31.3.05

Parlez-moi d’amour...

Le moteur de recherche BlogPulse dans un de ses billets sur les faits saillants dans la blogosphère souligne qu’avant son décès, et depuis le 18 mars, Terry Schiavo était le nom le plus souvent cité dans les blogues. L’épisode semble avoir été douloureux pour les blogueurs qui ont choisi de s’exprimer sur cette affaire, qu’ils aient été d’un côté ou de l’autre du débat.

Peut-être pour alléger un peu le discours, l’équipe de BlogPulse a consulté ses données pour savoir quels sentiments revenaient le plus fréquemment dans les billets des blogueurs. Il semble que depuis octobre 2004, l’amour (love) l’emporte haut la main, atteignant un pic de plus de 20 % au début du mois de décembre, alors que la haine (hate) ne dépasse jamais le 7 % des billets (début novembre). Pour ce qui est de la passion, elle semble quasi absente du discours, ne franchissant jamais depuis octobre 2004 la marque de 1 %.
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Blogues et médias : un débat

Alors qu’une bonne partie des médias traditionnels (MT) est toujours en phase de déni de l’importance des blogues, l’agence de presse Reuters tiendra le 5 avril prochain à New York un débat sur le sujet. Selon le communiqué émis par Reuters, on explorera plusieurs questions, à savoir si les blogueurs sont des journalistes et s’ils devraient bénéficier des mêmes droits habituellement consentis aux membres de la presse. En outre, on entend aborder le sujet de l’imputabilité des blogueurs face à leurs dénonciations de grandes figures des MT, et de la place des blogues dans le discours politique.

Parmi les personnes invitées à cet échange, notons Jay Rosen, professeur de journalisme à l’université de New York et spécialiste des blogues et des médias (PressThink), Bryan Keefer qui est co-auteur de l’ouvrage All the President's Spin: George W. Bush, the Media, and the Truth, chef adjoint de la rédaction du CJR Daily (revue de presse de l’école de journalisme Columbia) et aussi co-fondateur du défunt site de veille en relations publiques Spinsanity, le chef de la rédaction du blogue journalistique FishBowlDC Garrett Graff, Dave Winer de Scripting News, et John Fund du Opinion Journal.

Je doute que Reuters fasse un compte rendu du débat, mais on trouvera à coup sûr dans les blogues ou médias des participants un résumé des échanges.
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25.3.05

BlogPulse : le pouls du Web

BlogPulseQu’est-ce qui bouge dans les blogues aujourd’hui? On n’a qu’à consulter BlogPulse pour s’en faire une idée. BlogPulse est le fruit de la technologie de la société Intelliseek qui se spécialise dans l’information commerciale. C’est à la fois un moteur de recherche (9,3 millions de blogues), un service de décryptage des tendances, un outil d’analyse et une veille des nouveautés technologiques.

Le moteur de recherche est très performant, mais unilingue anglais, c’est-à-dire que même s’il indexe les blogues francophones, il n’accepte pas les mots clés de recherche contenant des lettres accentuées ou autres caractères propre au français. Le mode de recherche avancée est lui aussi très efficace.

L’analyse des tendances permet de voir d’un coup les sujets qui sont traités sur les blogues au cours d’un mois, classés par catégories (actualités générales, politique, science et technologie, etc.). Pour les amateurs de rétrospectives, on dispose d’archives remontant à mai 2004.

Autres fonctions intéressantes, Key People dresse le palmarès quotidien des noms le plus cités et des «étoiles montantes» (archives depuis le 24 janvier), et Key Phrases, soit les expressions les plus utilisées. Aussi, tout comme Blogdex et Daypop, BlogPulse recense les liens les plus cités.

Bref, sauf pour le problème des mots clés en français, BlogPulse s’avère un moteur de recherche dans les blogues fort efficace.
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24.3.05

Affaire Schiavo

Je n'entends plus que ton silenceAlors que l’affaire Schiavo déchire l’opinion publique aux États-Unis, seulement une note pour rappeler le roman Je n'entends plus que ton silence de Laurent Laplante publié aux Éditions JCL le mois dernier. Le résumé, par l’éditeur :

«À la suite d’un accident de la route, Julie sombre dans un coma profond.[...] Il se souvient avoir souvent eu des discussions avec sa femme sur le vieillissement et la mort. Lui entretient depuis toujours des pensées suicidaires, mais il a promis à son épouse de ne pas la quitter volontairement et a tenu parole jusqu’à ce jour. Elle, au contraire, tenait à la vie, mais elle ne voulait pas entendre parler d’un état de dépendance humiliante. Julie avait d’ailleurs fait promettre à son mari de la faire disparaître si jamais son existence n’en était plus une.

Mais maintenant qu’elle est enfermée dans le silence, la communication est impossible entre celui qui veut demeurer fidèle à sa promesse et celle qui est à jamais privée de conscience. L’engagement contracté par Jean-Philippe tient-il toujours? Le meurtre devient-il plus acceptable s’il ressemble à un geste d’amour? Et, d’un autre côté, sommes-nous sincères et lucides lorsque nous déclarons que nous préférerions mourir plutôt que de mener une vie diminuée?

Un roman qui atteint les recoins les moins souvent visités de notre conscience et que l’on préférerait ne pas avoir à trop remuer.»
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23.3.05

La méthode essai/erreur

J’aime bien, quand j’en ai le temps, fouiller un sujet et partager mes trouvailles. C’est là un des grands plaisirs de bloguer, cette notion de partage. Benoit Bisson de Blog Café s’est adonné à l’exercice en examinant le degré de conformité aux normes Web de sept médias francophones en ligne.

codesL’exercice se fait à l’aide de l’outil de validation du Worldwide Web Consortium (W3C). On saisit l’adresse d’une page d’accueil ou d’un site, et on obtient une évaluation de la conformité aux normes. Pourquoi ces normes? «Tout simplement faciliter la tâche des concepteurs Web en leur donnant le moyen de créer facilement des pages Web qui seront rendues de façon similaire sous tous les fureteurs» nous rappelle Bisson.

D’emblée, après validation avec l’outil du W3C, disons que la page d’accueil du blogue de Benoit Bisson, Blog Café, comporte quatre erreurs. Ma page d’accueil en compte 114. Et je prends bonne note quand il dit que «certains auraient eu intérêt à passer la saison hivernale à suivre des cours de design, de CSS, de XHTML et de HTML!»

Par contre, les résultats de sa recherche sur sept sites de médias francophones sont effarants, surtout quand on tient compte qu’ils sont conçus et mis en ligne par des équipes de professionnels. Un site impossible à valider (Radio-Canada) car il ne «définit pas l'encodage de caractères contenus dans la page. Impossible donc pour l'outil de validation de savoir quels sorte de texte on est sensé y trouver.» Le plus respectueux des normes (MSN-Sympatico) compte quand même 79 erreurs de code. Mais on s’étonne qu’un grand quotidien français qui vient de refaire son site laisse passer 199 erreurs, qu’on en trouve respectivement 304 et 718 sur deux quotidiens québécois, et qu’un grand portail d’info remporte le grand championnat avec... 2 288 erreurs. Tous les détails sur Blog Café.

Les questions soulevées par Bisson sont importantes à maints égards. On a tous fait l’expérience de consulter des sites «optimisés» pour une plate-forme ou un fureteur, pratique qui s’éloigne de l’universalité que l’on souhaite pour le Web. L’arrivée du fureteur Firefox vient briser le monopole d’Internet Explorer (sur lequel Bisson offrira sous peu des commentaires) et remettre la notion d’optimisation à l’ordre du jour. Bref, si on tient à parler à tous, il faudrait bien utiliser le même langage, et les normes du W3C sont en quelque sorte l’espéranto du Web.

Il sera intéressant de voir le suivi de Bisson de ce dossier, car il nous promet d’y revenir d’ici la mi-avril. Pour ma part, moi qui croyais prendre le dessus dans cette guerre que me mène le temps, je viens de me rendre compte qu’il me reste quelques campagnes à mener.

Et j’irai probablement consulter plus souvent l’Atrium Web de Normand Lamoureux qui oscille entre langue française et code HTML.

Mise à jour : 28 mars

La liste s’allonge. «Après un premier billet sur le sujet, j'ai poursuivi mon survol des sites des médias et portails francophones à la poursuite de la perle rare: le site qui validerait sous les standards du World Wide Web Consortium (W3C). Après 20 sites couverts, je la cherche toujours...»
Benoit Bisson
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22.3.05

De Cambridge

André BoisclairFort sympathique ce blogue De Cambridge que tient depuis peu André Boisclair, ancien ministre québécois de l’Environnement et maintenant en période d’étude à Harvard. Et quelle meilleure occasion pour vous en parler, hormis que le blogue soit de facture récente, que cette Journée mondiale de l’eau, élégamment soulignée par Google d’ailleurs. C’est que André Boisclair est celui qui a doté le Québec de sa première Politique nationale de l’eau. La démarche avait été entreprise par son prédécesseur Paul Bégin qui, en octobre 1998, mandatait le Bureau d’audiences publiques sur l’environnement (BAPE) la tenue d’une consultation publique sur la gestion de l’eau au Québec. C’était bien sûr à l’époque où le ministère de l’Environnement ne risquait pas de perdre son nom, ne fut-ce que pour quelques jours, et où les tenants de la privatisation de l’eau ne formaient pas le gouvernement. Mais ça c’est autre chose.

Parlons blogue. C’est une présence en ligne raffinée que s’offre André Boisclair, bien que normalement les textes clairs sur fond sombre ne m’incitent pas à lire très longtemps. Pourquoi ce Blogue? D’écrire l’intéressé : «Depuis mon départ de Montréal, je vis une expérience fantastique. Pourquoi donc ne pas partager quelques impressions avec vous? Vous trouverez dans ce blog plusieurs informations sur ma vie d'étudiant à Harvard, mes cours, mes lectures, mais surtout une atmosphère, un état d'esprit que je souhaite partager. Je projette de faire de ce lieu un lieu de transmission d'idées, d'impressions. Je dis d'impressions parce que souvent j'écrirai à grands traits, sans nuances. Parfois, je m'expliquerai davantage. Je prends avec joie le risque de créer, de partager. Les opinions exprimées ici ne sont donc pas définitives, elles sont en développement.»

Et même à ses débuts, Boisclair se paie une pirouette en bloguant de son cellulaire un billet audio, «à pied, sur Massachusetts Avenue en direction de la bibliothèque de l’école pour ce soir étudier en vue de mon dernier examen de session de mardi prochain...». Très décontracté, non? Ce qu’on apprécie c’est que ce blogue est réalisé dans les régles de l’art, les photos sont optimisées Web, le billet audio en MP3 ne «pèse pas une tonne».

Même si le blogue est jeune, il contient déjà des textes intéressants sur les relations Québec/États-Unis, la difficulté de l’apprentissage, un fichier audio de conférence de l’ex-secrétaire à la Défense sous les Présidents Kennedy et Johnson, 1961/1968, Robert McNamara (en passant, vous avez vu The Fog of War, Oscar du meilleur documentaire en 2003?), les notions de leadership de Ron Heifetz... bref, déjà un menu copieux.

Tout comme l’homme, c’est efficace et sans prétention. À consulter régulièrement.
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16.3.05

Irak : deux ans après

Dan Bigras, 12 avril 2003Le Collectif Échec à la guerre annonce la Journée mondiale d'action qui aura lieu, samedi le 19 mars, deux ans après l'invasion illégale des États-Unis en Irak, pour condamner la guerre qui s'y poursuit et pour exiger le retrait des troupes d'occupation. Des actions auront lieu dans 28 villes au Canada et dans plus de 360 villes aux États-Unis. Pour citer Dan Bigras qui était présent à la conférence de presse, «Ça continue, puis c’est laid.» À Montréal, la manifestation partira du Carré Dorchester, l'intersection des rues Peel et René-Lévesque, pour se rendre au Consulat des États-Unis puis au Complexe Guy-Favreau. (Photo : Dan Bigras, à la manifestation du 12 avril 2003.)
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15.3.05

L’état de la blogosphère

David Sifry, entre autres fondateur de Technorati (moteur de recherche dans les blogues), dresse depuis deux jours sur son blogue personnel l’état de la blogosphère largement basé sur des données issues de Technorati.

Son article sur la croissance des blogues nous apprend que son moteur de recherche suit 7,8 millions de blogues et 937 millions de liens. Ces chiffres représentent le double du volume de blogues et liens que Technorati suivait à la piste il y a seulement cinq mois (octobre 2004). La tendance n’est pas près de s’estomper selon Sifry qui estime qu’il se créée en moyenne entre 30 000 et 40 000 nouveaux blogues chaque jour (15 000 en octobre dernier).

Il y a cependant un bémol à ces chiffres. Un nombre difficile à déterminer de nouveaux blogues seraient créés par des robots pour constituer à terme des «link farms», des concentrations artificielles de liens. Le but est de tromper les moteurs de recherche qui établissent la hiérarchie de leurs résultats en fonction du nombre de liens qui pointent vers un site. Si la concentration des liens réussit, le moteur attribue une valeur prioritaire au site cible vers lequel tous ces liens pointent, et l’adresse de ce site se classe parmi les premiers résultats. Sifry estime qu’environ 20 % des pings qui servent à repérer les mises à jour de blogues proviennent du «linkfarming». En revanche, comme ces intrus sont concentrés sur un nombre limité d’adresses IP, ils sont facilement repérables et exclus des résultats sur Technorati.

Graphique: TechnoratiLe deuxième article de Sifry porte sur le volume de billets publiés. En moyenne, Technorati enregistre 500 000 nouveaux billets par jour, soit 5,8 à la seconde. En octobre dernier, le nombre quotidien de nouveaux billets s’établissait à 400 000. Il y a donc eu diminution relative du nombre de billets publiés après la présidentielle étasunienne, mais avec des pics importants autour d’autres événements ailleurs dans le monde. Environ 40 % des billets pistés par Technorati sont de langues autres que l’anglais, c’est donc un portait de la blogosphère planétaire.

Demain, Sifry examinera la différence entre blogues et médias traditionnels dans les flux d’intérêts, et quels sont les sites de MT les plus référencés. À suivre sur le site de son site.

Mise à jour, 20 mars

MT et bloguesDans la troisième partie de son analyse des blogues, David Sifry se penche sur les sites les plus influents du Web, ceux vers lesquels les blogueurs pointent en inscrivant un lien. On ne s’étonne pas de voir que les sept premières places sont occupées par des médias traditionnels (en bleu) et par un babillard Web, soit Slashdot. On notera au passage que si ce dernier était classé comme un blogue en octobre 2004, Sifry le classe maintenant comme un MT. Il y a peu de changement dans ce classement si on le compare aux chiffres d’octobre 2004. Par contre, constate Sifry, les blogues dits «influents» consolident leur place (en rouge), ce qui pourrait laisser croire à la création d’un noyau fort auquel n’auraient pas accès les nouvelles voix. Pas tout à fait vrai, selon Sifry, qui constate des blogues de confection récente dans le Top 100 de Technorati.
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14.3.05

L’état du monde des médias étasuniens

Le Project for Excellence in Journalism vient de publier The State of the News Media 2005, son rapport annuel sur l’état du monde des médias aux États-Unis. Soulignons cinq tendances énoncées dans ce rapport.

Plusieurs modèles de journalisme cohabitent, les entreprises modestes ont le vent dans les voiles. La sélection des sources d’informations en fonction de ses propres opinions est grandement exagérée. Pour s’adapter, le journalisme devra devenir plus spécialisé, plus transparent, mais aussi élargir son éventail d’intérêts. Les médias traditionnels investissent peu pour conquérir de nouveaux auditoires. Les salles de rédaction des trois grandes chaînes de télévision font face à la plus importante transition depuis des décennies.

Vu l’ampleur du document, je reviendrai sur ce sujet un peu plus tard, question de bien en prendre connaissance.
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12.3.05

Blogueurs ou journalistes?

Au moment où la société Apple obtient d’un tribunal un jugement forçant trois blogues à dévoiler leurs sources après avoir publié un article dévoilant les détails techniques d’une nouvelle interface audio (voir le billet du 13 janvier, la notion de blogueurs/journalistes revient au centre de débats.

Yves Adaken écrit dans L’Expansion : «Un tribunal de première instance a en effet refusé d'étendre aux sites web les protections constitutionnelles et légales qui permettent à des journalistes de ne pas divulguer le nom de leurs informateurs. Autrement dit, à l'aune de ce jugement, aucun blog, et peut-être au delà aucun site web, ne pourrait être considéré comme un journal! Un de ces blogs, Think Secret, a immédiatement répliqué en poursuivant Apple pour atteinte au premier amendement de la constitution américaine, qui protège la liberté d'expression, notamment pour les journalistes free lance.[...] A partir de là, la démarche d'Apple ressemble assez à un combat d'arrière-garde. Et la décision de la juge de première instance, soumise à appel, illustre assez le trouble que provoque l'irruption de ces nouveaux acteurs dans le paysage médiatique.»

Blogueurs ou journalistes?

Un point de vue intéressant, celui de Danah Boyd qui estime qu’on ne pose pas la bonne question. «Nous devons cesser de nous demander si les blogueurs sont des journalistes, et plutôt tenter de voir si le journalisme peut se prêter aux blogues.»
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Réplique de François Cardinal

En réponse à certaines critiques (dont les miennes) à l’égard de son éditorial sur les blogues, François Cardinal réplique. Courtoisie de Michel Dumais, le texte intégral de l’édito en question.

Aussi à souligner un défi lancé par Clément Laberge : «Et tiens, pourquoi ne pas lancer un défi à La Presse? On détermine un sujet, on le confie à un journaliste qui réalise un dossier « comme s'il devait être publié ». On réserve le dossier. Aussitôt qu'il est terminé, on annonce le sujet qui avait été retenu (sans publier le texte) et on fait appel aux internautes pour documenter le sujet et accompagner le journaliste dans la réalisation d'un dossier. Une seconde série de textes est écrit à partir de ces matériaux et La Presse publie les deux dossier pour permettre la comparaison. Lequel sera le meilleur à votre avis? On fait le test?»
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Qui lit les blogues?

L’agence Blogads qui se spécialise dans le placement publicitaire sur les blogues anglo-saxons vient de publier les résultats d’un sondage mené en ligne auprès des lecteurs de blogues qui indiquent une certaine évolution du lectorat par rapport aux résultats de l’an dernier.

Par exemple, le créneau d’âge le plus représenté est celui des 31 à 40 ans (24,5 %). L’an dernier 61 % des lecteurs de blogues étaient âgés de plus de 30 ans, cette année c’est 75 %. Le lectorat est principalement masculin (75,5 %), le secteur professionnel le plus important est celui de l’éducation (10 %), et l’allégeance politique est démocrate (39,3 %) dans le contexte étasunien.

Les lecteurs de blogues lisent aussi la presse imprimée, dont The New Yorker (17,9 %), The Economist (12,1 %), Newsweek (11,2 %), Atlantic Monthly (11,1 %), The Wall Steeet Journal (10,4 %). La moitié des lecteurs estiment que l’information et les points de vue exprimés sur les blogues sont très utiles, viennent ensuite les journaux en ligne (19 %) et la radio (16 %). À savoir combien de blogues sont consultés chaque jour, 52,8 % disent en consulter cinq ou moins, et 16 % avouent y consacrer dix heures par semaine.

Autres données : 79,3 % n’ont pas leurs propres blogues, 75,3 % disent lire les blogues pour trouver de l’information qu’ils ne trouvent pas ailleurs et 74,6 % pour des points de vue différents des médias traditionnels. Le RSS tarde à s’imposer, 16,5 % des répondants l’utilisent à l’occasion, 7 % souvent, et 4,6 % toujours.

Ces données recoupent en gros les résultats d’autres enquêtes, comme celle du Pew qui établissait l’adoption du RSS par 5 % des utilisateurs.

Une des constatations importante pour Blogads, qui rappelons-le est une agence de publicité, est l’influence des lecteurs de blogues sur l’opinion publique : «Les nouvelles les plus intéressantes sont contenues dans la section 8. Les personnes au fait du jargon des relations publiques reconnaîtront dans cet ensemble de questions les caractéristiques par lesquelles on détermine qui est un faiseur d’opinion, qui fait partie du 10 % de la population qui influence l’opinion de l’autre 90 %.[...] Il est clair que la blogosphère est très fréquentée par ces faiseurs d’opinion.»

Du point de vue commercial, on le comprend, Blogads cherche à «vendre» le profil du lectorat des blogues à ses clients. En revanche, les constatations relatives au grand nombre de faiseurs d’opinions qui consultent les blogues renforce la notion de poids politique et social des blogueurs.

Personnellement, j’ai bien hâte que Léger Marketing et le CEFRIO accordent un peu d’attention au phénomène blogue au Québec.
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6.3.05

Journalisme participatif : culture ou masse critique?

Si on est témoins de certains exemples du potentiel du journalisme participatif, force est de constater qu’ils se limitent pour le moment à la blogosphère anglo-saxonne. C’est l’essentiel d’une analyse de l’affaire Gaymard en France par le journaliste Tarik Krim, Le traitement de l’affaire Gaymard montre la limite des blogs.

Dans Editor & Publisher, une publication spécialisée en journalisme, le chef de la rédaction Greg Mitchell revient sur un de ces exemples récents de journalisme participatif, le Gannongate, dans son texte Inside The 'Gannon' Case: How Blogs Broke It Wide Open . Bref rappel de l’affaire : certains blogues d’actualité à large rayonnement ont mobilisé des centaines de leurs lecteurs pour faire la lumière sur un faux journaliste et une fausse agence de presse qui recevait un traitement privilégié de la Maison-Blanche.

Sceptique sur la question du journalisme participatif, Mitchell dit avoir suivi l’évolution du Gannongate depuis le premier jour et être étonné des résultats plus que probants de cette forme de journalisme distribué. «C’est certain que dans la blogosphère il y a encore beaucoup de recherche boiteuse et de commentaires gratuits ou offensants. Mais ce qui m’étonne le plus c’est la quantité de ressources que les blogues à grande diffusion (par opposition aux blogues plus modestes) peuvent mettre à contribution dans une affaire comme celle-ci.»

Selon Mitchell, la raison pour laquelle les organismes de presse ne peuvent réussir des coups d’éclat comme la Gannongate relève de leur timidité à se lancer dans de telles opérations, mais aussi de l’ampleur des ressources qu’elles nécessitent. Pour rivaliser avec les blogues, une chaîne comme Gannett devrait affecter à son journal USA Today l’équivalent d’une salle de rédaction locale au complet.

Revenons à l’affaire Gaymard. Tarik Krim se dit déçu de l’absence des blogues dans cette affaire : «Non seulement le traitement de cette affaire est une vraie victoire pour la presse traditionnelle (aucun scoop lancé par un blog), mais il démontre que l’influence du numérique sur la politique intérieure en France reste anecdotique.[...] Je remarque simplement que le blog en France n’est pas un blog d’investigation, pas un blog d’opinion, juste un blog de commentaire, sorte de chambre d’écho des médias classiques et de l’information. Le blog arrivera-t-il à casser un tabou et se faire une place dans le débat politique en France?» On pourrait tirer les mêmes conclusions, et se poser les mêmes questions au Québec.

Est-ce une question de culture des médias qui explique que le journalisme participatif fonctionne aux États-Unis et ne semble pas décoller en Francophonie? On pourrait en douter. Il s’agirait davantage selon moi d’un problème de masse critique de l’auditoire des blogues francophones.

La démographie n’arrange rien, certes. Les populations francophones combinées de la France, de la Belgique, de la Suisse et du Québec arrivent à peu près au tiers de celle des États-Unis. Le taux de branchement des États francophones, bien qu’il soit toujours en hausse, est légèrement inférieur à celui des États-Unis. Remarquons aussi la nature «nationale» des dossiers dans lesquels les blogueurs étasuniens se sont investis. Si la comparaison vaut pour les pays francophones, cela signifie que les Français blogueraient sur les dossiers français, les Suisses sur les dossiers suisses, les Québécois sur les dossiers québécois. Il y aurait donc fragmentation et des efforts, et de l’auditoire.

Or, aux États-Unis, il y a les facteurs linguistique et national qui permettent d’atteindre une masse critique. Par exemple, le blogue Daily Kos, un de ceux qui a mené la charge dans le Gannongate, enregistre plus de 350 000 visites par jour, pour plus de 465 000 pages vues (voir les statistiques.) Peu de blogues ou même de sites d’actualité francophones atteignent cette masse critique qui permet de lancer un chantier de journalisme participatif.

Mais l’expérience du journalisme participatif reste à suivre. Reconnaissons que le phénomène est très récent et que l’articulation de ses processus relève toujours de l’expérience/erreur. Qu’on pense ici, au Québec, au scandale des commandites, au CHUM ou aux PPP, ce ne sont tout de même pas les sujets qui feraient défaut.
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4.3.05

Écrire pour ne rien dire

Dans son édition du 3 mars, le quotidien montréalais La Presse publiait en page éditoriale un texte de François Cardinal intitulé «Bloguer pour ne rien dire» (les éditoriaux de La Presse ne figurent pas dans son site Web). Selon mon dictionnaire, un éditorial est un «article qui émane de la direction d'un journal, d'une revue et qui définit ou reflète une orientation générale (politique, littéraire, etc.)». Je ne connais pas François Cardinal, mis à part quelques articles que j’ai lus et qui traitaient des affaires municipales. La publication d’un de ses articles sur les blogues en page éditoriale signifie-t-elle que son opinion reflète l’orientation de La Presse sur le sujet? Je l’ignore.

Chose certaine, il n’y est pas allé de main morte pour descendre en flammes la mouvance blogue et tout ce qui s’y rattache. Il a évidemment droit à ses opinions, personne ne le contestera. Il devrait toutefois, à tout le moins, vérifier les faits qu’il soumet pour les appuyer.

Cardinal écrit : «Alors qu’on dénombrait une vingtaine de blogues au tournant du siècle, il en existe aujourd’hui plus de cinq millions.» Parlant de tournant du siècle, sans trop s’enfarger dans les dates, j’aimerais lui rappeler que dans une de mes chroniques publiée le 17 octobre 2000, j’écrivais «dans un bon moteur de recherche, le mot rapporte plus de 200 000 résultats».

Autre erreur de fait, il écrit : «On rétorquera que l’on doit aux blogueurs plusieurs coups fumants. Ce sont eux qui ont lancé l’affaire Lewinsky...». Pour l’histoire, précisons que l’affaire Lewinsky a été lancée par Matt Drudge en 1998, bien avant l’arrivée des blogues. Drudge ne saurait être considéré comme un blogueur, ni dans le fond, ni dans la forme. De plus, il n’a fait que révéler que le magazine Newsweek détenait des détails sur cette affaire, mais se refusait à les publier. Drudge ne s’est pas embarrassé de tels scrupules, et a publié les quelques faits dont il disposait, sans trop approfondir l’histoire. Une fois qu’il l’eut fait, le Washington Post et la chaîne ABC se sont intéressés à l’affaire qui circulait déjà dans les corridors des rédactions. Puis, l’ensemble des médias ont suivi. Voir à cet égard Competitive Instinct vs. Journalistic Principle de Gene Foreman.

Concernant l’information qui circule sur les blogues, il parle également «de rumeurs comme la présence d’un souffleur électronique dans le dos du président Bush lors d’un débat avec son rival.» Pour avoir suivi de près ce dossier, j’aimerais dire que la possibilité du recours à un souffleur électronique a été confirmée par un scientifique de la NASA spécialiste en imagerie numérique, et par un spécialiste en télécommunication qui a même précisé le modèle de souffleur électronique dont dispose la Maison-Blanche. De plus, si le New York Times qui a sabordé un article qui aurait pu changer l’issue de l’élection parce que, justement, il aurait pu changer l’issue de l’élection, avait confié la rédaction et la recherche de l’article à trois de ses journalistes scientifiques, on était loin d’une simple rumeur.

Pour en terminer avec les erreurs de faits, Cardinal paraphrase le directeur du Project for Excellence in Journalism selon qui «les blogues doivent être pris pour ce qu’ils sont : l’équivalent de la machine à café, c’est-à-dire l’endroit où les gens discutent de manière informelle de tout et de rien. Rien de plus.» Il convient ici de noter que le nom du directeur du PEJ est bien Tom Rosenstiel, et non Rosentiel comme l’écrit Cardinal. Et tant qu’à citer Rosenstiel, «Un journaliste tente de dire la vérité et de vérifier les faits...» (Boston Globe, 26 juillet 2004.

Cela dit, ce qui déçoit c’est l’attitude de Cardinal face aux blogues. Ceux qui croient en une véritable révolution sont «certains exaltés du Net». «Le contenu d’un blogue, lui, ne peut être défini tant il est hétéroclite. On peut y trouver des journaux intimes autant que des revues de presse, des chroniques d’humeur ou des recettes culinaires.» Et en quoi ceci serait-il un mal? Ne peut-on constater un hétéroclisme dans les journaux, périodiques et chaînes de télévision?

«Premier défi : trouver des sites d’intérêt. [...] Deuxième défi : trouver des blogues sérieux et crédibles.» Là, c’est vrai, ça devient un peu plus difficile. Mais de là à dire que c’est impossible... S’il est vrai que «le Google des blogues se fait toujours attendre» comme l’écrit Cardinal, l’attente ne devrait pas se faire trop longue, et on se rapproche de certaines solutions avec Turboscout dont j’avais le plaisir de traiter dans ces pages.

Autre affirmation : «Disons qu’on est loin du jour où les grands médias disparaîtront au profit de ces médias alternatifs.» Cette phrase intervient dans le texte de Cardinal après une référence à Dan Gillmor et son livre We the Media. Il est évident que Cardinal n’a pas lu Gillmor. Ce dernier n’affirme pas, pas plus que Jay Rosen, Steve Outing, Rebecca MacKinnon ou les autres communicateurs qui réfléchissent à l’avenir des médias que les médias traditionnels (MT) disparaîtront du paysage pour laisser place aux blogues. On parle de changement, de transformation, d’adaptation des MT. Faut-il rappeler que la radio n’a pas entraîné la disparition des journaux, la télévision celle de la radio ou du cinéma, etc., etc.

Décevant, cet article (ou éditorial). Si c’est là un exemple de la réflexion qu’un quotidien à fort tirage a à présenter au public, on ne s’étonnera pas qu’une partie de son lectorat aille chercher ailleurs ses balises pour comprendre ce qui est en train de se passer dans les médias.
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