11.12.04

Gillmor quitte le SJMN

Dan Gillmor, auteur du livre We the Media dont je vous parlais il y a peu de temps, quitte le San Jose Mercury News le mois prochain pour se consacrer à un projet de «journalisme citoyen». Il déclare sur son blogue ne pas pouvoir donner plus de détails encore sur ce projet, mais vouloir continuer à publier un blogue dont il publiera sous peu l’adresse. C’est certainement une perte pour le SJMN car Gillmor est un des journalistes les plus respectés du milieu techno.

Mise à jour, 12 décembre


En entrevue exclusive avec OhmyNews le 11 décembre, Dan Gillmor précise un peu ses intentions.
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Tournée de blogues

Et si le blog était la CB du Web ? (1ère partie)
«J’ai peu posté ces derniers temps sur mon blog et je m’en excuse. Le blog est un exercice bizarre, qui m’intrigue et m’effraye. Le blog, c’est avant tout deux choses que je déteste : parler en public de choses personnelles et donner mon avis, sur un événement, à chaud. Curieusement, on finit toujours par trouver un sujet ou un domaine où l’on accepte de le faire. [...] Ce qui est fascinant, c'est que le monde du blog a défini ses propres règles, sa propre économie d'échange et ses propres stars.»
Tarik Krim, journaliste, Le Monde

Prétentieux, le blogueur?
«“Oui.” Il faut être prétentieux pour écrire, même un vulgaire blogue. Si je ne l'étais pas, je me contenterais de lire. [...] “Mais...” Mais cela dit, en y pensant plus à fond, ce n'est pas si simple. La prétention du blogueur a ses grandeurs et ses limites. Le blogueur est prétentieux mais il est aussi vulnérable, c'est-à-dire sujet à être jugé. (Ce à quoi échappent celles et ceux qui se taisent.)»
Jean Trudeau, blogueur

Journaliste sous la couette
«Sans aller jusqu’à comparer les bloggers à des pirates, comme l’a fait Anne Imbert - qui au passage n’a pas été ratée par les bloggers comme Loic Le Meur, Cyril Fiévet, Miss-information, ou ici, et là par exemple - il faut reconnaître que les bloggers ne sont bons qu’en chroniqueurs ou commentateurs et cela à cause de leur subjectivité.»
Anonyme

Jay Rosen, sur l'avenir des médias
«Quelques deux cents quotidiens, qui tirent de 100.000 à 1 million d'exemplaires, sont imprimés aux États-Unis. Ils se ressemblent à peu près tous. La plupart ont des pages opinions et débats, mais la qualité d'écriture, d'humour et d'engagement de leurs auteurs est largement surpassée par celle des blogueurs. A lire ces derniers, on se rend compte que les professionnels ne contrôlent plus le débat national sur les questions importantes [...] Internet et les blogs représentent pour les grands groupes de médias un vaste défi et l'ignorance, voire le mépris, dont ces groupes font preuve à l'égard de ce qui se passe sur le Web les met en grand danger.»
Cyril Fiévet, Pointblog, citant Jay Rosen
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10.12.04

Politique réseau : Le «two-step flow» de Howard Dean

Howard Dean, ex-gouverneur du Vermont, et candidat à l’investiture démocrate pour la présidentielle étasunienne de 2004, a fait sa rentrée sur la scène politique le 8 décembre. Devant un auditoire d’étudiants de l’université George Washington, il a prononcé une allocution sur l’avenir du parti démocrate, la nécessité de le désenclaver géographiquement et de faire élire des candidats à tous les paliers électifs. Donné favori au début des primaires jusqu’à son échec en Iowa et au New Hampshire en février, on sait que Dean avait eu recours à Internet pour recueillir des appuis financiers et recruter des travailleurs de campagne, avant d’être supplanté par la machine de John Kerry.

Dean fait cependant toujours confiance aux nouveaux médias, et disait dans son discours : «L’avenir du parti démocrate c’est d’en faire un parti qui puisse communiquer avec ses membres et avec tous les citoyens. La politique est à son mieux lorsque nous parvenons à inspirer un sens d’appartenance à une collectivité. Les outils que nous avons été les premiers à utiliser lors de ma campagne, comme les blogues, les séances virtuelles et les flux vidéo, ne sont que le début. Nous devons exploiter tout le potentiel de la technologie pour rejoindre les électeurs, travailler de concert avec les constituantes du parti dans tous les États, et influer sur la couverture médiatique.» L’allocution de Dean a été reprise un peu partout dans la grande presse, et évidemment en texte intégral sur son site Web, Democracy for America.

Pour ceux et celles qui ont un tant soit peu suivi le parcours de Dean, du moins sur le Web, on notera que le politicien a abandonné Dean for America, son ancien site, bien que les archives aient été conservées, et opté pour «Democracy for America». Quant à Blog for America, en ligne depuis mars 2003, il est toujours très actif, alimenté par divers membres d’une petite mais efficace équipe de fidèles d’Howard Dean.

Outre les couleurs traditionnelles des sites politiques étasuniens (bleu, blanc, rouge), si vous trouvez un petit air de famille aux sites de l’organisation Dean, l’explication est simple. Ils ont tous été créés par le même groupe de cinq conseillers Web de Dean, depuis mars 2004 regroupés sous l’enseigne commerciale BlueStateDigital. On sait que depuis un certain temps, on distingue aux États-Unis les «États rouges» (pro républicains) et les «États bleus» (pro démocrates). BlueStateDigital, sans jeu de mots, affiche ses couleurs et propose des services Internet aux politiciens et groupes d’allégeance démocrate.

Ceci dit, la presse a fait grand cas de la capacité de l’organisation Dean à lever des fonds en utilisant Internet. On doit dire que dans un peloton de départ de dix candidats sérieux aux primaires, les 27 millions de dollars que Dean a recueilli principalement en ligne ont fait sourciller. La presse traditionnelle, fidèle à sa perception d’Internet, a vu là un élément singulier de la campagne. La presse spécialisée, souvent sur la défensive, en a profité pour redire «On vous l’avait dit qu’un jour ça marcherait.»

Même Dean estime que l’on a trop mis l’accent sur l’aspect financier de sa présence sur le Web, et pas suffisamment sur l’aspect mobilisateur et communicationnel. Dans le numéro du premier décembre du journal The Hill (actualité politique de Washington), il signe un article qui mérite lecture, It's about people, not just money. Il écrit : «Avec une bonne approche, le Web peut aider les campagnes et d’autres formes d’organisations à réussir sur deux plans importants : de nouvelles méthodes de mobilisation de bénévoles, et une communication qui n’entraîne pas les gros déboursés de la télévision et qui échappe au filtre de la presse.»

Pour Dean, les blogues et le courriel permettent aux candidats de s’éloigner de la langue de bois, des formules préparées et réchauffées, et des «cassettes» de dix secondes destinées aux médias électroniques.

Tout à son crédit, Dean refuse de faire d’Internet une panacée universelle : «Le Web ne peut se substituer aux changements profonds et aux investissements à long terme dont le parti a besoin pour réussir. Nous devons articuler nos valeurs fondamentales, ne jamais concéder victoire sur une question ou dans une région du pays, et tout reconstruire sur des bases solides. Mais bien utiliser Internet signifie établir un nouveau type de rapport entre le parti et ses militants. Plus nous endossons la formule qui fonctionne en ligne, soit l’honnêteté, la clarté et le respect des gens, plus nous avons une chance de réussir sur le terrain.»

Réussir sur le terrain, l’expérience de Howard Dean en illustre bien la difficulté. Malgré ses succès sans précédents en ligne, il n’a pas réussi à remporter l’investiture. Mais il y a pire. Le clan Kerry n’a pas utilisé ce que Dean était parvenu à échafauder, soit une structure exceptionnelle de mobilisation/formation des militants.

En 1940, Paul Lazarsfeld et d’autres chercheurs mènent la première étude sur la communication de masse politique, et le fruit de leurs travaux est publié en 1944 sous le titre The People's Choice. Selon eux, l’effet des médias est relatif, le processus de communication n'est pas vertical, venant du haut vers le bas, mais plutôt horizontal, et apparaît alors pour la première fois dans le discours communicationnel la notion de «leader d'opinion» ou de médiateur et son rôle dans le processus de la communication. (Merci à MBAO pour ce résumé).

Selon Lazarsfeld, les mass médias n’auraient d’influence déterminante que sur 5 % des électeurs, bien moins que les autres influences comme les conversations avec des amis ou des proches, des confrères syndiqués, des collègues ou associés, etc. Cette constatation est par la suite confirmée par d’autres études, et on a appelle alors ce phénomène le «paradigme des effets limités» de l’influence des médias.

Il y a donc un «two-step flow», une sorte de valse à deux temps, dans les messages des mass médias. Dans un premier temps le message, puis dans un deuxième temps le traitement et la retransmission du message par un leader d’opinion au sein de son groupe d’influence.

Lazersfeld et ses chercheurs vont plus loin en 1955 dans leur ouvrage Personal Influence : «De cette étude, ressortait la certitude que le contenu de la communication touche l'audience d'une manière indirecte, à travers les médiateurs, mais il est possible, ont conclu les chercheurs, qu'il existe plusieurs étapes. Les leaders d'opinion eux_mêmes quelquefois, demandent l'opinion ou le conseil d'autrui.» (MBAO).

La théorie n’est pas sans ses critiques. Comme l’explique Mick Underwood, Lazarsfeld et ses collègues attachent beaucoup d’importance aux caractéristiques des leaders d’opinion, puis à ce qu’il faille qu’un individu soit nécessairement leader d’opinion actif ou récepteur d’opinion passif. «Mise à part l’évidence que certaines personnes puissent être des leaders d’opinion sur un sujet et pas sur d’autres, on peut aussi objecter que des personnes puissent n’être ni leader ni récepteur d’opinion, mais tout simplement détachées du message des médias» écrit-il.

De plus, et c’est ici qu’on revient à Howard Dean (vous me pardonnerai le détour), beaucoup tient à la disponibilité d’information pouvant faire contrepoids au message des médias. Comme le souligne Underwood, le grand public dans les années quarante disposait de moins de sources d’information que celles auxquelles nous avons accès aujourd’hui, et généralement de moins de temps à y consacrer.

Or, en réagissant rapidement en cours de campagne aux attaques lancées par les autres candidats, aux éditoriaux malveillants, et en formulant des réponses appropriées véhiculées sur ses sites Web, son blogue, et par courriel, Dean fournissait à un vaste réseau de leaders d’opinion des munitions pour faire contrepoids, chacun dans leur cercle d’influence, ou sur leurs perrons d’église, au message des médias. «On avait lu Dean, et on expliquait Dean.»

C’est vrai, Howard Dean n’a pas gagné. C’est vrai, Kerry disposait de moyens financiers énormes (à ce point qu’il n’a même pas dépensé tout son budget de campagne qui était de 322 millions de dollars, il qu’il a encore en caisse 22 millions de dollars!).

Mais l’objectif de Howard Dean procède d’une autre approche. «Sur le plan pratique, il ne s’agit même pas d’utiliser Internet pour recueillir des votes» dit-il, «Sa force est de permettre d’enrichir la démocratie en sollicitant la participation d’un plus grand nombre de personnes dans le processus. Au cours des deux dernières années, nous avons appris qu’un site Web peut servir à bien plus qu’à diffuser de l’information de base. Il peut devenir un centre à partir duquel ceux et celles qui nous appuient peuvent devenir partie prenante au processus.»

En complément de lecture, l’article de Gary Wolf dans le numéro de janvier 2004 de Wired Magazine How the Internet Invented Howard Dean.
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9.12.04

Écrire pour le Web : entre fond et forme

Qu’une présence Web prenne la forme d’un blogue, d’un site personnel, de grand média ou d’entreprise, certaines exigences sont incontournables, comme la qualité de l’écriture et son adaptation au médium Internet. Il est également intéressant de noter que ce thème a souvent été abordé, bien avant la déferlante des blogues.

Je me souviens qu’il y a plusieurs années, j’avais été invité à m’adresser à un groupe d’étudiants et d’étudiantes du niveau collégial pour parler de l’écriture sur le Web. Pour l’occasion, j’avais comme d’usage préparé une page référence pour illustrer le propos, page essentiellement constituée d’extraits des Chroniques de 1997 et 1998 dans lesquels j’abordais le sujet.

À ajouter à cette liste, la Chronique du 2 octobre 2001, Écriture Web : faut-il écrire pour les moteurs? Jill Whalen de la société RankWrite disait qu’il importe de glisser dans le texte d'une page Web une phrase ou une expression qui correspond, en langage naturel ou en mots clés, à ce qu'un utilisateur inscrira dans la case d'interrogation d'un moteur de recherche. On établit ainsi un plus haut degré de correspondance entre le contenu d'une page et l'interrogation éventuelle d'utilisateurs, ce qui se traduit par un meilleur positionnement de la page dans les résultats de recherche.

Whalen soutient que les concepteurs de contenus misent trop sur les balises meta (invisibles) des pages Web contenant des mots clés choisis, et pas suffisamment sur le fait que ces mots apparaissent ou non dans le contenu visible des pages.

Mais revenons à la question de savoir s’il faut écrire pour ou en fonction des moteurs de recherche. Amanda Watlington, conseillère en contenu Web auprès d’entreprises, reprend ce thème dans un article du numéro de décembre de e-marketing-news et l’adapte aux blogues. Elle écrit : «Ce que je suggère, c’est de créer intentionnellement sur un blogue du contenu qu’un moteur de recherche puisse facilement indexer, puis afficher en résultat, et ce à partir de mots clés que vous aurez déterminés à l’avance. Les blogueurs peuvent dynamiser leur blogue avant même de les créer en faisant une recherche de mots clés, et en s’inspirant de cette recherche pour rédiger le contenu.»

Watlington va plus loin. «La recherche efficace de mots clés pour un blogue nécessite de déterminer clairement au préalable, avant de produire du contenu, qui est l’auditoire visé par le blogue. Qui lira le blogue? Qu’en retireront ses lecteurs et lectrices? Quels sont leurs mots clés intuitifs?»

Je dois dire que j’ai de la difficulté avec cette approche d’écrire en fonction de mots clés, par et pour mots clés. Si l’idée est bonne pour un site Web d’entreprise qui cherche à rejoindre une «clientèle» intéressée à son «produit», vaut-elle autant pour un blogue? Watlington soutient aussi que puisque les blogues s’inscrivent dans des créneaux de sujets très pointus, leurs auteurs ont recours à un vocabulaire étroitement circonscrit. N’est-ce pas là nier aux blogueurs la possibilité de s’exprimer sur un vaste éventail de sujets, qui est un des avantages inhérents à la formule blogue?

Concernant les balises meta (invisibles) des pages Web contenant des mots clés choisis, disons que les moteurs de recherche (comme Google) se basent de moins en moins sur cet élément pour indexer et afficher des résultats. Et quant aux mots clés dans un texte, tout dépend de l’interrogation que saisira l’utilisateur, et du contexte. Épisode anecdotique sur l’effet Google que j’illustrais en mai dernier.

Heather Lloyd-Martin, aussi de RankWrite, y va d'une suggestion pour le moins intéressante pour évaluer un texte écrit pour le Web : le lire à voix haute. Il faudrait donc, selon elle, interpeller plus directement les lecteurs qui, en retour, sentiront que vous avez confiance en eux et que vous répondez à leurs attentes.

Pour Jean-Marc Hardy de Redaction.be (à mon avis le site le plus complet sur la question), il convient d’adopter un style qui convient à la lecture en ligne, l’autre partie de l’équation écriture/lecture.
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8.12.04

À lire : Chryde sur les blogues et le journalisme

Le 7 décembre, à Paris, la société Six Apart (plate-forme de publication de blogues TypePad) tenait sa première soirée de conférence-rencontre sous le thème «Coulisses du Weblog». À cette occasion, on a parlé de journalisme et il faut lire les notes que Chryde (oui, il a un autre nom), participant invité à la rencontre, avait préparées pour l’occasion. Pourquoi? Pour les récoupements et compléments qu’on y trouve sur le le débat dont je vous faisais part il y a quelques jours.

En avant-goût : «Les journalistes ne doivent donc pas se sentir "menacés" par les weblogs, mais ils ne peuvent plus, aujourd'hui, ne pas les prendre en compte. Cela peut être leur massue, leur tremplin, leur poil à gratter, mais surtout le guide qui mènera les individus en réseau vers leur travail. Aujourd'hui, chacun personnalise son information, pioche selon ses intérêts, ses envies, les stimulations qui lui sont données. Les weblogs deviennent, peu à peu, la matrice de cette nouvelle consommation de l'information.»
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Gallup : Confiance à l’égard des journalistes

Depuis trente ans, la maison de sondages Gallup interroge les étasuniens sur le degré de confiance qu’ils manifestent à l’égard de différentes professions. Au haut de l’échelle de l’indice de confiance cette année, les infirmières avec une cote de 79 %.

Cette année ne fait pas exception, le public attribuant aux journalistes une note très faible. L’indice de confiance envers les journalistes de la télévision est de 23 %, et de 21 % pour les journalisrtes de la presse écrite. À titre de comparaison, il est de 9 % pour les vendeurs d’automobiles, de 10 % pour les publicitaires, de 18 % pour les avocats, de 24 % pour les propriétaires de foyers de retraite et de 26 % pour les mécaniciens automobiles. Données complémentaires chez Gallup.

Greg Mitchell, éditeur de la publication Editor & Publisher, se console. S’il y a une bonne nouvelle pour les journaux, dit-il, c’est que depuis 2000, le nombre de répondants accordant un degré de confiance élevé ou très élevé aux journalistes est passé de 16 % à 21 %.

Le sondage de cette année a été mené par téléphone auprès d’un échantillon de 1 015 adultes âgés de 18 ans ou plus, entre le 19 et le 21 novembre, et comporte une marge d’erreur de 3 %.
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7.12.04

La pub et les blogues

La publicité en ligne commence à s’intéresser aux blogues. L’hebdomadaire Business Week explique que la conjugaison de deux facteurs accélérera la tendance. D’une part, on prévoit que les budgets de publicité en ligne auront augmenté de 35 % cette année, et que 11 % des utilisateurs d’Internet consultent régulièrement les blogues.

La société Google, propriétaire de la plate-forme Blogger, a été vite à comprendre le potentiel avec son service de placement publicitaire AdSense qui permet d’afficher des publicités en rapport direct avec les informations consultées par les utilisateurs d’un site. Si AdSense arrime le contenu aux publicités sur une base de mots clés, l’agence Blogads sélectionne elle-même les blogues avant de les proposer à ses annonceurs qui comptent de gros noms comme Paramount Pictures, The Wall Street Journal, Penguin Books, The New Yorker, Random House, Oxford University Press, O'Reilly and Associates, Howard Dean et John Kerry. Il y a aussi la société canadienne Marqui qui a décidé de payer les blogueurs pour qu'ils publient des billets comportant un lien vers son site comme l’explique Cyril Fievet.

Pour le moment, la publicité est relativement discrète sur les blogues, sauf celle d’une agence de rencontre française qui «flotte» sur votre écran mais que l’on peut désactiver en cliquant sur le petit X en haut à droite. Agaçant, même si on comprend l’envie de certains éditeurs de rentabiliser leurs blogues.

Revenons sur un thème déjà abordé dans ces pages. Jakob Nielsen dans sa plus récente chronique Alertbox publie des données fournies par John Boyd de Yahoo! et Christian Rohrer de eBay sur ce qui irrite les utilisateurs dans les publicités en ligne.

Les répondants à un sondage ont réagi soit négativement ou très négativement aux éléments publicitaires suivants : l’ouverture de nouvelles fenêtres en «pop-up» (95 %), la lenteur de téléchargement (94 %), les astuces trompeuses pour inciter à cliquer sur l’élément (94 %), l’absence d’un bouton pour fermer l’élément (93 %), les pubs qui s’interposent entre l’utilisateur et le contenu (93 %), les pubs qui ne révèlent pas immédiatement l’objet ou le service annoncé (92 %), celles qui déplacent les contenus (92 %), qui occupent la majeure partie d’une page (90 %), qui clignotent (87 %), qui flottent sur l’écran (79 %), ou qui émettent automatiquement des sons (79 %).

L’irritation des utilisateurs face à l’ouverture des nouvelles fenêtres les incite à opter pour des logiciels «anti-popup» (26 % en avril 2003, 69 % en septembre 2004). Évidemment, cette fonction intégrée au fureteur Firefox n’est pas étrangère à son succès.

Et ce qui est d’une importance capitale, tant pour les annonceurs que pour les éditeurs de sites Web, est que cette irritation entraîne une perception très négative de l’annonceur pour 50 % des utilisateurs, et une perception très négative du site Web qui diffuse de telles pubs pour 40 % d’entre eux.

Les bonnes pratiques? Les études de perception des utilisateurs évoquent cinq points dont les annonceurs devraient tenir compte : indiquer aux utilisateurs ce qui arrivera s’ils cliquent sur une pub; établir un rapport avec ce que les gens sont en train de faire; exprimer clairement qu’il s’agit d’une pub; dire explicitement ce qu’est le produit ou le service annoncé; fournir des renseignements additionnels sans que l’utilisateur n’ait à quitter la page qu’il consulte.

Évidemment, l’autre donnée de l’équation est la fréquentation des blogues. Si on en compte un très grand nombre, combien ont un lectorat suffisant pour intéresser les agences et les annonceurs qui ont toujours misé sur les gros porteurs?

Mise à jour, 9 décembre

Ingrid Marson de News.com cite la société de technologie publicitaire allemande Adtech qui constate qu’en octobre et novembre, seulement 0,11 % des utilisateurs du fureteur Firefox ont cliqué sur un bandeau publicitaire, comparativement à 0,5 % des utilisateurs de Internet Explorer. On attribue cette différence à la fonction de blocage d’ouverture des fenêtres publicitaires (popup) de Firefox. Seuls les utilisateurs de Internet Explorer qui ont installé la mise à jour SP 2 du système Windows XP ont accès à cette fonction, à moins qu’ils n’aient installé un logiciel spécifique d’un fabricant tiers.
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6.12.04

Congrès FPJQ : relance du débat sur le statut de journaliste, et choc de cultures

La Fédération professionnelle des journalistes du Québec (FPJQ) tenait son congrès annuel en fin de semaine dernière à Québec. Pour le nouveau président (élu par acclamation) Alain Gravel, il faut relancer le débat sur le statut des journalistes.

On lit dans Le Soleil : «La débat n'a rien de nouveau, admet M. Gravel. Même s'il n'a pas encore d'opinion tranchée sur le débat, il se dit déjà opposé à l'idée d'une corporation ou d'un ordre des journalistes. “Ça restreindrait trop l'accès à la profession. Ce qui est intéressant dans ce métier, c'est que les gens viennent de tous les secteurs.”»

Et dans Le Devoir : «Je suis tout à fait disposé à reprendre cette discussion, indique Alain Gravel. Techniquement, il m'apparaît difficile de créer un ordre professionnel, ce qui voudrait dire un examen uniforme pour accéder au métier de journaliste, alors que c'est une profession ouverte où les gens viennent de partout. Mais, à la lumière de menaces qui pèsent sur notre métier, avec la confusion des genres, la mainmise des relations publiques, ou encore la concentration des médias et la convergence, on peut discuter des façons de mieux encadrer la profession.»

Une année chargée pour le nouveau président, si on tient compte des nombreux autres dossiers dans lesquels la FPJQ s’investit (présence aux tribunaux, dossier des radios poubelles, accès à l’information gouvernementale, etc.), et nous lui souhaitons courage et énergie.

Un autre des dossiers importants selon nous, question de perspective, est celui de l’attitude des journalistes face aux blogues et aux blogueurs. Certains journalistes (dont moi) publient des blogues, mais bon nombre de blogues sont publiés par des gens qui ne sont pas journalistes, et qui n’ont aucune prétention que ce soit à l’être. Il semble qu’il y ait là matière à confusion dans l’esprit de plusieurs.

Mario Asselin est directeur d’un établissement d’enseignement et anime le projet des Petits carnetiers du journal Le Devoir qui encadre de très jeunes blogueurs. Il écrit : «En ce qui me concerne, cette expérience me prouve que les jeunes y prendront goût, assurément. Alors, la question n'est peut-être pas tellement de savoir si les journalistes du Québec utiliseront d'une manière ou d'une autre les carnets Web, mais plutôt de savoir pendant combien de temps encore, pourront-ils ignorer le phénomène?»

Il semble bien que consciemment ou inconsciemment, une bonne partie de la classe journalistique québécoise soit en phase de déni face aux blogues. Clément Laberge, un de nos meilleurs spécialistes québécois en technopédagogie, était invité à participer au congrès à une table ronde sur les blogues. Ils nous fait part sur son site des notes préparatoires intitulées «Blogueurs ou blagueurs», et terminait celles-ci en disant : «Je n'ai évidemment pas de leçon à vous donner... Vous connaissez évidemment mieux votre univers que moi... Je ne peux que suggérer à quoi les carnets pourraient vous être utiles dans l'immédiat... Mais ce que je sais, hors de tout doute, c'est que pour garder confiance dans les médias pour lesquels vous travaillez, j'ai besoin de savoir de savoir que vous comprenez ce qui se passe dans l'univers des carnets et que vous savez y puiser des renseignements.»

Dans ses réflexions post-FPJQ Laberge semble déçu : «J'ai beau essayer de me convaincre du contraire depuis deux jours, je n'y arrive pas. Il m'apparaît tout bonnement incompréhensible qu'un journaliste ne connaisse pas l'existence des carnets et, pire encore, celle des fils xml-rss. Qu'il ne fasse pas appel aux ressources de cet univers, soit, c'est dommage, mais qu'il en ignore jusqu'à l'existence, ça non... vraiment, je ne comprends pas! Dans le cas des responsables de salles de rédaction (rédacteurs en chef, éditeurs, etc.) c'est tout bonnement inacceptable.»

La polyvalente Martine Pagé animait au congrès des journalistes un atelier sur les blogues (ses notes de référence) sont ici. Elle a suggéré l’idée d’un carnet ou blogue collectif spécialement consacré aux... carnets et blogues et au journalisme. Selon Martine, qui commente chez Laberge (et aussi sur son blogue), «Pour ce qui est de l'idée du carnet collectif, il y a de plus en plus de ressources sur le Web, même en français, concernant les relations entre le journalisme et le blogue, mais je crois qu'il est pertinent de se donner un espace québécois consacré à ce sujet.» Et Laberge qui renchérit, «S'ils y a des intéressés (écrivez-moi!), je me propose d'offrir gratuitement (via Opossum) l'hébergement, une interface de base et des accès pour les contributeurs potentiels.»

Gâtés, nos journalistes, non? Ils se font offrir gratos par les blogueurs un carnet/espace d’information et de discussion sur les blogues, alors que, si besoin il y a, tout cela pourrait être très adéquatement financé par le budget de perfectionnement professionnel des entreprises de presse. Comprenez-moi, je ne suis pas contre l’idée, bien au contraire, c’est seulement que, présenté de cette façon...

Je n’étais malheureusement pas au congrès. J’ai par contre suivi attentivement par médias et blogues interposés les enjeux dont on a discuté. En ce qui a trait aux blogues et à la perception dont en ont les journalistes, je pense que c’est un choc de cultures.

Il y a quelques années, presque au début de l’arrivée d’Internet grand public au Québec, deux cultures se sont affrontées. Il y avait les «puristes» du Net, ceux qui croyait à la profondeur du contenu et aux valeurs communicationnelles et académiques du réseau dans un cadre technique quasi minimaliste. Dans l’autre camp, les «multimédia», pour qui il importait d’enrichir les présentations Web, de les animer par tous les moyens techniques disponibles, souvent sans égard à la profondeur du contenu. Les deux camps se sentaient menacés. Les puristes craignaient que le fond se perde dans la forme; les multimédia avaient peur que l’on accuse un retard ou que l’on cesse d’innover sur le plan de la forme. Graduellement, les deux tendances se sont rapprochées, mais non sans qu’il n’y ait eu de longs (et parfois pénibles) débats.

Dans le débat blogues et journalisme, j’ai l’impression de revivre un peu ce choc entre deux cultures, mais à cette différence que les blogueurs ne se sentent pas menacés par les journalistes, alors qu’on ne peut présumer l’inverse.

Les blogueurs aimeraient peut-être un peu moins de cynisme à leur endroit, c’est vrai. Comme Laberge écrit en clin d’oeil, «Un journaliste qui demande, lapidaire: “oui, mais c'est quoi la différence entre citer ma belle-soeur et citer un blogueur?”... voulant probablement laisser entendre que pareils quidams ne méritent pas son attention (ou celle de ses lecteurs). Disons d'abord que c'est pas très gentil pour sa belle-soeur... mais surtout, quoi penser d'un pareil mépris quand on connaît les énergies que les médias mettent à faire des “micros-trottoir/vox-pop”... M'enfin, la peur de la nouveauté sans doute!»

Sans doute. Ça me rappelle une conférence en 1997 pour laquelle le directeur des communications avait refusé les accréditations d’usage aux représentants de la presse en ligne. «N'importe qui sur la Rive-sud ou à Brossard peut s'inventer un média en ligne, pour nous ça ne veut rien dire» avait-il déclaré.

Un débat à suivre.
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5.12.04

Polytechnique : 15 ans

Ruban blancLe 6 décembre 1989, un tireur s’introduit dans une salle de cours de l’École polytechnique de Montréal, armé d’une arme semi-automatique. On connaît la suite. Deux jours plus tard, à l’émission «Ici comme ailleurs», diffusée à l’antenne radio de Radio-Canada, réalisée par Louise Carrière et animée par Michel Desautels, on invite Pierre Bourgault à commenter. «Je n’ai aucun commentaire : tout ce que je ressens, c’est de la peine. Avec ce qui s’est passé ces derniers jours, c’est encore cela que je ressens le mieux : c’est de la peine. Et je trouve que le Journal de Montréal de ce matin a fait un grand titre en première page qui résume bien ce que je ressens et probablement ce que beaucoup de gens ressentent : “Le Québec blessé”. On a l’impression d’une immense blessure qui mettra beaucoup de temps à se refermer.» Lire ici la transcription intégrale. Aussi, document audio sur le site des archives de Radio-Canada.
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Firefox : on approche du 40 %

Firefox, 5 dec. 2004Comme cette saisie d’écran du rapport statistique de fréquentation de ce blogue l’indique (en jaune), 37 % des personnes qui consultent ce blogue utilisent le fureteur Firefox. Autres statistiques : les versions 5 et 6 d’Internet Explorer totalisent 48 % des consultations, suivi de Safari avec 8 %. Soulignons qu’au 25 novembre dernier, la part de marché de Firefox sur ce site était de 21 %. Pour ce qui est des systèmes d’exploitation, 64 % des consultations se font sur des systèmes roulant sous Windows XP, 16 % sous Mac OS X, et 8 % sous Windows 2000. Sympatico.ca est le fournisseur de 19 % des personnes qui consultent ce site, Videotron.ca 17 %, et Wanadoo.fr 15 %.
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