8.1.05

Mise à jour

Seulement pour signaler une mise à jour, disons plutôt une réorganisation, de la page de répertoire des blogues. Lorsque cette page a vu le jour, en février 2002, le monde des blogues était bien différent, moins thématique et plus personnel; la formule se cherchait. J’avais donc commencé un classement par noms d’auteurs, et ce sans égard à la langue. On vit ensuite arriver des blogues collectifs, les catégories et les thèmes se préciser, et un plus grand nombre de blogues francophones. La page a donc été réorganisée, structurée en dix catégories, réparties entre blogues francophones et anglophones, ce qui je l’espère en facilitera la consultation.

Ce n’est pas un répertoire exhaustif, certes, mais une sélection de blogues que je consulte régulièrement ou périodiquement. Pour ceux et celles qui voudraient inscrire leurs blogues dans un répertoire, je suggère de le faire sur des moteurs de recherche ou auprès des sites spécialisés comme Blogonautes. FR_BLOG ou encore pour le Québec Québéblogues, ou plus spécifiquement de Montréal, YULBlog.
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Le singulier parcours de Chris Allbritton

Chris AllbrittonAlors qu’on parle à profusion de nouveaux modèles journalistiques et qu’on débat des formes qu’ils pourraient prendre, examinons le singulier parcours de Chris Allbritton, un ancien de l’Associated Press et du New York Daily News qui en est à son troisième séjour en Irak depuis le début des hostilités et qui anime le blogue Back to Iraq.

En juillet 2002, Allbritton effectue à ses frais un séjour de reportage d’une semaine au Kurdistan irakien, province aux velléités sécessionnistes, théâtre d’exactions perpétrées par les forces militaires de Saddam Hussein. Le 12 septembre, George Bush lance l’ultimatum aux Nations Unies de faire appliquer ses résolutions contre l’Irak, sinon les États-Unis interviendront. Les choses se corsent, et Allbritton tient à retourner au Kurdistan. Le 2 octobre 2002 il écrit sur son blogue : «Je veux retourner en Irak. Si les gens me font des dons (j’ai établi un compte PayPal), j’irai et je publierai mes articles et des reportages photographiques sur le Web [...] ce sera l’occasion d’appuyer le journalisme indépendant.»

Le projet stagne, Allbritton continue d’écrire depuis New York des articles et analyses sur la situation irakienne vue des États-Unis. Printemps 2003, c’est la valse des déclarations de Hans Blix (chef des inspections onusiennes en Irak) et le début des manifs anti-guerre. Le 13 février 2003, le projet de Allbritton prend de l’ampleur. Il dispose de 1 200 dollars en économies, et a reçu en cinq mois 771,71 dollars en dons. On est loin du compte pour un projet comme celui qu’envisage le reporter, et qu’il estime à 10 000 dollars, mais on est sur la bonne voie. Allbritton explique davantage sur son site Web à quoi servira l’argent, et promet aux donateurs de les inscrire sur une liste de diffusion par courriel de manière à ce qu’ils reçoivent en primeur ses articles et analyses. Il écrit :«Vous pourrez aussi me suggérer des sujets à couvrir... vous pourrez jouer au chef de rédaction.»

Au 14 mars 2003, les dons s’élèvent à 1 800 dollars, mais le projet de Allbritton fait l’objet d’un article de Wired News et attire l’attention d’un public plus large. Le 19 mars, c’est le début des opérations militaires en Irak. Le 24 mars, Allbritton atteint son objectif de 10 000 dollars en dons (quelque 350 donateurs), et prend l’avion deux jours plus tard pour la Turquie à partir d’où il entrera en Irak. Le 27 mars, il publie sur son site Web son premier article à partir d’Ankara, lu par 23 000 personnes ce jour-là.

Allbritton en est maintenant depuis à son troisième séjour en Irak. Il continue de recevoir des dons (11 185 dollars en caisse au 6 janvier) et est sollicité pour des textes à la pige par différents médias comme Time. Cité dans Editor & Publisher, Allbritton parle d’un style de journalisme plus interactif : «Mes lecteurs m’écrivaient et me demandaient de fouiller plus à fond des sujets, m’en suggéraient. Je n’avais pas un chef de rédaction, j’en avais des milliers. Et ça, c’est une nouvelle façon de pratiquer le journalisme.»
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7.1.05

Appeler un chat un chat?

Jesse Oxfeld qui tient une chronique sur les blogues dans le netmag Editor&Publisher sous le titre de Newspaper 2.0 a certainement, même si l’année est jeune, déniché une citation qui sera marquante pour l’année 2005. Extrait de son article du 6 janvier : « “Je crois que les blogues peuvent jouer un rôle important dans le journalisme en ligne” affirme Doug Feaver, directeur exécutif de washingtonpost.com. Mais comment les gérer, dit-il, “est la grosse question pour les sites des médias traditionnels.” C’est d’abord une question de terminologie. “Il faudra leur trouver un autre nom” [les italiques sont de nous] dit Feaver à cause du “baggage” que le terme véhicule auprès des chefs de rédaction.»
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Cher oncle Bill

Creative ComradesBill Gates, fondateur et p.d.-g. de Microsoft, a accordé une rare entrevue à News.Com à l’occasion de son passage au Consumer Electronics Show qui se tient ces jours-ci à Las Vegas. Une de ses déclarations sur la propriété intellectuelle fait beaucoup jaser : «Il y a moins de communistes dans le monde qu’il n’y en avait. Il y a certains communistes “modernes” qui veulent en finir avec les diverses mesures incitatives qui profitent aux musiciens, aux cinéastes et aux concepteurs de logiciels. Ils ne croient pas que ces mesures devraient exister.» Cette attaque contre la culture du gratuit en irrite bon nombre, dont Dan Gillmor qui la qualifie de «propagande honteuse», et le blogue BoingBoing qui propose de très jolis graphiques Copyleft (ici, ici et ici).

C’est que sans les nommer, Gates s’en est pris aux concepteurs de logiciels ouverts qui jouissent, on le sait, de la faveur d’un nombre croissant d’utilisateurs. Pour ce qui est du fureteur Firefox, Gates ne semble pas préoccupé et déclare : «Certains utilisateurs vont essayer Firefox, le comparer à Internet Explorer, et utiliser celui qu’ils estiment être le meilleur.» Tout comme 40 % des utilisateurs, sommes-nous tentés d’ajouter.

Sur le phénomène des blogues, Gates affirme que la plate-forme MSN Spaces a attiré un million d’utilisateurs depuis son lancement. Prudence, dit-il, il y a bien des gens qui se lancent dans l’aventure puis abandonnent très rapidement. Mais avec les fils Web (RSS) et des fonctions de recherche «à valeur ajoutée» (concept qui resterait à préciser semble-t-il), la formule blogue arrive à maturité. Il dit s’être prêté à l’exercice d’en créer un, mais ne pas avoir le temps de l’alimenter régulièrement. Selon lui, il faut «tenir» au moins un an pour que ça en vaille la peine. Ceci vient de celui pour qui, s'il voit un billet de mille dollars par terre, il est plus rentable pour lui de vaquer à ses occupations que de le ramasser...

Et aussi :

«Il y a bel et bien des extraits de communisme dans cette économie libertaire que nous vivons avec le Peer-to-Peer et tout ce qui l'entoure. Mais c'est en réalité une nouvelle économie tout entière qui se crée, qui n'a rien d'anti-libérale. Finalement, n'y a-t-il pas chez les industriels un paradoxe à vouloir prêcher d'un côté le libéralisme, c'est-à-dire la libre concurrence entre les entreprises, et vouloir surprotéger de l'autre côté tous les outils juridiques qui permettent de maintenir la concurrence sur le bas côté?»
Guillaume Champeau
Ratiatum


«C’est une chose d’entendre de tels propos de directeurs de studios ou de dirigeants de compagnies de disques... Mais les gens que je connais chez Microsoft sont très loins de ce genre de sottises. Est-ce que Gates ne leur parle pas?
Lawrence Lessig
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6.1.05

Libération sans nouvelle de Florence Aubenas

Florence Aubenas, LibérationUn communiqué laconique (et en anglais) du quotidien Libération annonce que le journal est sans nouvelle de son envoyée spéciale en Irak Florence Aubenas depuis plus de 24 heures. Selon l’AFP, «Florence Aubenas était accompagnée de son interprète irakien, Hussein Hanoun Al Saadi, qui collabore avec les envoyés spéciaux de Libération depuis presque deux ans. [...] Grand reporter, Florence Aubenas était arrivée en Irak le 16 décembre 2004. Journaliste permanente à Libération depuis 1986, elle a couvert de nombreux événements, au Rwanda, au Kosovo, en Algérie, en Afghanistan et en Irak, ainsi que plusieurs grands procès en France.» Florence Aubenas est également auteure avec Miguel Benasayag de Résister, c'est créer et de La Fabrication de l'information : les journalistes et l'idéologie de la communication, de On a deux yeux de trop avec Anthony Suau, et aussi de Lettre à une amie irakienne (disparue) avec la Tunisienne Bensedrine Sihem.

Je ne peux faire autrement que me rappeler qu’il y a quelques jours, le quotidien britannique The Guardian publiait une entrevue révélatrice avec le journaliste français et ex-otage Georges Malbrunot qui déclare 'If I had been British, I'd be dead' (Avoir été britannique, je serais mort). C’est un des meilleurs textes sur la détention des journalistes, touffu de détails et de perspectives inédites. Entre autres, les ravisseurs de Georges Malbrunot et de son collègue Christian Chesnot ont compris qu’ils n’étaient pas des espions, mais des journalistes, et français de surcroît, informations confirmées par une recherche sur... Google. Il y avait certes d’autres enjeux, mais dès lors que leur identité véritable était établie, tous les espoirs étaient permis.

Reste à espérer que Florence Aubenas n’ait pas été enlevée, et que si tel est le cas, ses ravisseurs procéderont à une petite recherche sur Google.
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La transaction

Du blogue de Loïc Le Meur, v.-p. et directeur européen de Six Apart.

«Six Apart rachète Live Journal et compte 6,5 millions de blogs

Les rumeurs étaient donc basées sur la réalité, Six Apart vient de racheter une des plus grande plateformes de blogs gratuits du monde, Live Journal. Je reviendrai plus en détails sur cette acquisition dans les heures qui viennent.

[...]

Après ce rachat, le nombre de blogueurs total dans le monde de Six Apart sur TypePad, Movable Type, Live Journal et Ublog est de 6,5 millions et des milliers nouveaux chaque jour. Il y a en ce moment même plus de 16 000 nouvelles notes par heure, 273 par minute, sur Live Journal.

Live Journal a une communauté de blogueurs (statistiques) beaucoup plus jeune que TypePad et donc très complémentaire, avec très grande majorité de 13 à 20 ans et à 67 % féminine, très internationale.»
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Journalisme participatif : un document fondateur

Commentant la nouvelle orientation professionnelle de Dan Gillmor il y a quelques jours, je parlais de ce qu’il considère une expérience à suivre en matière de journalisme participatif, soit celle du quotidien News & Record (Greensboro, Caroline du Nord). Le journal vient de lancer une série de blogues pour se rapprocher de son lectorat et faire du journal, tant dans l’imprimé qu’en ligne, une agora où la collectivité pourra s’exprimer et réfléchir, mais aussi devenir source de nouvelles et participer à la gestion du médium.

Reprenons brièvement l’historique de la démarche du News & Record. Comme l’explique John Robinson, l’éditeur du quotidien, tout a commencé l’été dernier alors qu’on a demandé au chef de la section des nouvelles locales, Mark Sutter, d’engager une recherche/réflexion sur l’avenir des journaux. Ses conclusions ont fait l’objet de nombreux échanges entre les membres de la rédaction du journal, et en décembre on a confié à Lex Alexander, journaliste, le mandat de rédiger une série de recommandations pour faire du quotidien un médium adapté au journalisme participatif. Le document de Alexander est maintenant diffusé sur son blogue, et aussi disponible en format Word.

Les recommandations de Alexander portent sur les pratiques journalistiques et le contenu; son mandat ne comprenait pas l’analyse des moyens techniques, ni le plan d’affaires du projet de refonte du quotidien.

Première constatation : le lectorat du journal est en baisse. À cet égard, la situation du quotidien n’est pas unique, tous les journaux accusent une baisse de leur lectorat. (À titre d’exemple, faut-il rappeler que le Washington Post perd 4 000 abonnés par mois, tendance qui va en s’accélérant selon Adam Penenberg de Wired News.) Évidemment, cette baisse de lectorat (et d’abonnés), entraîne un fléchissement des recettes publicitaires.

«Notre auditoire s’éloigne de l’imprimé au profit d’Internet» écrit Alexander, «et certains de nos lecteurs les plus scolarisés et financièrement à l’aise quittent en emportant avec eux le potentiel de revenus publicitaire. Si nous voulons survivre comme entreprise vouée à la nouvelle locale, à l’information et au dialogue, nous devons réagir en affectant de l’effectif et des ressources. Mais ceci implique davantage que de reproduire en ligne notre produit imprimé. Ça signifie comprendre la culture Internet, et plus particulièrement les blogues, et comprendre comment nous pouvons tirer profit du réseau pour mieux informer le public.»

Les suggestions sont nombreuses : inviter des blogueurs aux réunions de la rédaction, toujours proposer des liens Internet dans les articles, transformer la rubrique nécrologique en blogue avec un moteur de recherche et une possibilité de commentaires, agir comme agrégateur de blogues locaux, exiger que les journalistes lisent les commentaires, construire des wikis locaux, numériser toutes les archives et les rendre accessibles sans frais, etc. Bref, selon Alexander, il faut inverser la tendance, et créer un journal sur Internet avec une version papier.

Jay Rosen qui anime l’influent blogue PressThink se réjouit de la teneur des recommandations, même s’il formule des réticences à l’égard de certaines d’entre elles. Par exemple, Alexander recommande de dresser un profil des journalistes qui contiendrait, entre autres, des informations sur leurs affiliations politiques et religieuses, et ce dans un souci de transparence pour les lecteurs. «Plus délicat à faire que semblent le croire ceux qui le recommandent car il y a ici une question de droits» écrit Rosen, «en matière de transparence, je commencerais par demander aux journalistes d’expliquer qui ils sont, d’où ils viennent, quel est leur bagage d’expérience, et de leur laisser le choix de divulguer des informations plus personnelles.»

Le débat est lancé sur le texte des recommandations de Lex Alexander, comme en fait foi la section des commentaires sur PressThink. Dan Kennedy du Boston Phoenix affirme que la qualité d’un journal repose tant sur ce qui s’y retrouve dans le contenu que sur ce qui a été filtré ou exclu comme information, d’où l’importance de contrôles rédactionnels serrés et l’incompatibilité avec l’esprit des blogueurs.

Faux débat, pour Rosen, et loin de ce que suggère Alexander. «Le concept d’un journal entièrement asservi au contrôle des chefs de rédaction est en péril, non pas parce que le blogueurs ont horreur des chefs de rédaction, mais bien parce que ceux-ci ont horreur d’apprendre, d’apprendre sur le Web, sur le fossé qui les sépare de ceux qu’on appelait avant ‘le lectorat”, sur leurs lecteurs, et aussi d’apprendre des blogueurs.»

Un très beau débat en perspective.
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5.1.05

Compte-mots

Le Comité sénatorial canadien des transports et des communications se réunissait l’automne dernier pour étudier l’état actuel des industries de médias canadiennes, les tendances et les développements émergeant au sein de ces industries, le rôle, les droits et les obligations des médias dans la société canadienne, et les politiques actuelles et futures appropriées par rapport à ces industries.

Je viens de parcourir les transcriptions préliminaires des témoignages entendus par le Comité à Toronto les 13 et 14 décembre derniers, et à Montréal les 15 et 16 décembre. Je remercie d’ailleurs le personnel de soutien du Comité de sa bienveillance pour m’avoir fait parvenir les fichiers de ces transcriptions qui seront disponibles sous peu sur le site des audiences du Comité. Celles précédant le 13 décembre y sont déjà.

La presse a peu fait de cas de ces audiences et des témoignages entendus par le Comité. La Fédération professionnelle des journalistes du Québec a mis en ligne la présentation livrée par son président, Alain Gravel, de même que l’Association des journalistes indépendants du Québec.

En une période où Internet change la donne pour tous les médias, et où le phénomène blogue commence (du moins outre-frontière) à secouer les médias établis en fractionnant leur auditoire, je croyais qu’il en serait beaucoup question lors de ces audiences. Erreur.

Les sept fichiers de ces transcriptions d’audiences, chacun relatant une demie-journée, oscillent entre 20 000 et 30 000 mots chacun. Ceci inclut la livraison des présentations des intervenants auprès du Comité, et la période de questions et réponses qui s’ensuit généralement. J’ai parcouru ces fichiers à la recherche de deux mots, soit «Internet» et «blog». Dans ce dernier cas, le logiciel me signalerait autant les expressions blog, weblog, blogue, blogueur, et le reste des déclinaisons possibles.

Voici le résultat du compte-mots pour les sept séances en question.

Toronto, le 13 décembre, après-midi
Internet 7
blog 0

Toronto, le 14 décembre, avant-midi
Internet 2
blog 1

Toronto, le 14 décembre, après-midi
Internet 4
blog 0

Montréal, le 15 décembre, avant-midi
Internet 21
Blog 4

Montréal, le 15 décembre, après-midi
Internet 6
blog 0

Montréal, le 16 décembre, avant-midi
Internet 7
blog 0

Montréal, le 16 décembre, après-midi
Internet 14
blog 0

C’est donc dire qu’au total, en trois jours et demi d’audiences d’un Comité ayant pour mandat d’étudier l’état actuel des industries de médias canadiennes, les tendances et les développements émergeant au sein de ces industries, on a prononcé seulement 61 fois le mot Internet, et six fois une déclinaison du mot blogue.

Et ne jetons pas le blâme aux sénateurs, ils étaient venus entendre le témoignages de l’industrie, et de ceux et celles qui y travaillent. Inutile de dire qu’on n’y est pas allé en profondeur dans l’analyse des nouveaux médias.
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Altermédiation

Philippe Batreau nous annonce la création de deux blogues. Le premier, altermédiation (exploration des nouvelles formes d'intermédiation, d'expression et d'accès à l'information, savoirs, connaissances et loisirs) fait partie des blogues hébergés par le quotidien Le Monde. Le second, Le blogue d’Adminet, prolongement blogue du site Adminet France, Web administratif et citoyen.

Batreau écrit : «Au-delà du phénomène de mode, le blog, carnet de bord, journal intime et/ou individuel, collectif, participatif est le signe, symbole, témoin des nouvelles formes de communication et d’information à l’ère réticulaire. Le blog est le produit, effet et cause de l’altermédiation, cette autre intermédiation, médiation de l’autre et de la reconnaissance. [...] Plutôt que subir le réseau et ses flux qui nous traversent et nous englobent, le blogueur et ses lecteurs les construisent, copyleft. Ils s’approprient cet espace qu’ils viennent de co-créer.»

À suivre.
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4.1.05

Blogs.biz

Le magazine financier Fortune publie un article assez long sur les blogues, intitulé «Pourquoi vous ne pouvez échapper aux blogues» avec en sous-titre «Les blogueurs peuvent vanter votre produit, ou le démolir. Quoi qu’il en soit, ils sont devenus une force qu’on ne peut ignorer.»

WebProNews nous apprend que le monde des affaires s’intéresse de plus en plus aux blogues, que des grandes sociétés embauchent des «spécialistes» en blogues.

Les 24 et 25 janvier à Seattle se tiendra la conférence Blog Business Summit. Pour s’inscrire, prière de verser des droits de 795,00 $ US. Si vous êtes un blogueur reconnu, il y a un nombre limité de places à 395,00 $ US à condition que vous ayez parlé de la conférence sur votre blogue. Pour ce qui est des accréditations de presse, on prévient que le nombre de places est très limité

No comment.
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3.1.05

Le Pew et les blogues

Le Pew Internet & American Life Project vient de publier quelques données sur la blogoshpère, The state of blogging. Ceux et celles qui sont habitués aux volumineux et très étoffés rapports du Pew resteront sur leur faim; le document signé par Lee Rainie, directeur fondateur du Pew Internet & American Life Project et ancien chef de rédaction du très conservateur U.S. News & World Report, se présente davantage comme une note de service de quatre pages. Les données sont extraites de deux sondages menés par téléphone en novembre 2004 auprès d’un échantillon de 1 861 répondants, et comporte une marge d’erreur de 5 %. Précisons également que ces deux sondages ont été menés aux États-Unis.

Des 120 millions d’utilisateurs d’Internet aux États-Unis, 8 millions (7 %) ont créé un blogue. Côté lecteurs assidus, 27 % des utilisateurs en consultent régulièrement, comparativement à 17 % en février 2004, soit une augmentation de 58 % en neuf mois. L’élection présidentielle a été l’occasion pour 9 % des utilisateurs d’Internet de consulter souvent ou parfois des blogues sur la politique. Les lecteurs de fils Web (RSS, XML) recueillent la faveur de 5 % des utilisateurs; c’est la première fois que le Pew mesure l’incidence de cette technologie, et il qualifie ce résultat d’impressionnant. Aussi, 12 % des utilisateurs ont formulé des commentaires sur des blogues, mais pour l’ensemble, seulement 38 % savent ce qu’est un blogue.

Profil type de blogueur : sexe masculin (57 %), âgé de moins de 30 ans (48 %), dispose d’un accès haut débit à domicile (70 %), utilisateurs d’Internet depuis six ans ou plus (82 %), financièrement à l’aise (42 % vivent dans des ménages à revenu annuel de 50 000 $ ou plus), et scolarisés (39 % détiennent des diplômes de premier ou deuxième cycle).

Le profil des lecteurs ressemble à celui des auteurs, sauf pour les personnes récemment attirées par les blogues, un groupe qui compterait plus de femmes, plus de personnes du créneau 30/49 ans, et plus de ménages connectés par ligne commutée.

En octobre 2003, il y a une éternité direz-vous, la société de recherche Perseus publiait les résultats d’une étude sur L’iceberg des blogues, soit que les blogues les plus connus ne constituaient que la partie visible d’un vaste mouvement et n’étaient pas caractéristiques de l’ensemble (voir les considérations de l’auteur sur les nanoauditoires).

Mais malgré le temps qui relativise les données de l’enquête Perseus, cette dernière comportait des pistes d’analyse que l’on aurait aimé voir suivies par le Pew, ou quelque autre organisme de recherche.


Perseus basait ses résultats sur l’analyse de 3 634 blogues en ligne sur huit services d’édition et d’hébergement. Selon Perseus, ces huit services représentaient 4,12 millions de blogues. Or, de ce nombre, 2,7 millions (66 %) n’avaient pas été mis à jour depuis deux mois ou plus; 1,09 millions ne comportaient que le «billet inaugural» sans autre contribution subséquente. La durée de vie moyenne du reste des blogues abandonnés était de 126 jours, 132 000 blogues avaient «tenu le coup» durant un an ou plus, le doyen des blogues abandonnés l’avait été après 923 jours, et 13 600 blogues avaient repris vie après deux mois ou plus d’abandon.

Les constatations démographiques de Perseus détonnaient par rapport à celles du Pew. Par exemple, 51 % des blogues étaient animés par des 13/19 ans, et 56 % par des personnes de sexe féminin. Retour sur l’abandon des blogues, et sans égard aux créneaux d’âges, les hommes (46,4 %) étaient plus susceptibles de mettre un terme à leur publication que les femmes (40,7 %).

Et contrairement à la croyance qui veut que les blogues ne soient que des collections de liens pointant vers des médias traditionnels, Perseus constatait que ce n’était le cas que pour 9,9 % des billets récents sur les blogues répertoriés.

C’est donc ce genre de données, plus qualificatives que quantitatives, et surtout établies de manière longitudinale, que l’on souhaiterait avoir pour analyser la mouvance blogue.
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En guise d'adieu

«L'aventure de Dixit se termine ici. Je crains trop l'ironie de la vie pour oser écrire le mot jamais. Prudemment, je me bornerai à ceci : Dixit disparaît sans promesse de retour.»

Laurent Laplante
Québec, le 3 janvier 2005
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2.1.05

Dan Gillmor, dernier article au Mercury News, nouveau blogue

Dan GillmorDan Gillmor, l’auteur du livre «We the Media» (Nous, les médias) dont je vous parlais il y a quelque temps, a lancé le 31 décembre son nouveau blogue, Dan Gillmor on Grassroots Journalism et signé ce dimanche son article d’adieu pour le Mercury News.

Le livre de Gillmor sur le journalisme participatif (par et pour le peuple), puis l’annonce de son départ du Mercury News pour se consacrer entièrement à un projet en ce sens, ont beaucoup fait jaser le milieu des médias aux États-Unis, et une bonne partie de la blogosphère acquise aux principes que défend Gillmor.

Sans être rabat-joie, il tente cependant de modérer les attentes. «Ce projet est encore embryonnaire» écrit-il, «Je me dois de le préciser car les conversations en ligne et les hypothèses qui ont circulé ont fait planer des attentes absurdes, du moins à court terme. J’ai beaucoup d’idées, certaines très précises, mais le cadre général reste à développer.»

Dans un premier temps, Gillmor entend faire de son blogue une espèce de gare de triage des échanges, des idées et des expériences en journalisme participatif. Premier exemple cité, celui du quotidien News & Record (Greensboro, Caroline du Nord) qui vient de lancer une série de blogues pour se rapprocher de son lectorat et faire du journal, tant dans l’imprimé qu’en ligne, une agora où la collectivité pourra s’exprimer et réfléchir, mais aussi devenir source de nouvelles et participer à la gestion du médium.

(Photo courtoisie de Todd Thacker, OhmyNews)
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À vos compteurs

Depuis une semaine, j’ai l’impression de vivre le nez collé en permanence sur une batterie de compteurs tous aussi sordides les uns que les autres. Christian Christensen, professeur de communication à l’Université d’Istamboul, appelle ça la «pornographie des bilans de victimes».

J’ai trouvé écho à ce sentiment dans le MHM qui publie maintenant sous forme de journal : «le journalisme de crise se vit en journalisme de palmarès : il s'agit désormais surtout d'établir une comptabilité sinistre, puisqu'enfin nous vivons dans la société du Calcul, où la mort même se mesure, comme les prix [...] Nous avons donc le palmarès des victimes occidentales (“Et notre gagnant est... la Suède!”), le palmarès des victimes locales, le palmarès des pays donateurs (où la polémique déjà se développe sur la pingrerie des États-Unis), et LE GRAND COMPTEUR, qui, comme au Téléthon, égrène le Grand Total, ici, tristement, celui des victimes...»

Retour sur la pingrerie des États-Unis dont le compteur d’aide aux sinistrés est passé de 4 à 15 puis à 35 millions de dollars, pour ensuite bondir soudainement à 350 millions. Aurait-on flairé les contrats de reconstruction? Pingres les États-Unis? Mais voyons, quelle idée, car comme le souligne Heather Woksuch n’est-ce pas le pays qui consacre présentement 270 millions de dollars par jour à instaurer la démocratie en Irak?

Il y a aussi d’autres compteurs, des indices, qu’il ne faut évidemment pas perdre de vue, et on lit dans L’Humanité : «Les tsunamis ont tué des dizaines de milliers de personnes, mais les Bourses d’Indonésie et d’Inde battent des records [...] Pour les investisseurs, le chiffre clé, depuis dimanche, n’a pas été le bilan humain catastrophique d’un raz de marée sur les côtes de l’océan Indien, peuplées d’hommes et de femmes qui avaient peu de poids dans les mouvements de l’économie mondiale. Le monde des affaires s’est plutôt penché sur des études constatant que les compagnies d’assurance étrangères sortaient quasiment indemnes des vagues meurtrières [...] “Mais ce n’est pas nécessairement un si grand événement en termes économiques”, remarque Eddie Wong, analyste en chef pour l’Asie chez ABM Amro. “Les dommages subis par les bons hôtels ne semblent pas graves”, note-t-il. “Même si certaines chaînes hôtelières ont pu être affectées, il y a aussi des gagnants en termes économiques tels que les producteurs de ciment”, insiste-t-il.»

Puis, l’étrange compteur birman qui, avec 1 930 kilomètres de côtes, reste obstinément bloqué à 53 disparus. Voisine de la Birmanie, la Thaïlande (3 219 km de côtes) rapporte 4 800 disparus, et le Sri Lanka (1 340 km de côtes, et à même distance de l’épicentre du séisme) 28 000 disparus. C’est vrai qu’en Birmanie, après quatre décennies de régime militaire, on peut aller en prison pour avoir fait étalage de sa pauvreté ou de sa détresse.

Il y a peut-être une vertu à ces compteurs, comme l’explique Christensen. «Les chiffres sont si énormes, et mon expérience de la mort à cette échelle (à n’importe quelle échelle en fait) est si limitée que je ne peux pas comprendre ce qui se passe, je ne peux que me reposer sur les statistiques» écrit-il, ajoutant «La couverture journalistique de la crise est nécessaire pour montrer au monde ce qu’est une crise humanitaire d’envergure, et pour ce faire il faut montrer la mort. Ce dont nous n’avons pas besoin, toutefois, c’est une couverture qui exploite les tendances voyeuristes de notre psyche.»
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