple palestinien.[...] Mahmoud Ahmadinejad reprenait ainsi un des thèmes favoris de ses discours depuis son accession à la présidence en août 2005. Israël doit être "rayé de la carte" et l'Holocauste est "un mythe", avait-il déclaré dès octobre 2005, totalement indifférent au tollé que ses déclarations avaient soulevé en Occident.» (Voir Le président iranien, Mahmoud Ahmadinejad, réitère ses "doutes" sur l'Holocauste.)

Et comme on sait qu’Israël dispose de l’arme atomique sans pour autant l’avouer, il n’y a rien de rassurant dans toutes ces tentatives d’intimidation de part et d’autre. Le 25 avril 2004, on lisait dans Le Matin que «Ariel Sharon, le Premier ministre israélien, reconnaît que son pays possède un programme d’armement nucléaire. C’est la première fois qu’un officiel de l’État hébreu confirme ce que la communauté internationale sait depuis quarante ans. Depuis que la France lui a fourni durant les années 1960 un réacteur nucléaire, tous les experts militaires étrangers s’accordent pour dire qu’il dispose de 100 à 200 ogives nucléaires.» (Voir Ariel Sharon confirme qu’Israël est une puissance nucléaire.)

Et puis l’Irak où la situation ne cesse de dégénérer, et on a assisté à une «révolte des généraux». Dans Le Monde, on lisait hier «Même à l'époque du Vietnam, l'armée américaine n'avait rien connu de tel. En quelques semaines, six généraux à la retraite, dont trois, jeudi 13 avril, ont réclamé la démission du secrétaire à la défense, Donald Rumsfeld. Le porte-parole de George Bush a réaffirmé que la confiance du président demeure "forte" envers son ministre, un homme qui a effectué "du bon travail" et conduit deux guerres, en Afghanistan et en Irak. Selon l'un des officiers, le général John Batiste, qui commandait la 1re division d'infanterie lors des opérations en Irak de 2004 à 2005, il ne s'agit en rien d'un mouvement coordonné. "Dans une démocratie, les officiers supérieurs ont une obligation de parler", a-t-il affirmé, jeudi, sur la chaîne de télévision publique PBS.[...] L'actuel chef d'état-major, le général Peter Pace, a répondu, mercredi, que les militaires "avaient eu et avaient toujours" toutes les occasions de donner leur avis. "Honte à nous si nous ne l'avons pas fait", a-t-il ajouté.» (Voir Six généraux réclament la démission de Donald Rumsfeld.)

Parlons maintenant du prix des choses. Je n’avais pas consulté depuis un certain temps le site Cost of War du National Priorities Project qui estime en temps réel le coût, pour les contribuables étasuniens, de l’opération irakienne. En ce 15 avril, on frôle les 275 milliards de dollars.

C’est un chiffre dont on a peine à mesurer l’ampleur réelle, une abstraction. Mais dans le concret, voici ce que l’on aurait pu réaliser avec cette somme.

Accorder à 13 250 000 étudiants une bourse d’étude de quatre ans dans une université.

Financer pour 11 ans le programme mondial de lutte contre la faim.

Financer complètement le programme mondial de lutte au SIDA pour 27 ans.

Assurer l’immunisation de base de tous les enfants de la planète pour 91 ans.

Ajoutons à ces 275 milliards le coût imposé aux autres États présents en Afghanistan et en Irak., et on atteint des sommes incroyables.

Et c’est aussi sans compter les 2 400 soldats étasuniens morts au combat, les 17 000 blessés, et les 35 000 victimes irakiennes civiles. (Voir Casualties in Iraq: The Human Cost of Occupation).

Et on songe à utiliser l’arme nucléaire contre l’Iran?
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13.4.06

L’ambiguïté perçue de la Loi sur l’imputabilité

Cette semaine, le gouvernement canadien a déposé le projet de loi C-2 devant modifier la Loi fédérale sur l'imputabilité. Le projet de loi modifie, entre autres, la Loi sur l'accès à l'information «afin d'ajouter à l'annexe I cinq hauts fonctionnaires, sept sociétés d'État et trois fondations, de rajuster en conséquence certaines dispositions relatives aux exceptions et d'ajouter de nouvelles exceptions et exclusions se rapportant à ces hauts fonctionnaires et sociétés d'État.» Parmi les sociétés d’État visées figure la Société Radio-Canada.

Radio-Canada, comme d’autres sociétés d’État, était exempte des dispositions de la Loi sur l’accès à l’information, et l’est toujours jusqu’à ce que le projet de loi C-2 soit adopté. Comme l’expliquait cette semaine l’ex-ministre reconvertie au journalisme Sheila Copps, «Par exemple, si Énergie atomique du Canada devait révéler tous ses coûts, cela pourrait compromettre ses ventes de réacteurs nucléaires à l’étranger. De la même façon, si Radio-Canada faisait concurrence à TVA pour obtenir de meilleures cotes d’écoute, divulguer ses coûts équivaudrait à mettre en danger tout son budget de programmation.»

Mais à lire le texte du projet de loi, on se rend compte que les nouvelles dispositions sont pour le moins ambiguës dans leur formulation. En son article 68.1, le projet de loi dispose que «La présente loi ne s'applique pas aux renseignements qui relèvent de la Société Radio-Canada et qui se rapportent à ses activités de journalisme, de création ou de programmation, à l'exception des renseignements qui ont trait à son administration.» Reconnaissons que le mot «administration» peut constituer un parapluie très large. Puis, en son article 69.1, que «La présente loi ne s'applique pas aux renseignements personnels que la Société Radio-Canada recueille, utilise ou communique uniquement à des fins journalistiques, artistiques ou littéraires.» Là aussi, la formulation est relativement floue et on se demande ce que peuvent comporter les dits renseignements.

Le cheminement d’un projet de loi comporte plusieurs étapes devant mener à son adoption : dépôt et première lecture; deuxième lecture; étude en comité; étape du rapport; troisième lecture, et ce devant les deux chambres (Communes et Sénat).

Il sera intéressant de voir à l’étape d’étude en comité si ce dernier fera appel à des témoins, et si la SRC exercera des représentations pour continuer d’être soustraite à la Loi sur l’accès à l’information, sachant que la haute direction tient énormément à ce statut d'exception.
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11.4.06

De plogues, blogues et autres choses

J’ai été assez absent de mon blogue ces derniers temps, et je me sens plutôt en phase avec ce qu’écrivait Lise Ravary il y a quelques jours, à savoir «Pas grand chose à dire ces jours-ci. Et comme ma mère me le disait, quand tu n'as rien à dire, ne rate surtout pas l'occasion de te taire.»

J’ai reçu quelques courriels pour plus ou moins critiquer (gentiment) quelques «plogues» récentes (comme Partir ou mourir, ou Désobéir). Juste pour ne pas perdre la main, j’ai récidivé.... Précisons ici que par souci de transparence j’ai toujours mentionné mes liens professionnels avec les producteurs de ces documentaires, que rien ne m’oblige à signaler leur diffusion ou leur projection, mais que je suis fier d’être associé à ces productions de haut niveau. Alors, pourquoi ne pas en parler?

S’éloigner de son blogue comporte certains risques, comme celui de se voir scooper certaines informations. Et parlant de plogues, eh oui, même sur ce terrain j’ai été scoopé, et deux fois plutôt qu’une.

Grands communicateursD’abord, par Philippe Martin qui m’a ravi la primeur de vous informer de la conférence que j’aurai le plaisir de livrer le 26 avril prochain dans le cadre des soirées des Grands communicateurs. Le thème sera De Cybérie jusqu’au blogue : exploration du cyberespace. Ça se tiendra à l’auditorium de la TÉLUQ à Montréal, par vidéoconférence avec les locaux de la TÉLUQ à Québec, et aussi par webcast (par le biais d'une adresse URL qui vous est communiquée après réservation).

En plus de parler de l’expérience des Chroniques de Cybérie, j’aborderai les questions de la presse en ligne initialement boudée par les médias traditionnels; de l'émergence de nouvelles préoccupations citoyennes (vie privée, protection des données personnelles, droit d'expression); des modèles économiques (publicité, contenus payants ou formules hybrides) qui restent toujours à trouver; de la convergence des médias et de la récupération d'Internet; et bien sûr de l'arrivée dans le paysage des blogues.

Je me suis aussi engagé à participer, le 6 mai prochain, à un atelier à l’occasion du congrès annuel de l'Association des journalistes indépendants du Québec (AJIQ). Et là, je me suis fait scooper par le collègue Nicolas Langelier qui lui aussi participera à cet atelier. Au programme: quel avenir pour les médias en ligne; le blogue est-il un bon outil journalistique; la page Web ou le blogue personnels, des indispensables?

C’est gentil, Nicolas, de souligner notre présence à cet atelier, mais en me qualifiant de «vénérable», tu ne trouves pas que tu y vas un peu fort ;-)? Dans mon Grand Bob, je me retrouve peu dans les significations proposées pour cet adjectif...

Et voilà, d’ici le prochain scoop, portez-vous bien.
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Ceux qui n’en meurent pas...

Ceux qui n'en meurent pas...Projections du plus récent film de Robert Cornellier, «Ceux qui n’en meurent pas laissent toute espérance». Bhopal, Tchernobyl, Exxon Valdez… Trois noms devenus mythiques, trois des pires catastrophes technologiques que l’humanité ait connues. Dans la nuit du 3 décembre 1984, une fuite de gaz à l’usine Union Carbide de Bhopal en Inde fait plus de 8 000 victimes. Le 26 avril 1986, le réacteur no. 4 de la centrale nucléaire de Tchernobyl explose, dégageant un nuage radioactif qui va s’étendre sur des milliers de kilomètres. Le 24 mars 1989, le pétrolier Exxon Valdez s’échoue près des côtes de l’Alaska, causant un très grave désastre écologique. «Ceux qui n’en meurent pas laissent toute espérance» revisite les lieux de ces drames et se penche sur les histoires tragiques et l’intense soif de justice des victimes encore vivantes. Projections le mercredi 12 avril,  au Cégep de St-Laurent (Montréal); en collaboration avec Greenpeace Canada le mardi 18 avril à la Cinémathèque québécoise (Montréal), puis dans le cadre des Ciné-rencontres ONF/Télé-Québec à la bibliothèque Gabrielle-Roy (Québec) le mercredi 19 avril. Pour info : (514) 521-8303, poste 201. Le film, produit par la maison de production Macumba International (pour laquelle je travaille) dans la série eXtremis sera aussi diffusé à l’antenne de Télé-Québec le lundi 24 avril 2006 à 21h00 (rediffusion jeudi 10h00 et samedi 14h00).
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