29.5.04

Photo numérique : l’astuce de l’encadrement

La grande rencontreOn les aimes nos appareils photo numériques, on ne se prive pas de les utiliser, on «joue» avec les fichiers à volonté, et malgré le prix exhorbitant des cartouches d’encre (un sujet sur lequel je me propose de revenir), on imprime les meilleures photos. Et vient le moment où on voudrait soit en couvrir nos murs, soit en offrir à des proches, et le choix d’un mode d’encadrement s’impose.

Il y a la solution du laminage sous pellicule plastique. L’avantage est qu’on a alors un support très rigide qui protège la photo de la poussière et de l’humidité. Pour un laminage d’une photo de 8.5x11 pouces, selon le service de laminage, le prix variera entre 8 et 12 dollars, ce qu’on peut estimer raisonnable. Remarquez que j’ai utilisé le système «impérial» (pouces) pour cet exemple, car il est à l’origine de l’astuce promise.

Si on envisage un cadre traditionnel, et à moins de s’adresser à un encadreur qui fera le travail sur mesure, on cherchera un cadre de de 8.5x11 pouces, format du papier à imprimer. Or, les boutiques de matériel photographique et les autres commerces offrant des cadres pour photo ont conservé, pour la plupart, les mesures du papier photo argentique, soit 8x10 pouces. Petit problème.

Il s’agit alors de trouver un endroit où on vend des cadres destinés aux «documents» (diplômes, certificats, permis, attestations) qui eux acceptent un format 8.5x11 pouces. Et le tour est joué.

L’astuce hyper économique se trouve dans les boutiques à «tout pour un dollar». Comme son nom l’indique, pour un dollar, on peut se procurer un cadre «minimaliste». De format 8.5x11 pouces, le cadre se compose d’un plaque rigide de composite, et d’une plaque de verre retenue par quatre agrafes métalliques. Côté photo, les agrafes n’ont qu’une très petite emprise sur la surface et ne masquent rien de l’image. Côté arrière, chacune des agrafes comporte un petit trou qui permet d’accrocher l’ensemble au mur, soit horizontalement ou verticalement.

L’intérêt de cette méthode est qu’on peut se procurer plusieurs cadres sans grever son budget, et changer les photos au gré des humeurs et des goûts. En effet, pour changer la photo, on n’a qu’à dégraffer l’ensemble, remplacer la photo, et tout ragraffer.

Cette solution permet donc de se constituer à peu de frais sa propre petite galerie dont on pourra à volonté renouveler les images.
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26.5.04

Le New York Times, Chalabi et Judith Miller

Dans son édition du 26 mai, le New York Times présente ses excuses pour le manque de rigueur de nombreux articles traitant de la situation irakienne depuis 2001. Dans certains cas, l’information qui faisait alors l’objet de controverse, et qui semble maintenant discutable, n’a pas été suffisamment vérifiée.

La rédaction du Times écrit : «Les articles faisant problème ont été écrits par divers journalistes, portaient sur différents sujets, mais avaient un trait commun. Ils reposaient, du moins en partie, sur de l’information provenant d’un petit groupe d’informateurs, de transfuges et d’exilés irakiens militant pour un “changement de régime” en Irak, des personnes dont la crédibilité a été entachée au cours des récentes semaines. (Le militant anti-Saddam le plus en vue, Ahmad Chalabi, a occasionnellement été cité comme source dans des articles du Times depuis 1991, et a été l’intermédiaire entre des journalistes du Times et d’autres exilés. Il était devenu un favori des partisans de la ligne dure au sein de l’administration Bush, et un courtier d’information rémunéré pour des renseignements sur d’autres exilés irakiens, jusqu’à ce que l’administration mette un terme aux paiements la semaine dernière.) Ce qui a compliqué la situation pour les journalistes, c’est que l’information fournie par ces exilés était souvent confirmée avec véhémence par des responsables gouvernementaux des États-Unis persuadés de la nécessité d’intervenir en Irak. Certains de ces responsables reconnaissent maintenant qu’ils auraient pu être victimes de désinformation de la part de ces exilés. Tout comme d’autres organismes de presse, en partculier celui-ci.»

Cette note de la rédaction du Times a été publié en page A 10 de l’édition papier du journal, et cite comme exemple de désinformation six articles.

Mais comme le souligne Greg Mitchell du site Editor & Publisher (site de veille des médias), la journaliste Judith Miller n’est nullement mentionnée dans la note du Times, bien qu’elle ait écrit deux des articles cités, et en ait co-écrit deux autres. Cette critique vient de ce que E&P avait, il y a un an déjà, demandé au Times de vérifier l’authenticité des informations publiées par Miller.

En juillet 2003, le travail de Miller était contesté par ses pairs. William Jackson, ex-directeur du General Advisory Committee on Arms Control (GAC), écrivait que la journaliste avait agi comme intermédiaire entre l'unité des forces armées à laquelle elle était affectée en Irak (embedded) et Ahmad Chalabi. Elle avait également été à l'origine d'articles sur les mystérieux tubes d'aluminium que l'on croyait servir à la fabrication d'armes de destruction massive, et de la défection d'un présumé scientifique irakien qui incriminait Saddam Hussein.

Fin mars 2004, Bill Keller, un des hauts responsables de la rédaction du Times défendait la qualité du travail de Miller : «Comme bien des journalistes agressifs, en particulier ceux et celles qui travaillent sur des dossiers délicats, elle a parfois brusqué des gens, mais c’est loin d’être un motif à réprimande. C’est l’évaluation que j’ai fait lorsque nous avons travaillé ensemble, et rien qui n’ait été publié dans ce journal depuis que j’en suis chef de la rédaction ne pourrait me faire croire autrement.»
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25.5.04

On était prévenus...

«La gestion d’une occupation de l’Irak sera compliquée par des divergences profondes sur le plan religieux, ethnique et tribal qui prévalent dans la société irakienne.

Les forces étasuniennes pourraient faire face à des conflits entre Irakiens, ou devoir agir en arbitre, dans des situations qu’ils auront peine à comprendre.

Une stratégie de sortie nécessitera l’instauration d’un climat de stabilité politique difficile à atteindre vu la diversité de la population irakienne, la faiblesse des institutions politiques, et une propension à diriger par des moyens violents.

[...]

Toute montée d’activité terroriste ou de guérilla contre les troupes étasuniennes nécessitera sans aucun doute une réponse musclée. De telles actions par les États-Unis pourraient entraîner une escalade du nombre d’arrestations, d’interrogations et de détentions d’Irakiens. Bien que ces mesures contribuent à un plus haut degré de sécurité et de protection des effectifs, elles sont rarement bien vues par la population locale. Des personnes opposées à l’occupation par les États-Unis pourraient bien voir leur hostilité renforcée par ces mesures.

[...]

Un soulèvement de masse contre les forces d’occupation est peu probable dans les premières étapes d’une occupation de l’Irak par les États-Unis, du moins pour la première année. On peut, de manière raisonnable, s’attendre à un sentiment de gratitude de la part de la population pour avoir délogé Saddam Hussein du pouvoir, et une incertitude sur les limites à ne pas franchir face à l’occupant. Lorsqu’une année sera écoulée, il y aura possibilité accrue d’un soulèvement d’ampleur si la population est désillusionnée et que les Irakiens tracent des parallèles entre les actions des États-Unis et d’autres exemples historiques d’impérialisme occidental.»

Source : Reconstructing Iraq: Insights, challenges, and missions for military forces in a post-conflict scenario, Conrad C. Crane, W. Andrew Terrill, U.S. Army War College’s Strategic Studies Institute, February 2003
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24.5.04

Nick Berg ne serait pas mort décapité

C’est du moins ce qu’affirme le journaliste d’enquête Ritt Goldstein dans l’édition du 22 mai du quotidien Asia Times. Il cite deux experts, soit le docteur John Simpson, directeur des services de chirurgie au Royal Australasian College of Surgeons, et l’expert médico-légal Jon Nordby, chercheur associé au American Board of Medicolegal Death Investigators.

On se rappellera que le corps de Nick Berg avait été retrouvé près d’un viaduc à Bagdad le 8 mai dernier, et que des séquences vidéo de la présumée décapitation de Nick Berg par des gens en cagoule avait fait surface sur Internet le 11 mai et reprises par l’ensemble des grandes chaînes de télévision.

Goldstein écrit : «Bien que les circonstances entourant le fichier vidéo et les derniers jours de Nick Berg aient fait l’objet de nombreuses hypothèses, Simpson et Nordby croient qu’il est hautement probable que Berg soit décédé quelque temps avant d’être décapité. Un des facteurs soutenant leur thèse est l’absence de saignement artériel “massif” que provoque un tel geste.» Les deux chercheurs affirment que si Berg avait été vivant au moment de sa décapitation, les personnes l’entourant auraient été aspergées de sang, ce qui n’est manifestement pas le cas. Les chercheurs citent également l’absence de réaction attribuable au système nerveux autonome (spasmes, contractions) lorsque Berg est attaqué.

D’autres informations concernant le fichier vidéo sont pour le moins étranges selon Goldstein. Par exemple, alors que les chaînes Fox News, CNN et BBC affirmaient avoir téléchargé la séquence vidéo d’un site en langue arabe «lié à Al Quaeda» (voir plus bas), le service d’information AlJazeera a cherché en vain pendant 90 minutes sur ce site sans parvenir à trouver le fichier en question.

Aujourd’hui, 24 mai, AlJazeera revient sur l’affaire du fichier vidéo avec des constatations troublantes.

D’une part, Nick Berg porte une combinaison orange identique à celles que portent des détenus du camp de Guantanamo, identique à celles dont dispose la police militaire étasunienne. Comment de présumés assassins ou terroristes irakiens auraient-ils pu se procurer une telle combinaison?

Nick Berg est vu assis sur une chaise identique à celle que l’on voit sur les photos de la soldate Lynddie England prises à la prison d’Abu Ghraïb. Étrange coïncidence. Autre élément troublant : le mur derrière Berg est de la même couleur et texture que les murs que l’on voit sur les photos prises à Abu Ghraïb. Puis, dans les cadres 9306 à 9368, on voit brièvement à l’écran une partie de la tête d’une personne portant une casquette militaire verte comme celles que portent les militaires étasuniens.

Selon AlJazeera, l’ensemble de ces preuves tend à indiquer que la scène de décapitation aurait été tournée à Abu Ghraïb.

À propos de l’homme qui porte une cagoule et, présumément, revendique l’assassinat de Berg, soit le Jordanien Abou Moussah Al Zarkaoui, différentes sources citées par Ritt Goldstein dans le Asia Times et dans l’article de AlJazeera indiquent qu’il serait mort dans un bombardement de la coalition dans les montagnes de Sulaimaniya (nord de l’Irak). De plus, des arabophones ayant visionné la bande vidéo affirment que celui qui prétend être Al Zarkaoui ne parle ni avec un accent irakien, ni avec un accent jordanien, et que sa langue maternelle n’est pas l’arabe. En outre, comme la figure de Al Zarkaoui était bien connue, pourquoi chercher à dissimuler son identité en portant une cagoule?

Pour ce qui est du site Web en langue arabe «lié à Al Quaeda» qui aurait diffusé le fichier vidéo, www.al-ansar.biz, il n’est plus en service. Le nom de domaine a été enregistré auprès d’un régistraire aux États-Unis le 7 janvier 2003 au nom d’un certain Omar AbuOmar, qui a donné une adresse fictive au Danemark, et une adresse de courriel Hotmail. Le service d’hébergement du site, tassmeem.net, semble lui aussi hors service. Le nom de domaine a été enregistré le 13 janvier 2002 auprès d’un régistraire aux États-Unis. L’adresse citée pour l’entreprise est au Caire (Égypte), l’adresse des services techniques est à Riyadh (Arabie Saoudite), certaines recherches DNS pointent vers des serveurs en Malaisie.

Comme le confirme Jon Nordby à Ritt Goldstein, le fichier vidéo soulève davantage de questions qu’il n’offre de réponses.

Une recherche exhaustive des sites spécialisés ne fait aucune mention d’une autopsie pratiquée sur le corps de Nick Berg, bien que cette procédure pourrait apporter des éléments de réponse sur les circonstances entourant sa mort. Berg avait été arrêté par les forces de la coalition à Mossoul le 24 mars, détenu et interrogé par le FBI pendant 13 jours. Il a été libéré le 6 avril, après que sa famille ait entrepris contre le gouvernement des États-Unis une poursuite pour emprisonnement illégal. Il s’est rendu à Bagdad le 9 avril d’où, selon sa famille il voulait quitter pour le Koweit. On ignore tout de son emploi du temps entre le 9 avril et le 8 mai, jour de la découverte de son corps.
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23.5.04

Chalabi et la filière iranienne

Jeudi dernier (20 mai), les bureaux du Congrès national irakien (CNI) à Bagdad font l’objet d’une descente de la part de militaires de la coalition et de la nouvelle armée irakienne. On y saisit des documents, du matériel informatique, et les responsables du Congrès rapportent certains dommages matériels.

Son président, Ahmed Chalabi, membre du Conseil de transition et celui que bon nombre considéraient comme «l’homme des Américains», est indigné et accuse les États-Unis de vouloir le discréditer. Il se dit fier d’être devenu la cible de la coalition, et affirme que la descente prouve qu’il n’est pas l’enfant chéri des néo-conservateurs de l’administration Bush. Rappelons que c’est ce même Ahmed Chalabi qui avait déclaré, avant le début de l’opération militaire contre l’Irak, que les soldats étasuniens y seraient «accueillis avec des fleurs».

L’origine du CNI remonte à mai 1991. Après l’opération Tempête du désert, le président Bush (père) demande à la CIA de «créer les conditions» propices pour déloger Saddam Hussein du pouvoir. L’agence de renseignement ne dispose pas des moyens pour s’acquitter de cette tâche, et refile alors un contrat à un cabinet de communications stratégiques, le Rendon Group, pour monter une campagne de propagande anti-Hussein. C’est Rendon qui en juin 1992 réunit à Vienne environ 200 délégués d’une douzaine de groupes d’opposition en exil, les convainc de s’unir dans une cause commune, et trouve le nom de Congrès national irakien (Iraqi National Congress).

L’unité de ces groupes s’avère difficile à réaliser, notamment avec les factions kurdes qui se retirent du CNI en 1994, et les États-Unis se font plus discrets dans leur appui au Congrès. (Voir le texte de Kenneth Katzman du Congressional Research Service de la Federation of American Scientists, Iraq’s Opposition Movements.)

Le 25 février 1998, l’American Enterprise Institute (AEI), influente cellule de réflexion néo-conservatrice, est l’hôte d’une conférence sur l’Irak et sur le bien-fondé d’appuyer les mouvements de résistance au régime de Saddam Hussein. Sont présents Richard Perle, un des directeurs de l’AEI (qui deviendra par la suite de 2001 à 2003 directeur du conseil de la politique de défense de l’administration Bush), Paul Wolfowitz, alors recteur de la School of Advanced International Studies à l’Université John Hopkins (actuel secrétaire-adjoint à la Défense des États-Unis), et Ahmed Chalabi.

Chalabi déclare alors que le CNI jouit de l’appui de presque tous les secteurs de la population irakienne et peut compter sur des poches de résistance dans chacune des divisions de l’armée de Saddam. Il déplore le manque de soutien, en 1992, des efforts du CNI pour déloger Saddam Hussein. «Les mouvements démocratiques d’opposition ne peuvent réussir seuls, ils ont besoin de l’aide de démocraties établies» affirme-t-il.

Le 31 octobre 1998, le président Bill Clinton proclame la Loi sur la libération de l’Irak (Iraq Liberation Act of 1998 (PL 105-338)) qui vise à déloger Saddam Hussein du pouvoir et à instaurer un régime démocratique. La Loi dispose d’un volet communications et d’un volet militaire, et des crédits de 97 millions de dollars sont affectés à ces fins. Deux millions vont à l’Agence d’information des États-Unis (USIA), et le reste aux opérations de soutien à l’opposition, et le CNI recoltera la part du lion.

Parallèlement à l’évolution du CNI qu’il préside toujours, Ahmed Chalabi trempe dans diverses affaires. En 1977, en Jordanie, il fonde la banque Petra. Le diplômé du MIT et de l’Université de Chicago en fait, dix ans plus tard, la seconde banque en importance au pays. Il introduit l’utilisation des guichets automatiques, de la carte Visa, du crédit aux entrepreneurs, et tisse des liens avec d’autres institutions financières appartenant à des membres de sa famille à Beyrouth, Genève et Washington.

Le 2 août 1989, les avoirs de la banque sont saisis. La banque centrale de Jordanie exigeait le dépôt dans ses coffres de 30 % des réserves en devises étrangères dont disposaient les banques privées, et Petra ne pouvait répondre à cette exigence. Il fuit le pays dans des circonstances nébuleuses. Une vérification par la société Arthur Andersen, à la demande de la banque centrale de Jordanie, révèle que plutôt que de disposer d’un actif de 40 millions de dollars selon les livres comptables de Petra, elle accuse un passif entre 215 et 350 millions. En avril 1992, Chalabi est jugé in absentia et condamné à 22 ans de prison sous 31 chefs d’accusation de vol, fraude, spéculation sur devises et mauvais usage de l’argent des déposants. (Voir l’article de Andrew Cockburn, The Truth About Ahmed Chalabi.)

Avril 2003, Chalabi rentre en Irak par les bons offices de l’armée des États-Unis. Il est accompagné d’un peu plus de 100 miliciens des «Forces irakiennes libres» entraînés par les États-Unis. Ils lui servent plus ou moins de garde privée, bien que le CNI dise disposer de plus de 1 500 miliciens. Chalabi multiplie les contacts avec les leaders de factions irakiennes, et le CNI bénéficie de crédits de 340 000 $ par mois du Pentagone selon la BBC. En novembre 2003, David Frum du American Enterprise Institute réaffirme l’attachement des néo-conservateues à Chalabi : «Il n’y a jamais eu qu’un seul gouvernement intérimaire possible pour l’Irak : le Congrès national irakien dirigé par Ahmed Chalabi. Mais certains secteurs de l’administration gouvernementale des États-Unis, comme le Département d’État et la CIA, n’aiment pas Chalabi pour leurs propres petites raisons mesquines.»

La descente effectuée aux bureaux du CNI est révélatrice de la défaveur dans laquelle est tombée Chalabi auprès des forces de la coalition. Y a-t-il un seul motif ou conjugaison de facteurs?

On évoque ces jours-ci que Chalabi aurait transmis aux services de renseignement iraniens des informations politiques et militaires sur les intentions de la coalition, ce que dément formellement le gouvernement iranien.

Par contre, Chalabi et le CNI étaient à l’origine des documents faisant état de la présence d’armes de destruction massive en Irak, documents qui ont servi à justifier l’intervention armée, alors que les ADM restent introuvables. Selon Andrew Cockburn, les documents étaient presque impeccables. Presque. Les scientifiques qui les ont analysés ont constaté que certaines descriptions techniques contenaient des termes qui n’auraient pu être utilisés que par un Iranien. Par exemple, le mot «dôme» en place de «hémisphère», soit «qubba» en farsi (langue parlée en Iran) en place de «nissuf kura» en arabe. Il appert donc que les documents auraient été écrits en farsi, puis traduits en arabe.

De plus, le quotidien australien The Age rapporte ce dimanche 23 mai que Chalabi aurait, avant l’intervention de la coalition, mandaté des dissident irakiens auprès de huit agences de renseignement occidentales afin de promouvoir la thèse de l’existence d’armes de destruction massive.

Résumons-nous. Les documents soutenant l’existence des armes de destruction massives auraient pu venir d’Iran. Chalabi entretient de nombreux contacts avec des officiels iraniens, on le soupçonne de collaborer avec ses services de renseignement. Richard Boucher, porte-parole du State Department, a du mal à expliquer comment le CNI, de 1999 à 2003, recevait du gouvernement des États-Unis des fonds dont une partie servait à la location d’un bureau à Téhéran. L’Iran maintient aussi des rapports étroits avec le Conseil suprême de la révolution islamique iranienne (allégeance chiite), l’Union patriotique kurde, et le Parti démocratique du Kurdistan. Ces trois groupes, dont les leaders sont membres du Conseil de transition, ont tous des bureaux à Téhéran. Le chef de la sécurité de Chalibi, Araz Habib, est depuis hier recherché par les autorités irakiennes et de la coalition pour ses rapports étroits avec les services de renseignement iraniens (voir AlJazeera).

La question qui se pose est de savoir si l’Iran est à l’origine du bourbier irakien dans lequel les États-Unis et leurs alliés s’embourbent, et si l’administration Bush et ses néo-conservateurs ont été piégés par Chalabi.
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